Près de 14 millions d'euros de fraudes à la CPAM dans ce département !

Publié par Matthieu Chauvin
le 28/05/2025
clermont-ferrand, france - may 23, 2024  main entrance to a local office of the french 'assurance maladie' (ie medical insurance), the health branch of the social security in france
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Trop, c'est trop ! La fraude à l'Assurance maladie coûte dans notre pays une véritable fortune à l'Etat comme aux contribuables. Rien qu'en 2024, 628 millions d'euros ont pu être "sauvés" pour un total... 6,9 millions de tentatives d'escroquerie. Malgré le renforcement accru des contrôles, un département s'est tout de même distingué par l'ampleur du phénomène.

Régulièrement dénoncée dans certains médias, niée par certains responsables politiques, la fraude à l'Assurance maladie est un sport très français (il faut dire que nous avons l'un des systèmes les plus avantageux au monde mais aussi des plus permissifs). Face au communiqué de presse de la CNAM qui nous a été dévoilé le mardi 20 mars 2025 (nous attendions les chiffres par département qui ne sous sont pas tous parvenus), les seconds vont être forcés d'ouvrir les yeux : en 2024, le renforcement des contrôles mis en place petit à petit depuis 2022 a permis de "détecter ou stopper" 628 millions d'euros de préjudice. "Cette augmentation de 35% par rapport à 2023 illustre l’efficacité croissante de la stratégie et des moyens déployés" se félicite le service public. Toutefois, de cette somme, seuls 263 millions d'euros ont pu être "sauvés." Une hausse de 55 % il faut le reconnaître face à l'année précédente. Parmi tous les départements métropolitains de l'Hexagone, un se distingue en particulier. Et ce n'est pas le plus pauvre (qui reste la Seine-Saint-Denis) : l'Hérault.

L'Hérault : champion de la fraude à la CPAM ?

L'Assurance maladie locale indique dans son communiqué (publié lui le 14 mai) que dans l'Hérault (34), ce sont environ 13,64 millions d'euros de fraudes qui ont été "détectées et évitées", une augmentation de 49 % par rapport à 2023. C'est pour l'instant le montant le plus élevé que nous ayons constaté parmi les départements qui ont dévoilé leurs résultats. Mais là encore, seuls 6,6 millions n'ont pas profité aux escrocs. Sur les 7 millions envolés (pour l'instant ?), le profil des fraudeurs se décompose ainsi :  

  • les assurés à 47,7 % (52% au niveau national ) ;
  • les professionnels de santé en ville à 24,1 % (27 % au niveau national);
  • les établissements de santé à 24,9 % (21 % au niveau national) ;
  • les employeurs à 1,3 % (0,5 % au niveau national).

La CPAM de Charente-Maritime (5,8 millions de fraudes, plus 25 % en un an) constate elle de son côté que "Tout comme au niveau national, l’essentiel des fraudes détectées, en nombre, est le fait d’assurés alors qu’inversement, en montant, les fraudes commises par les professionnels de santé sont plus importantes. Ces fraudes sont donc moins nombreuses mais plus coûteuses." D'autres départements ont été durement touchés en 2024 : à hauteur de 12 millions pour la Haute-Garonne, 11 millions pour l'Isère, 10,6 millions pour la Seine-Maritime, 9,8 millions pour la Haute-Savoie...

Le fléau des faux arrêts maladie en augmentation

Les fraudes commises par les assurés, ont été "détectées et stoppées" à hauteur de 109 millions d'euros en 2024. Parmi elles, celles aux faux arrêts de travail (ou indemnités journalières) : elles représentaient un préjudice de 42 millions d'euros en 2024 contre 17 millions "seulement" en 2023. Grâce au contrôles, les versements d'indemnités indus ont pu être bloqués pour 60 % d'entre eux. L'Assurance maladie nous apprend que "Cette hausse s’explique principalement par une recrudescence des faux arrêts de travail vendus sur les réseaux sociaux, avec des kits 'prêts à l’emploi' composés de faux arrêts – souvent de plusieurs mois – et de faux certificats de travail. L’objectif de ces kits est de détourner directement l’argent public de l’Assurance Maladie et non pas d’obtenir des jours d’arrêts de travail de manière frauduleuse." Face à l'ampleur de la fraude numérique, "6 unités d’enquêteurs judiciaires composées de 60 agents dotés de compétences en investigation numérique et de prérogatives judiciaires ont été créées."

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Les audioprothésistes sont les principaux fraudeurs

La note est aussi salée en ce qui concerne les professionnels suivants : 

  • les établissements de soins et médico-sociaux : 63 millions (plus 23 % vs 2023) ;
  • les centres de soins (dans le viseur de la CPAM depuis un moment) : 39 millions (moins 28 % vs 2023) ;
  • les chirurgiens-dentistes : 14 millions (plus 56 % vs 2023) ;
  • les fournisseurs : 18 millions (plus 47 % vs 2023) ;
  • les infirmiers : 56 millions (plus 11 % vs 2023) ;
  • les masseurs-kinésithérapeutes : 17 millions (plus 71 % vs 2023) ; 
  • les médecins généralistes : 10 millions (plus 47 % vs 2023) ; 
  • les médecins spécialistes : 24 millions (plus 2 % vs 2023) ; 
  • les pharmaciens : 62 millions (plus 3 % vs 2023) ;
  • les transporteurs : 42 millions (plus 22 % vs 2023) ;

A noter : le trafic de médicaments et de fausses ordonnances, a généré en 2024 une fraude de 13 millions d'euros, détectée ou stoppée par l'Assurance maladie. Mais les principaux resquilleurs sont les audioprothésistes. Leur part est de 115 millions d'euros (dont 88 ont pu être récupérés) sur le total de 628 millions d'euros de fraude en 2024. L'organisme indique que "Désormais, pour que l’audioprothésiste puisse pratiquer le tiers payant au profit de l’assuré (et donc lui éviter une avance de frais importante), il est obligatoire (à quelques rares exceptions) d’effectuer une facture avec la carte Vitale des assurés. Cela doit éviter des usurpations d’identité. D’ores et déjà, l’impact de l’avenant est visible : le taux de télétransmission avec carte Vitale est passé de 45 % en moyenne sur le dernier trimestre 2024 à plus de 90 % en février 2025." Nombre d'audioprothésistes ont ainsi été interdits d'exercer. Et ceux qui ont toujours un cabinet ou espèrent en ouvrir un seront sous surveillance permanente à l'avenir.

Quant aux sanctions, elles seront maintenant plus sévères, pour tous. Pour l'heure, l'Assurance maladie a récupéré 50 millions suite à des procédures. Un dispositif est déjà en place pour aider les pharmaciens à répérer les fausses ordonnances. Et à partir de juillet 2025, les arrêts de travail se feront sur un formulaire Cerfa sécurisé, à la manière d'un passeport ou d'une pièce d'identité.

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