Bien avant Xavier Dupont de Ligonnès, ces hommes aussi ont massacré toute leur famille

Publié par Eléonore Bounhiol le 3/05/2023
Maj par Eléonore Bounhiol le
9 minutes
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Bien avant le quintuple meurtre de Nantes qui a bouleversé la France entière, d’autres pères, maris, ou fils se sont octroyés le « droit » de supprimer leur famille entière.

C’est un dossier hors norme qui fascine depuis maintenant plus de 10 ans : l’affaire Dupont de Ligonnès. En avril 2011, les corps d’Agnès, Arthur, Thomas, Anne et Benoît de Ligonnès sont retrouvés, enterrés dans le jardin de leur maison familiale à Nantes. Jusqu'à ce jour, le père de famille, Xavier Dupont de Ligonnès, demeure introuvable. Et son crime continue d’interroger, de choquer et d’être alimenté par les théories les plus folles.

Car dans l’opinion publique, cette question demeure sans réponse : comment un homme peut-il décider de supprimer sa famille entière, de sang-froid ?

Xavier Dupont de Ligonnès ne serait pourtant pas le premier homme à s'être rendu coupable d'une atroce tuerie familiale. Dans l’histoire, de nombreuses affaires ressemblent d’ailleurs, de près ou de loin, au drame de Nantes.

Endettement, jalousie, et troubles psy

En novembre 1971, John Emil List, un américain de 46 ans, va faire la une des journaux Outre-Atlantique. Après avoir abattu froidement ses trois enfants, sa mère, et sa femme, il a tout simplement disparu des radars. Plus d’un mois s’écoule avant que le monde ne découvre même le quintuple meurtre, car John List a tout préparé dans les moindres détails pour échapper à la justice. Pendant les 18 années qui suivront, il va même refaire sa vie, comme si de rien n’était, avant d’être interpellé en Virginie, où il finira par être reconnu par les téléspectateurs d’une émission à son sujet.

Mais en France aussi, des hommes ont massacré leur famille entière, certains échappant même à la justice. Dans ces « maisons de l’horreur », souvent, on retrouve d’ailleurs les mêmes ingrédients : endettement, jalousie, et troubles psychiatriques.

Découvrez ces 7 tueries familiales tragiques qui ont marqué le territoire français.

L’aristocrate déchu

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Le 8 décembre 2010, Estelle, une mère de famille et ses deux enfants Edouard, 18 ans, et Charlotte, 20 ans, sont retrouvés sans vie dans leur appartement cossu de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine). Le père, François, 57 ans, est entre la vie et la mort. Evacué à l’hôpital, il est plongé dans le coma.

L’autopsie va révéler que les quatre membres de la famille ont absorbé une quantité hallucinante de médicaments.

Sur place, les enquêteurs découvrent deux lettres manuscrites, signées par les parents. Ils y évoquent leur souhait d’en finir, et de « prendre les enfants avec eux », car ils ne peuvent se résoudre à les laisser.

Au bord de la faillite

L’enquête révèle très vite que le couple était en proie à des difficultés financières importantes. Les deux époux ne travaillaient pas, vivant sur les rentes de la famille de François, avant de se retrouver à court de liquidités. Estelle souffrait par ailleurs de dépression, notamment en raison de l’autisme de son fils Edouard. Elle avait déjà tenté de s’ôter la vie à plusieurs reprises.

Mais pour les enquêteurs, cette affaire n’a rien d’un suicide collectif. Les enfants, qui n’avaient jamais fait mention d’envies suicidaires à leur entourage, auraient été empoisonnés à leur insu.  Surtout, le père, François, aurait absorbé le cocktail terrible de médicaments des heures après leur décès et celui de sa femme. Il est d’ailleurs le seul à y avoir survécu.

Quelques jours après le drame, il sort du coma. Il est mis en examen pour « empoisonnement », « empoisonnement sur personne vulnérable » et «provocation au suicide ».

Les pilules de l’horreur

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Le 30 mai 2010, à Pouzagues, une commune de Vendée, six corps inertes sont retrouvés dans un pavillon familial. Il s’agit de ceux d’Emmanuel Bécaud, un médecin de 34 ans, de sa femme de 35 ans, Sylvie et de leurs quatre enfants, âgés de 3 à 9 ans.

Le père de famille s’est pendu. Sylvie a été véritablement massacrée à coups de couteau. Et les enfants, tués d’un coup de bûche sur la tête.

