Libération de Nicolas Sarkozy : ces affaires pour lesquelles il peut encore être condamné
Lundi 10 novembre en début d'après-midi, Nicolas Sarkozy, suivi par une escorte composée de sa garde rapprochée et par une file de journalistes à moto, regagnait son domicile parisien du XVIe arrondissement. Libre, et sans bracelet électronique à la cheville. La Cour d'appel de Paris venait d'ordonner la fin de son incarcération à la prison de la Santé après 3 semaines passées à l'isolement, répondant favorablement à sa demande de remise en liberté et à celle de ses avocats.
Présumé innocent avant, présumé innocent après
L'ancien président de la République étant bien sûr soumis à des mesures de contrôle judiciaires strictes, mais pas trop contraignantes. Le lendemain, il était filmé en compagnie de ses gardes du corps en train de faire son traditionnel jogging. Il n'a cependant pas le droit d'entrer en contact avec toutes les personnes ayant un rapport avec "l'affaire du financement libyen" de sa campagne 2007 qui l'a mené derrière les barreaux, ni avec son ami et actuel ministre de la Justice, Gérald Darmanin. Ce dernier lui avait rendu visite la semaine précédente, ce qui avait provoqué l'ire de différents syndicats de magistrats. Nicolas Sarkozy reste présumé innocent et attend maintenant d'être rejugé en appel.
Un agenda judiciaire chargé à venir
Mais celui qui vient de recouvrer la liberté après une détention qu'il a lui même qualifiée de "très difficile", n'en a pas terminé avec la justice. Pour l'affaire que nous venons d'évoquer, il avait été condamné à 5 ans en première instance avec mandat de dépôt, bien qu'ayant immédiatement fait appel. Il restait donc déjà présumé innocent, raison pour laquelle son emprisonnement, "gage de sécurité" pour les juges, avait fait scandale jusqu'à la gauche. Ils avaient été accusés de vouloir se "payer" Nicolas Sarkozy, qui figurait sur le fameux "mur des cons" du syndicat de la magistrature, dont l'existence avait été révélée en 2013.
Mais cette mise sous écrou jugé excessive ne l'empêchera pas d'affronter de prochaines épreuves, comme le relate Le Figaro. Il y aura donc l'appel de l'affaire du financement libyen qui devrait débuter en mars 2026. Condamné une première fois, il pourrait donc retourner à la Santé si la décision est confirmée (il aurait alors 5 ans moins 3 semaines à faire...). Mais un autre procès arrive, dès la fin du mois.
L'affaire Bygmalion : suite et fin ?
L'affaire Bygmalion concerne le financement de la campagne présidentielle 2012 de Nicolas Sarkozy. Un système de fausses factures avait été mis en place pour masquer l'explosion des dépenses (43 millions contre 23,3 millions autorisés rappellent nos confrères) via l'agence de communication du même nom, sous l'impulsion de l'UMP (aujourd'hui Les Républicains). L'ex président avait été condamné à 1 an de prison en première instance pour financement illégal de campagne, puis à 1 an de prison dont 6 mois ferme aménagés sous bracelet électronique le 14 février 2024 par la Cour d'appel de Paris, déjà. Le tribunal avait estimé qu'il n'avait pas participé au montage financier, mais en était le destinataire en tant que candidat.
Il s'était pourvu en cassation, affirmant son innocence depuis le début. Et la décision d'examiner à nouveau les faits sera rendue dans moins de 15 jours : le 26 novembre. La Cour de cassation suivra-t-elle l'avis de l'avocat général de rejeter ce pourvoi ? Cela signifierait que la condamnation de Nicolas Sarkozy en appel serait confirmée et inscrite à son casier. Sa peine serait alors déjà connue. En revanche, si elle a des doutes sur sa "culpabilité", elle peut ordonner la tenue d'un nouveau procès, précise le quotidien.
