Arrêts maladie abusifs : les 6 métiers sous surveillance
Lundi 4 août, nous vous révélions les mesures que compte prendre le gouvernement pour lutter contre la fraude sociale en 2023. Deux jours plus tôt, Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles de France, en avait évoqué les détails dans les colonnes du Parisien, notamment en ce qui concerne les arnaques qui visent l'Assurance maladie : le transport médical surfacturé et surtout les arrêts de travail abusifs.
Une explosion des arrêts de travail abusifs... et de leur coût
L'Assurance maladie a publié un communiqué en juin dernier. Il est édifiant : "Les montants détectés au titre des faux arrêts de travail s'élèvent à près de 30 millions d'euros en 2024 (contre 8 en 2023). 60 % des montants des fraudes ont pu être stoppés avant le versement des indemnités journalières [...] limitant ainsi fortement les pertes pour le système de santé." Depuis un décret pris le 5 juillet 2024, les contre-visites demandées par les employeurs ou l'institution elle-même contre les "malades" sont certes facilitées. Mais le phénomène aurait encore pris de l'ampleur en 2025. C'est pour cette raison que des feuilles d'arrêt de travail sécurisées infalsifiables (formulaires cerfa) à la manière des passeports ont été imposées depuis le 1er juillet.
Comment mettre fin à ces abus ?
La Cnam envisage dès 2026 de renforcer les contrôles les médecins soupçonnés de prescrire des "arrêts de travail de complaisance". Ou encore de limiter la durée des arrêts à 15 jours maximum, renouvelables. La profession est vent debout contre cette dernière proposition : comment un malade incapable de se déplacer pourrait se rendre chez son généraliste ou spécialiste pour obtenir un renouvellement (qui ne s'appellera plus "prolongation ?) sans sortir de chez lui, la visioconférence n'étant plus une option ? Par ailleurs, donner les motifs de l'arrêt à l'employeur deviendrait obligatoire, quand ce ne l'est pour l'instant que pour les services médicaux (ce qui reviendrait à mettre fin au secret médical...). Mettre fin à la fraude ne va pas être de tout repos ! Et encore, la fraude à la carte Vitale n'est pas à l'ordre du jour.
Des métiers ciblés par l'Assurance Maladie
Le magazine Modes & Travaux nous apprend que les contre-visites chez les patients ne sont pas le fruit du hasard. D'après nos confrères, les arrêts de travail seraient analysés par des algorithmes qui croiseraient différents critères pour décider d'un contrôle ou non. En fonction des données récoltées, des "alertes" sont émises. Mais elles ne concerneraient pas le type de maladie déclaré par le professionnel de santé, mais le métier du malade... Modes & Travaux précise que "Les contrôles peuvent être réalisés par téléphone, par visite d’un médecin conseil, ou via une convocation officielle. Le simple fait d’être absent lors de l’une de ces démarches, sans justification médicale valable, suffit à suspendre vos IJ (indemnités journalières)."
Des contrôles injustifiés et injustes ?
En effet, un recoupement de donnés de la Drees et de la CNAM, poursuivent nos confrères, a permis d'identifier 6 métiers particulièrement concernés par l'absentéisme, donc très surveillés dorénavant par les algorithmes... Qui ne seraient pas capables de prendre en compte leur pénibilité : "les métiers les plus ciblés sont aussi les plus physiquement éprouvants, les moins valorisés, les plus précaires" s'inquiète le magazine. Ces contrôles seraient-ils injustes et à même de jeter la suspicion sur ces professions ? Difficile de répondre à ces questions légitimes. Dans notre diaporama ci-dessous, les 6 métiers concernés surtout en été.
Le BTP (maçons, couvreurs, électriciens…)
Un taux d’absentéisme jusqu’à 8,5 % des effectifs (2 fois la moyenne national), avec un forte proportion d’arrêts de moins de 7 jours, souvent répétés.
Source : Modes & Travaux
L'hôtellerie-restauration (serveurs, cuisiniers, femmes de chambre)
Juillet-août est une période de tension extrême pour les employeurs. Les arrêts dans ce secteur augmentent de 18 % l’été d'après la CNAM. Modes & Travaux fait remarquer que "Dans l’hôtellerie, 1 employé sur 2 souffre de troubles articulaires dès 40 ans (INRS, 2024)."
Le secteur transport-logistique (chauffeurs, caristes, livreurs)
Modes & Travaux fait remarquer une "Exposition aux troubles musculo-squelettiques et la surcharge estivale. 1 arrêt sur 3 dure moins de 10 jours, déclenchant une suspicion de micro-arrêts à répétition."
Les aides-soignants et auxiliaires de vie
Le secteur serait surexposé au surmenage. Le taux d’arrêts longs y est 3 fois supérieur à la moyenne. Un contrôle automatique serait réalisé à partir de 2 arrêts courts dans l’année.
Modes & Travaux fait remarquer que "Dans les soins à domicile, l’absentéisme de longue durée explose du fait du vieillissement de la population accompagnée."
La fonction publique (enseignants, territoriaux)
L'indemnisation est de 90 % dès le premier jour. En période estivale un forte concentration des arrêts est constatée en juillet. Des contrôle ciblés sont réalisés en cas de chevauchements congés/arrêt.
Source : Modes & Travaux
Les cadres et télétravailleurs
Ils constituent une nouvelle cible avec un profil à risque nouveau. Les contrôles sont plus difficiles. Des signaux faibles (publications sur LinkedIn, activité perçue) peuvent déclencher une vérification.
Source : Modes & Travaux
Le nouveau cerfa sécurisé
Depuis le 1er juillet, c'est ce formulaire que votre médecin doit remplir. Il alimente les algorithmes qui définissent les métiers à risque de manière plus efficace...