Niches fiscales : les voitures de fonction bientôt exclues ?
"Une Ferrari Daytona n'est pas une voiture de fonction, ça, ça peut quand même tomber sous le sens." C'est par cette formule choc que Cécile Duflot, directrice générale d'Oxfam France, a relancé le débat sur la fiscalité de ces véhicules, en pleine discussion sur le Budget 2026. Dans l'émission de RMC Apolline Matin, la présidente de l'ONG pointe du doigt un système jugé inégalitaire qui permettrait de subventionner, via l'entreprise, le train de vie des ménages les plus aisés.
Un manque à gagner de 1,8 milliard d'euros pour l'État
L'attaque d'Oxfam est précise et chiffrée. L'organisation via sa présidente dénonce une "très, très grosse niche fiscale" qui coûterait cher aux finances publiques. Selon l'ancienne ministre du Logement, la fiscalité avantageuse des voitures de fonction représente 1,8 milliard d'euros de manque à gagner annuel pour l'État, soit plus que le budget du ministère de la Jeunesse et des Sports, affirme-t-elle ! Ce montant correspond aux impôts et cotisations sociales non perçus sur ces véhicules, souvent utilisés à titre personnel mais financés par l'entreprise qui s'en sert comme outil de défiscalisation.
Des berlines de luxe à des prix prohibitifs
Dans le viseur de l'ONG se trouvent particulièrement les berlines de luxe. Le coût pour la collectivité des modèles type Porsche, Ferrari ou BMW est estimé à environ 140 millions d'euros. Cécile Duflot s'insurge contre le fait que 70 % de l'usage de ces véhicules serait d'ordre privé, alors même qu'ils bénéficient d'une défiscalisation massive. Elle précise que "les trois-quarts des Porsche qui sont vendues en France, et deux-tiers des BMW, le sont comme voitures de fonction et alors, le pompon du pompon, pour la voiture la plus chère du monde, la Ferrari Daytona, quatre voitures sur cinq, ce sont aussi des voitures de fonction (un modèle à récemment été adjugé aux enchère pour... 26 millions de dollars, Ndlr)."
La voiture de fonction : un marqueur d'inégalités sociales
Cécile Duflot indique que 20 % de la population active uniquement a accès à une voiture de fonction, "et seulement les cadres, et parmi eux les plus riches des cadres." Elle déplore que leur attribution se fasse de "manière genrée" : "Dans les trois-quarts des cas, ce sont des hommes." Elle poursuit : "Si c'est dire que les gens ont une voiture de fonction alors qu'en fait (sic), on leur donne aux frais de l'Etat en partie une voiture personnelle, ça ne marche pas. En tout cas, ça ne marche pas de le faire payer par la solidarité nationale dans un moment où on demande à tous de faire des efforts."
Pas d'interdiction mais une limitation
La présidente de l'OXFAM reste réaliste, d'autant que la voiture de fonction, même utilisée comme voiture de "service", fait souvent partie d'un "package" lors de recrutements : "Ensuite, on peut instaurer un plafond de prix. On ne va pas supprimer les voitures de fonction, on peut imaginer que dans certains cas, c'est nécessaire, mais on limite la taille, on limite le prix et puis on prouve que c'est bien une utilisation professionnelle." Les habitudes risquent d'être difficiles à changer car la voiture coûte très cher à tous, même aux Français aisés...