L'incroyable profil d'un des cambrioleurs du Louvre
L'enquête sur le "casse du siècle" du musée du Louvre a connu une avancée spectaculaire avec l'arrestation d'Abdoulaye N., 39 ans mercredi 29 octobre. Orginaire d'Aubervilliers, cet homme connu des services de police a été mis en examen pour "vol en bande organisée" et "association de malfaiteurs" avant d'être placé en détention provisoire.
Le contraste entre son profil de petit délinquant et les faits commis le dimanche 19 octobre dernier est saisissant : comment une star des rodéos urbains en Seine-Saint-Denis a-t-elle pu se retrouver impliquée dans un acte de grand banditisme visant les joyaux de la Couronne ? Quel est le parcours de celui qu'on surnomme "Doudou Cross Bitume" ou encore "La légende du motocross" ?
Un spécialiste des rodéos au cœur du "casse du siècle"
Abdoulaye N. était jusqu'ici célèbre dans le milieu du "cross bitume", d'où son surnom, notamment grâce aux vidéos de ses exploits qu'il publiait à la fin des années 2000 sur les réseaux sociaux Dailymotion et Youtube. Plus récemment, ses "fans", pouvaient le suivre, visiblement assagi, sur TikTok où il postait ses séances de musculation "urbaine". C'est quelqu'un d'apprécié dans son quartier d'Aubervilliers, ou il est né en janvier 1986 et habitait toujours, rapporte Le Parisien.
Le casier judiciaire d'Abdoulaye N. est lourd de 15 condamnations, mais la plupart sont dues à sa pratique sauvage du motocross. Sa punchline favorite quand il était jeune ? "Proche du bitume." Mais, de simples délits routiers (conduite sans permis, mise en danger d’autrui, délit de fuite, rébellion ou encore refus d’obtempérer quand même...), ce père de famille va entrer petit à petit dans la vraie délinquance.
Toutefois, la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, évoque une "délinquance polymorphe, mais que l'on n'associe pas au spectre de la criminalité organisée". En garde à vue, visiblement "dépassé par les faits" selon une source policière, il les a en partie reconnus et parlé du casse comme d'une commande de la part d'inconnus. Aurait-il été recruté pour son agilité et son aptitude au pilotage ? Il ne serait en tout cas qu'un "maillon d'une chaîne plus complexe."
Un parcours chaotique allant crescendo
De la détention de stupéfiants à 16 ans, il est passé au braquage et cela s'est mal terminé pour lui. Au moment de son interpellation, il était sous contrôle judiciaire pour une tentative vol aggravé avec une voiture-bélier sur un distributeur automatique de billets. Ce braquage, c'était celui d'une bijouterie située... à Barbés, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, bien loin de la joaillerie de luxe des beaux quartiers.
"Un coup bas de gamme", narré par nos confrères : "Le 31 mai 2014, une affaire plus sérieuse va le conduire en prison. Ce matin-là, il aurait fait irruption avec deux autres complices, tous armés de faux fusils d’assaut, dans une bijouterie [...] Ils auraient ensuite pris la fuite à bord de puissants scooters T-Max, maquillés avec des plaques d’immatriculation de voitures." Un scooter T-Max, déjà... "Doudou Cross Bitume" sera condamné à 3 ans en compagnie de Slimane K., qui faisait partie du commando du 19 octobre 10 ans plus tard, et a lui aussi été appréhendé, identifié comme le "troisième membre" du quatuor.
Un casier judiciaire qui devient le talon d'Achille
Malgré l'apparente sophistication du vol, les enquêteurs se sont montrés "déconcertés par le nombre d’indices génétiques laissés [...] sur la scène de crime." Celles appartenant à Abdoulaye N. ont été retrouvées "sur une vitrine fracturée et sur des objets abandonnés au musée". Il est bien l'un des deux hommes à être entrés dans la galerie Apollon par la nacelle. Son ADN étant déjà enregistré dans le Fichier national des empreintes génétiques (FNAEG) en raison de son lourd passif, les enquêteurs de la Brigade de répression du banditisme (BRB) ont rapidement pu l'identifier.
Celui qui a connu une enfance difficile et solitaire, a arrêté l'école en quatrième. Il a bien tenté de s'insérer à plusieurs reprises en travaillant avant le braquage, mais sans le sou et avec plusieurs enfants à charge, a fini par céder. La galère va reprendre à sa sortie de prison, nous apprend Le Parisien : en 2019, il est suspecté de vol par effraction. Après 5 ans de procédure, en 2024, il bénéficie d'un non-lieu : il est totalement innocent. Mais il lui est tout de même reproché d'avoir brisé un miroir à l'époque de sa garde à vue. Sa comparution a eu lieu hier mercredi 5 novembre, pour "simples dégradations". Mais il ne sera pas reparti libre... Les enquêteurs ont encore de nombreuses questions à poser à "Doudou Cross Bitume."