Noël : pourquoi le chocolat reste-t-il si cher alors que le prix du cacao s'est effondré de 55 % ?
Le cours du cacao vient de subir une chute aussi soudaine que sa hausse fut spectaculaire. Après avoir affolé les compteurs et inquiété toute la filière agroalimentaire, la fièvre pour fève brune connaît une accalmie notable sur les marchés financiers. Pourtant, dans les rayons des supermarchés, les étiquettes continuent de grimper, laissant les consommateurs perplexes à l'approche des fêtes de fin d'année.
Une chute vertigineuse des cours mondiaux
C’est un véritable revirement de situation qui s’opère sur les places boursières. Alors que la tonne de cacao s'échangeait à un niveau record historique de 12 906 dollars en décembre 2024, la bulle semble avoir éclaté. Aujourd'hui, les graphiques montrent une réalité bien différente : le cours oscille désormais entre 5 000 et 5 700 dollars la tonne (5 701 dollars précisément le 9 décembre 2025), selon les données rapportées par Trading Economics.
Cette correction représente un effondrement de près de 55 % de la valeur de la matière première en l'espace de quelques mois. Pour les observateurs qui surveillent l'évolution du cours du cacao, ce mouvement marque la fin d'une période d'hystérie boursière inédite, même si les prix actuels demeurent historiquement très élevés (la tonne "s’échangeait entre 1 000 et 4 000 dollars depuis les années 1980" à la bourse de New York, rappelle 20 Minutes).
La fin de la frénésie spéculative
Comment expliquer un tel plongeon ? D'une part, la spéculation financière, qui avait artificiellement gonflé les prix, s'essouffle. De nombreux fonds d'investissement, sentant le vent tourner, se sont positionnés à la baisse, accélérant le recul des cours. D'autre part, la situation agricole s'améliore. Les craintes d'une pénurie majeure s'éloignent grâce à une météo plus clémente en Afrique de l'Ouest.
La Côte d'Ivoire et le Ghana, qui assurent à eux deux, d'après Les Echos, environ 60 % de l'offre mondiale, bénéficient de meilleures conditions climatiques, entre autres paramètres : des problèmes systémiques dans ces pays, mais qui s'améliorent. Comme "le vieillissement des arbres, la propagation du swollen shoot virus (œdème des pousses du cacaoyer) ou la faible utilisation d’engrais et de pesticides faute de revenus suffisants" selon un spécialiste de la banque hollandaise Rabobank, cité par l'AFP, et repris par 20 Minutes. Cela permet à l'Organisation Internationale du Cacao (IC,CO) de réviser ses prévisions et d'anticiper un surplus pour la campagne 2025/2026.
Pourquoi votre chocolat reste hors de prix
Malgré cette chute boursière, il ne faut pas s'attendre à un miracle en caisse. Si vous espériez voir l'impact de la chute du prix du cacao sur le chocolat dès cette fin d'année, la déception risque d'être au rendez-vous. L'inertie industrielle est la principale coupable : il existe un décalage incompressible de 9 à 12 mois entre l'achat de la fève brute et la mise en rayon de la tablette.
Concrètement, les pères Noël en chocolat qui garniront vos tables ont été fabriqués avec du cacao acheté au prix fort, lors des pics de fin 2024 et début 2025. Les industriels doivent d'abord écouler ces stocks onéreux avant de pouvoir répercuter la baisse actuelle. C'est ce mécanisme qui fige le prix du chocolat à des niveaux élevés.
De plus, même divisé par deux, le cacao reste cher. Comme le souligne Simon Lacoume, économiste sectoriel chez Coface : "Malgré ce repli, les cours restent deux fois supérieurs à leur moyenne 2012-2022". En effet, le prix moyen de la tonne de cacao sur 2012-2022 s'établissait autour de 2 525 dollars, soit moitié moins que le tarif "corrigé" d'aujourd'hui.
La lente répercussion du prix des fèves de cacao sur le consommateur signifie que si baisse il y a, elle ne sera probablement visible qu'à l'horizon fin 2026.