Retraite : pourquoi l’écart persiste entre les femmes et les hommes ?

Publié par Matthieu Chauvin
le 03/11/2025
4 minutes
couple fâché
Istock
En 2023, après avoir fait passer la réforme des retraites en force grâce au 49.3, Elisabeth Borne avait demandé aux organismes compétents de travailler sur un sujet qui dure depuis trop longtemps : l'écart important qui persiste entre les hommes et les femmes, alors que celui entre les salaires diminue. Malgré la situation politique depuis lors, ces organismes n'ont pas chômé et des avancées pourraient changer la donne, même si la suspension de la réforme est validée.
 

La suspension de la réforme des retraites, comme nous vous le rapportions récemment, ne tient qu'à un fil. Elle peut toujours être retoquée par le Sénat, être censurée en même temps que le budget 2026 si l'Assemblée le décide, ou au mieux durer jusqu'aux élections législatives qui se dérouleront après la présidentielle de 2027

Il y a en réalité peu de chances que l'âge légal de départ, qu'elle fige à 62 ans et 9 mois, tienne bien longtemps... Mais en attendant, la suspension n'empêche pas les modifications, comme cela sera sans doute le cas pour le volet "droits conjugaux et familiaux", dont est issue la pension de réversion. Celle-ci pourrait être à l'avenir bien plus avantageuse pour les femmes. 

Pourquoi un tel écart entre les hommes et des femmes ?

L'écart qui subsiste entre leurs pensions moyennes et celles des hommes est de plus en plus un sujet de crispation. Car il reste énorme, selon le rapport de la Drees (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, qui dépendu du ministère de la santé, publié le 31 juillet dernier et intitulé "Les retraités et les retraites."

En 2023, la pension de retraite moyenne brute des femmes françaises était de 1 306 euros contre 2 089 euros pour les hommes. Soit - 37 % ! Le Figaro rappelle que cela tient tant aux parcours professionnels le plus souvent spécifiques des premières ("temps partiel plus fréquent, interruptions de carrière, sous-représentation des femmes dans les métiers les mieux rémunérés…") qu'aux différences de salaires toujours pratiquées dans les entreprises, bien qu'elles se réduisent. D'après l'Insee, elles sont toujours en défaveur des femmes à hauteur de 22,2 % (il était encore de 30 % il y a peu), mais à temps de travail égal, ce chiffre tombe aujourd'hui à 14,2 %, "en baisse d’un tiers" par rapport à 1995.

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L'égalité ou presque : pas avant 35 ans au moins !

Bien évidemment, il est logique de retrouver ces différences sur les pensions. Nos confrères révèlent toutefois que là aussi, l'écart diminue depuis le début du siècle. Mais en 2023, il était toujours de 28 % par rapport à 2022, une baisse de seulement 1 point en un an... Cela va continuer. Aussi l'information suivante doit-elle être interprétée comme une bonne nouvelle ? "

A l’horizon 2060, les pensions des femmes devraient représenter 97 % de celles des hommes, d’après le dernier rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR)." Autant dire "pas demain la veille..." Sans ironie de la part du Figaro, la raison de ce "rapproché" serait "l'amélioration régulière des carrières féminines au fil des générations." Car c'est malheureusement factuel, malgré le temps que cela prend.

Ce qui pourrait accélérer l'augmentation des pensions des femmes

Le quotidien rappelle que dans les années 1970, des dispositifs ont été mis en place "pour compenser l’incidence de la maternité et de l’éducation sur leur carrière professionnelle : assurance-vieillesse des parents au foyer, majoration de durée d’assurance pour enfants..." Le COR affirme que "pour la génération 1950, les femmes ont une durée d’assurance cotisée inférieure de 22 % à celle des hommes, mais leur durée d’assurance validée n’est inférieure que de 5 %. Cet écart pourrait même s’inverser à l’avenir : la durée d’assurance validée par les femmes devrait dépasser celle des hommes pour les générations nées après 1955."

Le Figaro conclut : "En clair, ce sont les avantages liés aux enfants, en particulier les trimestres accordés au titre de l’assurance-vieillesse des parents au foyer et de la majoration de durée d’assurance pour enfants qui permettent de réduire l’écart de durée d’assurance – et donc, au final, le montant de pension."

Les dispositifs de compensation ne suffisent plus 

Pour l'heure, ces avantages peuvent se résumer ainsi : 

  • sous certaines conditions, les parents – principalement les mères – qui interrompent ou réduisent leur activité professionnelle pour s’occuper d’un enfant de moins de 3 ans peuvent continuer à valider des trimestres pendant ces périodes grâce à "l’assurance-vieillesse des parents au foyer". Ces trimestres sont reportés au fil de l’eau sur le relevé de carrière ;
  • les parents de trois enfants et plus – les pères comme les mères profitent d’une majoration de leurs pensions de retraite de 10 % dans la quasi-totalité des régimes (base et complémentaire).

 

Mais en 2023, comme nous vous l'expliquions, Elisabeth Borne a demandé au COR d'étudier des pistes pour améliorer ces avantages, qui paradoxalement restent toujours pénalisants pour les femmes. Aussi, l'organisme a fait de récentes propositions qui seront, ou non adoptés, par les députés dans le cadre du plan de financement de la Sécurité sociale : retrouvez-les dans notre article dédié.

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