Ces travailleurs ne peuvent pas faire valoir leur carrière longue pour la retraite

Publié par Matthieu Chauvin
le 29/08/2025
Conseil d'état
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© Fourmy/ANDBZ/ABACA
Ceux, qui dans les années 80, ont effectué des TUC, pour "travaux d'utilité collective", une sorte d'emplois-jeunes avant l'heure créée pour tenter d'enrayer le chômage qui ne cessait alors de grimper, se voient définitivement lésés par une décision du Conseil d'Etat. Ce dernier a suivi le gouvernement qui dès 2023, avait refusé de prendre en compte ces TUC dans les carrières longues, dispositif qui permet de partir avant l'âge légal de 64 ans.
 

Etait-ce le dernier espoir pour les anciens des TUC d'obtenir justice ? On ne parle malheureusement pas là des gâteaux apéritifs, mais des jeunes qui, à partir de 1984, ont effectué des "travaux d'utilité collective", d'où l'acronyme "TUC." Cette décennie avait été marquée par une très forte montée du chômage. Pour tenter d'inverser cette courbe négative, le gouvernement d'alors, celui du Premier ministre Laurent Fabius, avait créé ce dispositif pour les "jeunes de 16-21 ans sans activité ni formation ou des 22-25 ans inscrits à l'ANPE", rappelle MoneyVox.

Les TUC : un pansement sur une jambe de bois

Ceux qu'on appelait les "tucistes" étaient envoyés par l'ancêtre de France Travail dans des administrations, des associations, voire des structures privées, dans ce dernier cas via des contrats aidés. Nos confrères soulignent que des abus de la part de certains employeurs avaient vite été constatés. 

L'Etat lui, réduisait les chiffres du chômage, et réalisait des économies sur les cotisations retraite (voir plus bas), "considérant les jeunes comme des stagiaires de la formation professionnelle." Sauf que la majorité n'avait jamais reçu la moindre formation... Plus de 40 ans après, les tucistes reviennent sur le devant de la scène.

Les TUC privés du dispositif carrières longues 

Une avancée avait eu lieu lors de la réforme de 2023, qui prenait pour la première fois en compte les TUC effectués par les intéressés dans leur quête des 172 trimestres nécessaires à l'ouverture des droits à la retraite. Autrement dit, les TUC étaient enfin reconnus comme un "vrai" travail. Mais, bien que beaucoup aient commencé ces contrats aidés très jeunes, le gouvernement leur refuse systématiquement depuis l'accès au dispositif carrières longues

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En effet nous apprend MoneyVox, a été inscrit dans la loi que "ces trimestres ne sont pas 'réputés cotisés', ce qui aurait permis un départ anticipé." Il y a deux ans, Yves Coussement, trésorier de l'association "TUC, les oubliés", avait accordé un entretien au média numérique : "On attend pendant 40 ans que les TUC soient enfin reconnus comme du travail... et on ne nous donne que la moitié !" La pilule était effectivement dure à avaler, d'autant si l'on prend conscience du statut précaire des TUC...

Une privation contraire à l'esprit de la réforme ?

L'association a d'abord tenté de négocier avec le gouvernement, sans succès. Le Premier ministre d'alors, Gabriel Attal, avait même été sollicité début 2024. Il lui était demandé de rectifier cette entorse à "l'équité des droits" à la retraite. Me Jérôme Rousseau, l'avocat de "TUC, les oubliés", a considéré l'absence de réponse comme un "refus" pur et simple. Or, pour l'association, le fait de priver les tucistes du dispositif carrières longues va à l'encontre de "l'esprit même de la réforme", car cette dernière "portait la reconnaissance de ces trimestres comme des périodes travaillées."  Les fameux trimestres assimilés.

Les tucistes saisissent le Conseil d'Etat

Ayant épuisé toutes les autres options, l'association a alors saisi le Conseil d'Etat à l'été 2024. Le souhait des 1,5 million de tucistes et "autres contrats semblables (SIVP, stages d'insertion dans la vie professionnelle ou stages jeunes volontaires)" n'était pas d'obtenir un nouveau calcul de leurs droits, simplement de partir plus tôt au vu de la durée de leur vie professionnelle.

Cette semaine du 25 août 2025, malheureusement, la saisine a échoué. Le Conseil d'Etat a jugé que le gouvernement n'était pas "tenu" d'accorder le statut de carrières longue aux tucistes. MoneyVox a pu consulter la décision : "Il ne ressort pas des pièces du dossier (...) que le Premier ministre, qui disposait d'une marge d'appréciation conférée par le législateur (...), ait commis une erreur manifeste d'appréciation."

L'association ne compte pas en rester là 

Suite à cette déception, "TUC, les oubliés", a réagi sobrement mais fermement : "Bien que cette décision soit une déception pour nous toutes et tous, elle ne marque pas la fin de notre combat. Au contraire, elle renforce notre détermination à continuer à défendre la justice sociale et les droits des oubliés de la retraite." Et regarde déjà comment contre-attaquer pour obtenir gain de cause.

 

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