Du franc à l'euro : comment la monnaie a transformé les paiements, l'épargne et le crédit des Français en 20 ans ?
Vingt ans après le passage du franc à l’euro, les habitudes financières des Français ont connu une transformation spectaculaire.
Pour les plus nostalgiques de l’époque du franc, souvenez-vous : ces gestes du quotidien, aujourd’hui presque disparus, faisaient partie intégrante de notre rapport à l’argent.
La première pièce en euro : le 1er janvier 2002
C’est le 1er janvier 2002 que les Français ont, pour la première fois, tenu entre leurs mains des pièces et des billets en euros, marquant l’arrêt de production du franc. Si l’opération de basculement s’est déroulée sans incident technique majeur, elle a ouvert une nouvelle ère : au-delà de la simple conversion des prix, c’est notre rapport à la consommation et à l’épargne qui s’est transformé.
Vingt ans plus tard, l’impact de la monnaie unique sur le comportement financier des ménages est incontestable : il touche aussi bien les gestes du quotidien que les stratégies d’épargne ou l’accès au crédit.
“Euro” : savez-vous d’où vient ce nom ?
S’il est facile de comprendre le lien affectif entre le franc et les Français, il est un peu plus compliqué de savoir pourquoi la monnaie européenne s’appelle “euro”. Le gouvernement, sur son site Internet, rappelle que les chefs d’État européens se sont réunis le 15 décembre 1995 pour choisir le nom de la future monnaie unique.
Le mot devait être simple, mémorisable, symboliser l’Europe et être identique dans toutes les langues des pays membres. La réponse s’est imposée d’elle-même : l’euro.
Le concours de dessin qui a scellé le destin de la première pièce
Une fois le nom trouvé, restait à déterminer le visuel des pièces. Plutôt que de confier cette tâche à un artiste renommé, le ministre de l’Économie et des Finances lança, le 17 juin 1996, un concours de dessin. Près de 1 200 visuels furent soumis, et 8 dessins furent finalement retenus pour orner les pièces en centimes et en euros.
Les participants n’avaient qu’une seule consigne : faire apparaître les douze étoiles de l’Europe ainsi que la mention “République française”.
Du franc à l’euro : tout ce qui a changé
Comment l’euro, en créant un marché financier unifié, a-t-il modifié le rôle des banques et la perception de la sécurité financière ?
Les Français sont-ils restés attachés à une épargne liquide ou se sont-ils tournés vers des placements plus risqués ? Nous allons revenir, point par point, sur toutes vos habitudes changées par l'euro.
Le chèque : d'instrument favori à quasi-disparition depuis l'euro
À la fin de l'ère du franc, le chèque dominait les paiements . La part du chèque dans les transactions en France en 2000 atteignait environ 34 %, devançant de peu la carte bancaire. Depuis, son usage s'est effondré. En 2007, il représentait encore 3.7 milliards de transaction selon l'Insee. 10 ans plus tard, 1.9 milliards de transactions s'effectuaient en chèque. En 2023, le chèque ne représente plus que 0.9 milliard des transactions.
Par ailleurs, les chèques sont de moins en moins acceptés par les commerçants pour éviter les actes frauduleux et les chèques en bois. Cela a participé au déclin de l'utilisation des chèques.
Carte et espèces : le "cash" dépassé pour la première fois en 20 ans
En 2024, pour la première fois, le nombre de transactions par carte bancaire a supplanté celui des paiements en espèces. Cette comparaison entre l'utilisation de la carte bancaire et des espèces marque un tournant, alors qu'en 2016, le liquide représentait encore plus des deux tiers des paiements selon l'Insee. Cette évolution des habitudes de paiement depuis le passage à l'euro a été fortement accélérée par la généralisation du sans contact et l'essor des paiements mobiles, qui ont doublé pour atteindre 4 % du total des transactions en 2024.
L'épargne : un patrimoine financier qui a explosé depuis le franc
Le patrimoine financier des Français a connu une forte augmentation, passant d’environ 5 000 milliards d’euros en mars 2002 à 6 296 milliards au deuxième trimestre 2024.
Cette croissance vient des habitudes qui changent, notamment la fameuse cachette de l'enveloppe d'épargne sous le lit qui disparaît au profit des comptes épargne. Cela vient aussi des différentes évolutions des plafonds, par exemple ceux du Livret A.
Au 1er janvier 1966, le plafond du Livret A était de 2 286 euros soit 15 000 francs selon Money Vox. Au premier janvier 2013, le plafond de ce même Livret A était de 22 950 euros soit 150 542 francs.
Un moyen d'inciter, depuis le passage à l'euro, à épargner.
Taux d'intérêt : l'euro, moteur de l'accession à la propriété
La création de la zone euro a eu des conséquences profondes sur le portefeuille des ménages. L'impact de la monnaie unique sur le crédit immobilier a été spectaculaire, transformant les conditions d'accès à la propriété. Alors qu'en 2001, le taux moyen d'un prêt sur vingt ans frôlait les 7 %, la politique de taux bas qui a suivi a provoqué une chute historique. Cette dynamique a entraîné une hausse du pouvoir d'achat immobilier en euros de plus de 68 % entre 2001 et 2021, permettant à de nombreux ménages de devenir propriétaires, même si les taux ont récemment remonté.
Le crédit à la consommation
La situation du crédit à la consommation est plus nuancée. Contrairement à l'immobilier, le taux de détention de ce type de prêt par les ménages a atteint un niveau historiquement bas. Cependant, l'encours total est en croissance continue depuis 2015, car les Français empruntent des montants plus importants. Ce phénomène est principalement tiré par le succès du prêt personnel et, surtout, de la Location avec Option d'Achat (LOA) dans le secteur automobile. La France conserve par ailleurs des taux d'intérêt moyens pour ces crédits plus bas que la moyenne de la zone euro.
Confiance dans les banques : la régulation européenne comme gage de sécurité
L'intégration financière européenne a renforcé la résilience du système bancaire français face aux chocs mondiaux, comme la crise financière de 2008. Cette solidité a consolidé la confiance des Français : 72 % d'entre eux déclarent avoir confiance dans leur système bancaire en 2024, contre 59 % en 2016. Des mécanismes comme l'Union bancaire et le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR), qui assure les dépôts jusqu'à 100 000 euros, ont joué un rôle clé. La concurrence accrue au niveau européen a aussi favorisé l'émergence de nouvelles offres, telles que les néobanques.