Permis seniors : l’ex-ministre de la Santé propose une visite médicale obligatoire passé un certain âge
C'est un évènement tragique qui relance le débat : en 2024 à La Rochelle, une conductrice âgée de 83 ans roulant à contresens sur une avenue limitée à 30 km/h avait renversé plusieurs enfants à vélo, tuant une fillette de 10 ans. Le 22 juillet dernier, rappelle RTL, la vieille dame a été condamnée à 4 ans de prison avec sursis. Un verdict clément mais compréhensible vu son âge. Toutefois, elle serait restée dans le déni tout au long de son procès, se sentant parfaitement légitime au volant, et a même décidé de faire appel de cette décision... Mais Frédéric Valletoux, ancien ministre de la Santé du gouvernement de Gabriel Attal la même année, n'a pas attendu pour alerter l'Assemblée sur le sujet délicat de la conduite à un âge avancé... mais pas que.
Vers la mise en place d'un "permis seniors" ?
En réalité, non. La proposition de loi de Frédéric Valletoux à l'Assemblée, concernerait tous les conducteurs : ils seraient tous soumis à l'avenir à une visite médicale obligatoire pour conserver leur précieux sésame. Car stigmatiser les plus âgés, qui sont la population la moins concernée statistiquement par les accidents de la route, est une mesure controversée depuis qu'elle est envisagée. Aussi, pour qu'elle soit acceptée par le plus grand nombre possible, élus comme électeurs , celui qui est aujourd'hui député Horizons, le parti d'Edouard Philippe, a prévu de ne pas la limiter aux seniors. "C'est une mesure de bon sens" a-t-il déclaré la semaine dernière.
La fréquence des visite médicales différente selon l'âge
En revanche, il y aurait bien une différence de traitement entre les conducteurs selon leur âge : Frédéric Valletoux propose dans son texte d'imposer une visite médicale de contrôle tous les 15 ans à partir de la date d'obtention du permis (rappelons qu'il doit déjà "administrativement" être renouvelé à cette fréquence), puis tous les 5 ans à partir de 70 ans. "Quel que soit l'âge, on peut perdre l'aptitude à conduire", s'est-il justifié au micro de nos confrères. Puis il a affirmé que "stigmatiser une génération" n'était pas le but de la proposition de loi qu'il veut porter.
Harmoniser la réglementation avec d'autres pays européens
La visite médicale obligatoire à 70 ans est déjà en vigueur pour les conducteurs au Danemark, en Finlande et en Italie, à 75 ans aux Pays-Bas. D'autres pays comme l'Espagne, la Grèce ou la République Tchèque abaissent même cette jauge à 65 ans. En Hongrie, en Lituanie et en Lettonie, la visite médicale tous les 15 ans est la norme. Aussi, pour Frédéric Valletoux, il est faut "aligner la France au régime que connaissent plein de pays : dès l'obtention du permis de conduire, faire le lien entre les capacités à conduire et l'aptitude à conduire par le biais d'une visite médicale."
Des visites médicale chez des médecins agréées
Pour éviter toute tentation de fraude, dans un pays ou entre 800 000 et 1 millions de personnes conduiraient sans permis au quotidien, la visite médicale se ferait chez un médecin agréé, comme le demande l'Ordre de la profession, rappelle RTL. Celui-ci réaliserait des tests "Pour voir qu'au niveau des réflexes, de la compréhension, de l'environnement dans lequel on est, on a gardé toutes les capacités à conduire. Il validerait que la personne est apte à conduire ou, au contraire, tirerait la conclusion, avec elle, que ce n'est plus possible."
Une nouvelle usine à gaz pour un système de santé à la peine ?
La mesure ne serait pleinement appliquée que d'ici 2032. Car, entre déserts médicaux et salles d'attentes pleines, quand il est possible d'obtenir un rendez-vous même chez un généraliste, elle demanderait de dégager des créneaux rapidement. En effet, sans l'accord d'un professionnel de santé, il serait impossible pour un conducteur même en possession d'un permis valide de reprendre le volant. Une usine à gaz ? Pas pour Frédéric Valletoux : "On ne va pas demander du jour au lendemain à des millions de personnes de faire ce type de visite médicale. Mais le temps que les choses s'installent, dans le temps, je pense qu'on aura assez de médecins."
La mesure sera-t-elle acceptée par les automobilistes ?
Les automobilistes, motards et les autres sont déjà submergés par les démarches et frais inhérents à leurs véhicules. Mais la contestation populaire n'inquiète pas non plus le député Horizons : "On sait qu'à chaque fois qu'on a pris des mesures pour renforcer la sécurité routière, on s'est heurté à des résistances. Mais la liberté ne doit pas s'organiser au détriment de la sécurité." Et conclut par un argument imparable : "Les personnes qui ne sont plus aptes à conduire et qui, malgré tout, prennent le volant, se mettent en danger [physiquement et pénalement]. Et elles mettent potentiellement en danger les gens qu'elles croisent sur leur route."