Menaces de mort à la maternelle : un père exige que l'enseignant de sa fille soit une femme

Publié par Matthieu Chauvin
le 21/11/2025
école maternelle
Istock
A Rennes, un directeur d’école maternelle a été menacé de mort par un parent d’élève qui refusait que sa fille soit dans la classe d'un enseignant masculin, en l'occurrence le directeur lui-même. Le motif ne serait pas religieux, mais "personnel." L'incident, survenu le 10 octobre, ne fait parler de lui qu'aujourd'hui, sous l'impulsion des syndicats.

Le 10 octobre dernier à Rennes, un conflit a éclaté lorsque le père d’une élève, scolarisée à l'école maternelle publique Clôteaux, a exigé que sa fille soit changée de classe pour bénéficier d'un "encadrement strictement féminin". Face à lui, le directeur de l'école, unique enseignant homme de l'équipe, a opposé un refus ferme, "au nom des règles de l'établissement et du respect des valeurs de la République"

Selon le témoignage de l'équipe éducative, le père de la fillette aurait alors proféré de "graves menaces, accompagnées de propos relevant de l'outrage sexiste, de la diffamation et du mépris". Il aurait ajouté ne pas craindre de "faire de la prison" pour obtenir gain de cause. En état de choc, le directeur est depuis en arrêt maladie. Il a déposé plainte le 14 octobre, et le rectorat a fait de même tout en convoquant la famille et déclarant "que l’autorité éducative ne cède à aucune forme de pression."  Le personnel de l'école est en grève ce vendredi 21 novembre, ainsi que celui de deux autres établissement rennais qui veulent marquer leur soutien.

Le motif ne serait pas "religieux" mais "personnel"

Face à cette situation, la ligne de l’Éducation nationale est claire. Le ministre Édouard Geffray a publiquement rappelé que "l'école, ce n'est pas le supermarché des revendications individuelles [...] donc, quand on confie son enfant à l'école, on confie son enfant à une institution qui accueille tous les enfants et qui est la même pour tous. Et donc, on ne peut pas commencer à dire, moi je veux ceci, moi je veux cela, moi je choisis mon professeur, moi je choisis les aides avec qui mon enfant va être "

Il a par ailleurs précisé que le motif invoqué par la famille n'était pas "religieux" comme l'a lui-même rapporté le directeur menacé, mais "personnel" : "les parents refusent qu'un homme accompagne leur petite fille aux toilettes, avançant que seule une Atsem y est autorisée, et prétextent des risques de pédophilie" révèle TF1.

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A nos confrères, Fabrice Lerestif, secrétaire général de l'union départementale FO, a donné des précisions sur l'état dans lequel se trouve le directeur, mais aussi ses collègues : "Il est en grande souffrance et l'équipe s'est dit, et je pense légitimement, qu'il faut aussi alerter sur tout ce qui peut se passer, sur ce fait grave quand même, qui n'est pas anodin et qui est significatif de certaines dérives." 

La protection fonctionnelle accordée au directeur

Immédiatement après l'agression, le directeur a bénéficié de la "protection fonctionnelle". Ce dispositif, inscrit dans l'article L134-5 du Code général de la fonction publique, est une obligation légale pour l'administration. Elle doit protéger ses agents (enseignants, directeurs, etc.) contre les "menaces, injures, diffamations ou violences" subies dans l'exercice de leurs fonctions.

Concrètement, la protection fonctionnelle pour les enseignants menacés se traduit par une assistance juridique et la prise en charge par l'administration de l'ensemble des frais de justice engagés par l'agent pour sa défense. Ce n'est pas un mécanisme anecdotique : en 2021, 2 940 demandes de ce type ont été accordées à des agents du ministère de l'Éducation nationale, dont une très large majorité (85,7 %) concernait des atteintes volontaires à l'intégrité de la personne*

L'équipe éducative de Rennes exige désormais des sanctions claires et le transfert de l'enfant dans un autre établissement, estimant le lien de confiance définitivement rompu et dénonçant une "discrimination sexiste inacceptable."

*Sources : Le café pédagogique, SNUipp-FSU 40

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