Accident du funiculaire à Lisbonne : un mystère entourant le câble
L’enquête sur le dramatique accident du funiculaire de la Glória, à Lisbonne, au Portugal, qui a fait 16 morts et plus d’une vingtaine de blessés le 3 septembre dernier, livre ses premières conclusions. Selon le Bureau d’enquête sur les accidents aériens et ferroviaires (GPIAAF), le câble reliant les deux cabines de l’installation "n’était pas conforme aux spécifications en vigueur", rapporte Le Monde. Ce défaut, associé à des procédures de maintenance jugées défaillantes, est au cœur du rapport préliminaire publié le 20 octobre.
Un câble non conforme
Le rapport du GPIAAF, long de 35 pages, précise que la déconnexion du câble entre les deux cabines a provoqué la catastrophe. Cet élément central du mécanisme, installé depuis 337 jours seulement, devait avoir une durée de vie utile de 600 jours. "Le câble n’était pas conforme aux normes de l’opérateur Carris", note l’organisme, tout en soulignant que la zone où il a cédé n’était pas visible sans démontage, ce qui rendait impossible la détection d’un défaut lors des inspections.
Pourtant, "l’inspection visuelle programmée, réalisée le matin du jour de l’accident, n’a détecté aucune anomalie", indiquent les enquêteurs. À 18 heures, les deux cabines étaient stationnées dans leurs gares respectives. Quelques minutes plus tard, alors que la descente commençait, le système a perdu "la force d’équilibre garantie par le câble de connexion".
Une descente à 60 km/h et des freins impuissants
Selon le rapport, la cabine numéro 2, située en bas du parcours, a reculé brusquement tandis que la cabine numéro 1, en haut de la Calçada da Glória, s’est mise à descendre à toute vitesse, atteignant environ 60 km/h avant de dérailler et heurter un immeuble. Le choc a provoqué la destruction presque totale de la cabine en bois et de lourds dégâts dans le quartier.
Le conducteur, qui a péri dans l’accident, avait bien activé les deux systèmes de freinage. Mais, selon les experts, ceux-ci "n’étaient pas conçus pour arrêter le wagon sans l’aide du contrepoids". L’ingénieur Carlos Neves, président du collège d’ingénierie mécanique de l’Ordre des ingénieurs portugais, dénonce une "faille structurelle de sécurité" : "Nous avions une bombe à retardement entre les mains. Comment un transport en commun peut-il fonctionner sans système de sécurité efficace ?"
Des contrôles internes défaillants et un réseau à l’arrêt
Le GPIAAF met également en cause le processus de maintenance de Carris, l’entreprise publique exploitant les funiculaires lisboètes. Les opérations d’entretien ont bien été "enregistrées comme exécutées", mais les enquêteurs ont "recueilli des éléments selon lesquels ces registres ne correspondent pas aux tâches réellement effectuées".
Face à ces constats, l’agence recommande que tous les autres funiculaires et ascenseurs de Lisbonne restent à l’arrêt, tant que leur sécurité n’aura pas été vérifiée. Ils devront être équipés de systèmes "capables d’immobiliser les cabines en cas de rupture du câble".
Parmi les victimes figurent cinq Portugais et onze étrangers, dont une Française, trois Britanniques, deux Sud-Coréens et deux Canadiens.