Chaleur : ce moyen d'éteindre les incendies ne sera bientôt plus à la hauteur des canicules à venir
Le réchauffement climatique fait plus que jamais son œuvre, n’en déplaise aux sceptiques, qui subissent, comme tout le monde, des étés caniculaires flirtant avec les 40 degrés. Dans les régions boisées, la chaleur et la sécheresse laissent place à des drames, comme des incendies. Si les feux de Gironde, en 2022, avaient tiré la sonnette d’alarme (32 000 hectares de terres brûlées et 27 blessés), les moyens pour lutter contre les flammes semblent toujours restés insuffisants, comme le soulignent nos confrères et consœurs du Parisien. Jadis fierté nationale, les Canadairs affichent aujourd’hui leur limite. Ces avions bombardiers d’eau peinent à faire face à la montée en puissance des incendies. Voici pourquoi ils sont dépassés.
Canadairs : kézako ?
Les Canadairs, ces avions jaunes et rouges devenus emblèmes de la lutte contre les feux de forêt, sont des bombardiers d’eau amphibies capables de puiser 6 000 litres d’eau en quelques secondes, directement à la surface d’un lac ou de la mer. Leur nom vient du constructeur d’origine, Canadair, société canadienne qui a lancé le premier modèle dans les années 1960. Largement adoptés par la France à partir des années 80, ces avions (aujourd’hui des CL‑415) sont conçus pour voler à basse altitude, survoler les flammes et larguer des tonnes d’eau ou de retardant en vol rasant. Grâce à leur précision et leur rapidité d’intervention, ils sont devenus un outil indispensable pour la Sécurité civile, notamment en région méditerranéenne.
Une flotte vieillissante qui montre ses limites
Avec une moyenne d’âge flirtant avec les 30 ans, les CL‑415 français ont largement dépassé l’âge de la retraite. Exposés chaque été à des manœuvres intenses et à des prélèvements d’eau en mer, ces avions subissent une corrosion accélérée. Résultat : une fatigue structurelle grandissante et des risques mécaniques accrus. Si autrefois leur robustesse faisait la fierté de la sécurité civile, aujourd’hui, elle devient un talon d’Achille.
Un soutien industriel en panne
Le constructeur d’origine ayant arrêté la production en 2015, il a fallu attendre une relance industrielle récente pour espérer du renouveau. Mais entre temps, les chaînes de fabrication se sont rouillées et les délais de livraison se sont allongés. Le nouveau modèle CL‑515, censé redonner un coup de jeune à la flotte, n’arrivera pas avant... 2028. Autant dire une éternité face à l’urgence climatique.
Maintenance lente, disponibilité critique
Plus les appareils vieillissent, plus les opérations de maintenance deviennent lourdes. Les pièces détachées se font rares, les réparations prennent du temps, et la moindre panne peut immobiliser un appareil pendant des semaines. Certains jours, seuls quatre avions sur douze sont disponibles. À cela s’ajoutent des tensions chez les prestataires techniques, aggravant la situation.
Des feux plus violents, une capacité trop faible
Face aux méga-feux qui ravagent désormais la végétation en quelques heures, les Canadairs affichent leur limite : 6 000 litres d’eau par rotation, c’est devenu trop peu. Ces feux, attisés par la sécheresse et le vent, demandent une puissance de frappe bien plus grande et des rotations rapides. Mais avec une flotte réduite et vieillissante, l’effort paraît dérisoire.
Une transition lente et insuffisante
Certes, des alternatives sont à l’étude : location d’Air Tractors, renforts de Dash 8... Mais ces solutions ne peuvent écoper seules l’océan de flammes. Ces avions ne peuvent pas récupérer de l'eau en mer et coûtent cher à mobiliser. Côté renouveau, le gouvernement a annoncé l’achat de nouveaux appareils, mais seuls deux CL‑515 sont officiellement commandés à ce jour. Difficile d’imaginer une montée en puissance à court terme.