Un médicament responsable du coup de folie ?

Dans l’entourage de la famille, des témoins assurent qu’Emmanuel Bécaud était en proie à une grande fatigue ces derniers jours. Au fil de leurs recherches, les enquêteurs vont finir par soupçonner… un antidépresseur d’être responsable du « coup de folie » du médecin. Car rien dans le parcours ou le profil du trentenaire ne laissait à penser qu’il aurait pu en arriver là. Surmené et sous pression au travail, Emmanuel Bécaud était en effet sous traitement de sertaline, un médicament déjà soupçonné par le passé d’avoir des effets secondaires dévastateurs et de provoquer des accès de violence chez les patients.

Mais en raison du décès d’Emmanuel Bécaud, l’affaire ne sera jamais jugée.

L’adolescent meurtrier

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C’était un adolescent « comme les autres », et même un garçon « proche de sa famille » et « épanoui », selon son entourage.

Pourtant, le 12 août 2009, dans un village de Haute-Corse, Andy Fromageau, 15 ans, va s’emparer du fusil de chasse familial et abattre froidement en pleine nuit ses parents et ses deux frères jumeaux de 10 ans. Il envoie ensuite un SMS à un ami : « Au secours, il y a quelqu’un chez moi ».

Jugé irresponsable

Les enquêteurs découvrent rapidement qu’il n’en est rien, et que c’est bien Andy qui est l’auteur de la tuerie. Mais l’ado n’explique pas son geste. Certains psychiatres estiment que son discernement était aboli au moment du drame, notamment en raison d’une tumeur bénigne, décelée dans son cerveau quelques mois avant le drame. Si l’infection ne nécessitait pas d’opération, elle aurait pu altérer l’état psychique du garçon cette nuit-là.

Au terme de deux procès, il est finalement jugé irresponsable du quadruple meurtre. Mais il est interdit de séjourner en Corse pour 20 ans, et doit retourner au sein d’une unité de soins spécialisée.

Le quintuple meurtre de La Magdelaine

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Jeudi 10 juillet 2008, à17h57, les pompiers reçoivent l'appel désespéré d'une jeune femme, mais la communication est rapidement coupée. Vers 18 heures, ils ont localisé l'appel et découvrent, à La Magdelaine-sur-Tarn (31), dans la demeure familiale des Vacquier, quatre corps. Ceux de deux frères, Bernard, 51 ans, et Jacques, 47 ans ainsi que leurs deux neveux, Grégory, 26 ans, et Benjamin, 25 ans. Marion, 20 ans, la copine de Grégory, qui a donné l'alerte, meurt peu après.

Seul membre de la fratrie qui manque à l’appel : Jean-Claude Vacquier, 55 ans, le frère de Bernard et Jacques, et le père de Benjamin et Grégory. Dépressif et violent, il avait menacé sa femme quelques jours auparavant de « tuer tout le monde » si celle-ci le quittait. Ce soir-là, Jean-Claude aurait d'abord tué ses frères avant d'attendre, patiemment, ses deux fils, et d'achever Marion de six balles dont deux dans la tête. Pour les forces de l'ordre, il devient impératif d'arrêter le père de famille avant qu'il ne fasse d'autres victimes.

Obsédé par son ex-femme

Les gendarmes mettent alors en place un dispositif hors norme afin de retrouver le fugitif, et un appel à témoins est diffusé dans toute la France. Les recherches s'étendent jusque dans l'Hérault, où le suspect est susceptible de se rendre. Car l'obsession de cet ancien cuisinier, en instance de divorce, c’est bel et bien sa femme, Isabelle, qui habite Béziers. Une femme à qui il aurait fait subir des violences répétées et surtout un viol atroce.

Samedi 12 juillet, vers 21 heures. Jean-Claude Vacquier appelle sa femme. Son portable est alors localisé à La Magdelaine, dans la maison familiale. A 23h50, il sort et, devant les gendarmes, se tire une balle dans la tête. Son suicide met fin à l’action publique contre lui. Jean-Claude Vacquier ne sera donc jamais jugé pour ce quintuple meurtre familial.

Jalousie meurtrière

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Le 4 janvier 2002, à Pisieu, dans l’Isère, Philippe Perret, un employé de France Télécoms âgé de 40 ans, s’empare d’une carabine et tue sa femme, qui était en train de balayer dans la cuisine, avant d’exécuter froidement ses filles de 3 et 5 ans, et son bébé de quelques jours, dans son landau. Il se donne ensuite la mort.