Le fantôme de Ziad Takieddine
Homme d'affaires franco-libanais pour le moins sulfureux, Ziad Takieddine, avait fait la une des médias. En 2020, alors qu'il avait à de nombreuses reprises mis en cause Nicolas Sarkozy comme acteur principal du - encore lui - financement libyen de sa campagne de 2007, il s'était rétracté auprès de BFM TV et Paris Match, rappellent nos confrères : il affirmait finalement que l'ancien président n'avait "pas touché un centime, cash ou pas cash, pour l’élection présidentielle."
Puis en 2021, alors à Beyrouth, il avait réitéré ses accusations auprès de juges français qui l'auditionnaient : Paris Match aurait "déformé" ses propos, et le journal, de plus, "appartient à un ami de Sarkozy." Paris Match appartenait alors au groupe Lagardère, dont l'ancien président était membre du conseil d'administration... Dans la foulée, une information judiciaire sera ouverte pour subornation de témoin, pointant notamment les "conditions de préparation de l'interview" au cours de laquelle Takieddine s'est rétracté.
La célèbre Mimi Marchand, qui aurait organisé l'entretien, est mise en examen et placée sous contrôle judiciaire pour subornation de témoin, parmi d'autres intermédiaires. Pour résumer, toutes ces personnes sont soupçonnées d'avoir demandé à l'homme d'affaires de revenir sur ses accusation avec "contrepartie." En octobre 2023, c'est au tour de Nicolas Sarkozy d'être mis en examen pour "recel de subornation et de témoin et association de malfaiteurs en vue de la préparation d’escroqueries au jugement en bande organisée" rappelle Le Figaro. Et, en 2024, c'est sa femme Carla qui est placée sous contrôle judiciaire, puis mise en examen pour "recel de subornation de témoin" et "participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre l’infraction d’escroquerie au jugement en bande organisée." Ziad Takieddine est lui décédé en septembre 2025. L'enquête suit son cours.
Du consulting déguisé en Russie ?
Suite à des révélations de Mediapart, Nicolas Sarkozy fait l'objet depuis 2020 d'une enquête préliminaire pour "trafic d'influence", ouverte par le parquet national financier (PNF). D'après le site cher à Edwy Plenel, l'ex-chef d'Etat aurait "conclu en 2019 un contrat portant sur plusieurs années pour un montant de 3 millions d’euros."Un deal avec "une société d’assurances russe, Reso Garantia, contrôlée par deux milliardaires russes d’origine arménienne, Sergueï et Nikolaï Sarkissov."Il est notoire que l'ex-président monnaie cher ses activités de consulting et ses conférences depuis la fin de son seul et unique mandat.
Mais "La justice cherche à vérifier si l’ancien chef de l’État a seulement agi comme consultant, ce qui serait parfaitement légal, ou s’il se serait adonné à des activités de lobbying potentiellement délictuelles pour le compte des oligarques russes" affirme Mediapart. Là aussi, l'enquête suit son cours.
L'attribution de la Coupe du monde au Qatar
Se focaliser sur Nicolas Sarkozy pour avoir fait du lobbying en faveur de l'émirat pour l'attribution de la Coupe du monde de football 2022, malgré la controverse que cela a suscité (et on a été en finale après tout !) est un peu injuste tant de personnalités sont soupçonnées ou ont été condamnées pour avoir fait de même. Malgré tout, il existe bien un "Qatargate", comme l'a surnommé la presse. Les faits : l'ancien président aurait organisé un déjeuner avec Michel Platini qui était alors le patron de l'UEFA (l'organisme gestionnaire et "propriétaire" du football en Europe) et deux "hauts dirigeants qataris." Le parquet national financier mène toujours l'enquête sur ce dossier, et Nicolas Sarkozy est un des protagonistes.
Une semaine après, l'ancien plus grand footballeur français (qui a eu d'autres démêlés avec la justice...) accordait son vote au Qatar. "L’association Anticor a déposé plainte en avril 2023 contre Nicolas Sarkozy pour «trafic d’influence» et «corruption d’un agent public étranger" précise Le Figaro. Evidemment, là encore, l'enquête suit son cours.