Décès de Georgette Lemaire à 82 ans, une vraie chanteuse populaire
En 1965, la France entière se passionne pour une voix brute, puissante, celle d'une "ménagère" au destin hors norme plébiscitée par les téléspectateurs du Jeu de la chance, ce qu'on appelait alors un "télé-crochet", animé par Roger Lanzac. Le journal France Soir titre alors en Une : "Une ménagère bouleverse la France". C'est le début d'une ascension fulgurante pour celle que l'on surnomme rapidement la "nouvelle Piaf" car elle avait interprété "L'Hymne à l'amour".
Pourtant, derrière les paillettes et les ovations de l'Olympia, le conte de fées va virer au cauchemar. Loin des projecteurs, l'artiste Georgette Lemaire, décédée mardi 23 décembre 2025 à 82 ans, nous apprend Le Figaro, vivait une réalité bien différente, marquée par les épreuves et le dénuement. "Ce jeu de la chance est devenu pour moi celui de la malchance" déclarera-t-elle plus tard, relatent nos confrères. Retour sur un parcours en dents de scie qui interroge sur la cruauté du show-business.
Une ascension brisée par la concurrence ?
Tout commence pourtant sous les meilleurs auspices pour celle qui est issue d'un milieu très modeste. Georgette Kibleur, de son vrai nom, née le 15 février 1943, quitte la misère du studio de 12 m2 où elle s'entasse avec son mari Daniel Lemaire et ses deux enfants, aux Puces de Saint-Ouen, pour conquérir le petit écran. Sa gouaille de titi parisienne et son vibrato unique séduisent immédiatement le public.
Si les auditeurs se délectent de ses interprétations, peu connaissent à l'époque les secrets du tube de Georgette Lemaire, "Vous étiez belle, madame". Écrit par Jean-Jacques Debout et Pascal Sevran en 1968, ce titre devient son hymne et lui ouvre les portes de la gloire. Avant cela, elle avait fait durant un mois les premières parties des concert de Georges Brassens, tout de même.
Mais cette lumière attire aussi les ombres. L'histoire de Georgette Lemaire et la rivalité avec Mireille Mathieu a marqué les esprits et la presse de l'époque. Les deux femmes, issues de la même émission, sont constamment opposées. Georgette garde une amertume tenace envers ce système, affirmant avoir été sacrifiée au profit de "la demoiselle d'Avignon". "Jonny Stark m'a tué", confiera-t-elle plus tard, désignant l'impresario de sa rivale comme l'artisan de son déclin professionnel.
Quels drames ont précipité sa chute ?
Si la carrière s'essouffle, c'est dans l'intimité que le destin frappe le plus durement. La chanteuse avait levé le voile avec une honnêteté brutale sur la violence qui régnait dans son foyer. "Oui, mon mari me battait", avait-elle avoué, brisant le silence sur des années de souffrance conjugale, d'abord avec le père de ses fils, puis avec son, pianiste Bob Sellers, pour lequel elle avait divorcé. Ces épreuves personnelles s'ajoutent aux difficultés professionnelles, dessinant les causes de la descente aux enfers de Georgette Lemaire.
Le sort s'acharne jusqu'en 2022, année où elle perd son fils Yvan, qui aurait succombé à ses addictions. Une blessure béante qu'aucun titre honorifique, pas même celui de Chevalière des Arts et Lettres reçu en 1986 des mains de Jack Lang, ne saurait apaiser. Diminuée et affectée, l'artiste voit son quotidien s'assombrir davantage.
Comment Georgette Lemaire a-t-elle fini sa vie dans la précarité ?
L'icône des années 60 s'est retrouvée confrontée à une réalité économique glaciale. La précarité financière de la chanteuse Georgette Lemaire était devenue le triste refrain de ses dernières années. En 2014, elle lançait un cri du cœur médiatique, exposant l'impossibilité de survivre dignement : "Comment voulez-vous que je paie un loyer de 500 euros avec une retraite de 800 ?", demandait-elle, alors sous le coup de menaces d'expulsion de son petit appartement de Créteil.
Face à cette situation intenable, c'est finalement à la Maison Nationale des Artistes que Georgette Lemaire a dû trouver refuge. Cet établissement situé à Nogent-sur-Marne, unique en son genre, accueille les artistes en fin de vie dans un ancien château entouré d'un parc.
Selon nos confrères de France Dimanche, elle y finirait ses jours tristement, souffrant de syllogomanie, un trouble qui empêche de jeter le moindre objet. Beaucoup de ses fans se demandent encore comment Georgette Lemaire a fini sa vie dans de telles conditions, elle qui avait tout pour régner sur la chanson française.