Cinq jours plus tôt, sa femme, Dedge, avait accouché d’un petit Nicolas. Maman et bébé venaient seulement de rentrer de la maternité.

Paranoïaque

La mère de famille, âgée de 26 ans, avait rencontré Philippe Perret quelques temps plus tôt, et avait décidé de quitter son Brésil natal avec ses deux filles de 3 et 5 ans pour venir vivre avec lui. Dans l’entourage de cette famille « sans histoires », personne ne comprend l’horrible geste du père. Selon leurs proches, le couple se réjouissait de la naissance du petit garçon.

Mais en réalité, Philippe Perret était terrifié à l’idée que sa femme le quitte pour retourner au Brésil. Le quadragénaire était également jaloux, voire paranoïaque, doutant de la fidélité de sa jeune femme et même de sa paternité.

Le mystère Godard

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Le 1er septembre 1999, le docteur Yves Godard disparaît avec ses deux enfants de 4 et 6 ans au large de Saint-Malo.

Le père de famille avait initialement loué un voilier pour une croisière de cinq jours, dont personne ne reviendra.

Marie-France, la femme d’Yves Godard, n'était pas du voyage, mais elle a disparu. Du sang lui appartenant est retrouvé au domicile familial de Tilly-sur-Seulles, dans le Calvados. Pour les enquêteurs, le docteur aurait tué son épouse avant de s’enfuir avec les enfants.

Le ménage était criblé de dettes.

Où est passée la famille ?

Dans les années qui suivent, plusieurs éléments sont repéchés au hasard, ou retrouvés échoués sur des plages bretonnes, notamment des ossements appartenant à Yves Godard, ainsi que le crâne de l’une de ses filles.

Un temps, l’on pense que le docteur s’est enfui à l’étranger et a refait sa vie. De nombreuses personnes affirmeront l’avoir ainsi aperçu en Ecosse, en Afrique du Sud ou encore à Miami.

Certains penchent encore pour la thèse d’un meurtre crapuleux, voire mafieux, en lien avec la Confédération de défense des commerçants et artisans (CDCA), dont Yves Godard était un membre actif.

Mais faute d’éléments, la justice ordonne un non-lieu dans cette affaire en septembre 2012.

L’adversaire Romand

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C’est la tuerie familiale la plus célèbre avec l’affaire Dupont de Ligonnès. Certains pensent même que le fugitif de Nantes se serait inspiré du crime de Jean-Claude Romand, qui s’est déroulé des années plus tôt.

Pendant près de 20 ans, Jean-Claude Romand se fait passer auprès de famille et amis pour un éminent médecin chercheur à l’Organisation Mondiale de la Santé. Il vit en contractant divers prêts et en soutirant de l’argent à ses proches.

Mais le 9 janvier 1993, acculé par ses dettes et sur le point d’être démasqué, il tue sa femme en lui assénant un coup de rouleau à pâtisserie, avant d’abattre ses deux enfants à la carabine. Le lendemain, il se rend chez ses parents pour déjeuner et leur tire mortellement dessus, avant de tuer par la même occasion leur labrador.

Un manipulateur hors-pair

Jean-Claude Romand n’en a pourtant pas terminé. Il décide de se rendre à Paris pour voir sa maîtresse, qu’il va également tenter de supprimer en l’aspergeant de gaz lacrymogène et en l’étranglant. Elle parviendra toutefois à le stopper, en lui promettant de ne rien dire. Romand rentre alors chez lui, au Prévessin-Moëns, près de la frontière Suisse, et mets le feu à la maison familiale. A l’arrivée des pompiers, il est retrouvé inconscient, mais survit. Il parle alors d’un « accident ». Mais les enquêteurs ne sont pas dupes.

En 1996, Jean-Claude Romand, décrit par les experts psychiatres comme un manipulateur hors-pair est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Il purge toujours sa peine à la maison centrale de Saint-Maur (Indre). En 2019, il obtient une libération conditionnelle et vivrait depuis dans un monastère.

L’histoire de son mensonge et de ses crimes a inspiré de nombreuses fictions, et a été le sujet du livre L’adversaire d’Emmanuel Carrère, pour lequel l’écrivain a rencontré à plusieurs reprises le « faux médecin ».

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