"Le journal d'un prisonnier" de Nicolas Sarkozy : ce que révèle l'ex-président sur la prison de la Santé
Pour la première fois sous la Ve République, un ancien président de la République a été incarcéré. Du 21 octobre au 10 novembre, Nicolas Sarkozy a passé vingt jours en détention provisoire à la prison de la Santé, suite à sa condamnation dans l'affaire du financement libyen de sa campagne de 2007. Une épreuve qu'il a rapidement qualifiée de "cauchemar", un moment "très dur" et "éreintant" devant la Cour d'appel de Paris qui a décidé de sa remise en liberté.
Pourtant, loin de se laisser abattre, l'ex-chef de l'État a transformé cette réclusion forcée en une période d'écriture intense. Armé d'un simple stylo, il a noirci "des pages et des pages", donnant naissance, révèle Le Parisien, à un récit brut et inattendu, dont la date de sortie est fixée au 10 décembre 2025 aux éditions Fayard : "Le journal d'un prisonnier."
Comment un "cauchemar" est-il devenu un livre ?
L'annonce de la publication a surpris, survenant à peine dix jours après sa libération. Cet ouvrage de 216 pages se présente comme une introspection, une manière de "poser les choses par écrit" durant une "séquence lourde", confient ses proches. Le livre n'est pas seulement le récit d'un homme politique déchu, mais le témoignage d'un détenu découvrant un univers dont il est habituellement très éloigné.
Le texte se concentre sur le quotidien, les sensations et les rencontres qui ont marqué ce court séjour. C'est dans l'isolement de sa cellule que l'écriture est devenue un exutoire, une façon de documenter une expérience hors du commun et d'en tirer une force nouvelle. "En prison, il n’y a rien à voir, et rien à faire. J’oublie le silence qui n’existe pas à la Santé où il y a beaucoup à entendre. Le bruit y est hélas constant. À l’image du désert, la vie intérieure se fortifie en prison" indique l'extrait qui fait la promotion du livre.
Que révèle-t-il sur la vie à l'intérieur de la Santé ?
L'un des passages les plus forts du livre brise un mythe sur la vie carcérale. On imagine souvent la prison comme un lieu de silence pesant, mais la réalité est tout autre. Un extrait du journal d'un prisonnier de Sarkozy évoque ce silence constant qui n'existe pas : "J'oublie le silence qui n'existe pas à la Santé où il y a beaucoup à entendre. Le bruit y est hélas constant". Son ami et ex-détenu de la même prison Patrick Balkany l'avait pourtant prévenu...
Au-delà de cette description sensorielle, l'ancien président livre une observation surprenante. Il rend un hommage appuyé au personnel pénitentiaire de Sarkozy, saluant des surveillants "d'une humanité exceptionnelle" qui ont rendu ce "cauchemar supportable". Une perspective rare, qui tranche avec les discours habituels sur l'institution carcérale et met en lumière le rôle crucial de ceux qui y travaillent.
Témoignage sincère ou stratégie politique ?
En publiant ce livre, Nicolas Sarkozy fait bien plus que partager son expérience. Il place un coup de projecteur sur l'état des prisons françaises, qu'il qualifiait lui-même de "honte de la France" en 2009 alors qu'il était à l'Élysée. Son témoignage personnel vient illustrer une crise bien connue, documentée par les chiffres clés de la surpopulation carcérale en France : selon l'Observatoire International des Prisons (OIP), le taux d'occupation moyen atteignait 138,9 % dans les maisons d'arrêt en 2022.
Alors, quelle est la portée politique du livre de Nicolas Sarkozy ? Pour beaucoup d'observateurs, cette publication est une habile manœuvre de communication. Elle lui permet de transformer un revers judiciaire en une forme de "renaissance" médiatique, de reprendre la main sur son image et de "partager son expérience avec les Français" à la veille de son procès en appel. "Le journal d'un prisonnier" devient alors autant une analyse qu'un outil de reconquête.