Menus scolaires : le match nutritionnel entre les années 80 et aujourd'hui
C'est un refrain que l'on entend souvent lors des repas de famille : « De mon temps, au moins, on mangeait de vrais produits à l'école ! ». Pourtant, si l'on gratte sous la croûte dorée du souvenir, la réalité diététique est bien moins glorieuse que notre mémoire affective ne le laisse croire. Entre les mythes du fait-maison et l'arrivée massive de l'industrie agroalimentaire, l'histoire de la restauration scolaire réserve quelques surprises indigestes.
Faut-il vraiment regretter l'époque du steak haché baignant dans son jus ? Pas si sûr. Suivez le guide pour une analyse sans concession de l'évolution de nos plateaux-repas.
Le mythe du "bon vieux temps" résiste-t-il à l'analyse ?
Si l'on évoque les menus scolaires des années 80, la purée Mousline et la chipolata arrivent souvent en tête des souvenirs marquants, juste à côté du fameux gâteau de riz. Nous avons tendance à idéaliser cette période comme étant celle du "tout cuisiné sur place". C'est oublier un peu vite que c'était aussi la porte d'entrée massive des premiers produits industriels : raviolis en boîte, poissons panés carrés et flocons de pomme de terre déshydratés cohabitaient joyeusement avec les plats traditionnels.
Ce mélange des genres explique pourquoi les plats des années 80 semblaient plus sains dans l'imaginaire collectif : ils conservaient une apparence rustique. Pourtant, la vigilance ne date pas d'hier. Si la circulaire de 1971 craignait encore les carences, la création du GEMT en 1978 marque un véritable tournant institutionnel. Dès lors, les préoccupations évoluent pour dénoncer des déséquilibres plus globaux, où la qualité nutritionnelle finit souvent sacrifiée sur l'autel de l'équilibre budgétaire.
Gras ou transformé : quel est le pire ennemi ?
Si l'on ose une comparaison nutritionnelle entre le repas de cantine de 1980 et aujourd'hui, le constat est sans appel. Le modèle d'il y a quarante ans était centré sur l'apport calorique brut. La diabolisation du gras n'avait pas encore atteint les cuisines scolaires, et les carences en micronutriments (vitamines, fer) étaient fréquentes. Une circulaire de 1971 s'inquiétait même des risques d'insuffisance calorique. À l'inverse, l'époque moderne, marquée par la fin de l'alcool à table (définitivement actée en 1981) et l'essor des cuisines centrales, a standardisé les apports.
Depuis le début des années 2000, avec le PNNS et l'arrêté de 2011, l'assiette s'est indéniablement équilibrée : plus de fruits, plus de légumes, moins de lipides. Cependant, une préoccupation majeure a émergé : la place des aliments ultra-transformés à la cantine scolaire. Si cette notion (classification NOVA) n'est pas directement visée par les textes réglementaires, elle est au cœur des débats de santé publique portés par les associations. Les lois actuelles agissent plutôt sur la qualité des produits et l'équilibre nutritionnel, ce qui tend à limiter indirectement ces transformations industrielles, un défi inconnu de la cuisinière des années 70 qui avait simplement la main lourde sur le beurre.
Comment la loi EGALIM change-t-elle la donne ?
Pour sortir de ce dilemme entre le "traditionnel gras" d'hier et le "sain industriel" d'aujourd'hui, les pouvoirs publics ont serré la vis. C'est tout l'enjeu de la règlementation de la cantine scolaire et de la loi EGALIM, dont les effets continuent de se déployer en 2024. L'objectif est clair : imposer une montée en gamme avec des produits sous signes de qualité (Bio, Label Rouge) et réduire la part des protéines animales au profit de repas végétariens hebdomadaires.
Lorsque l'on fait le point sur les nutriments et la qualité des ingrédients de la cantine actuelle, on s'aperçoit que la diversité est bien meilleure qu'autrefois. Selon le Cerin, les déjeuners scolaires couvrent mieux les besoins en vitamines et minéraux que les repas pris à l'extérieur. Pour les parents, le combat se situe désormais sur la surveillance des menus et le soutien aux initiatives locales, seules garantes d'un retour au goût véritable sans renoncer à la sécurité sanitaire. Il est loin le temps où l'on devait analyser la composition des repas des écoliers en 1970 pour y déceler des traces de légumes frais !