Disparition de Maëlys : pourquoi le dispositif de recherche a-t-il été réduit ?abacapress
Deux semaines après la disparition de Maëlys, toujours aucune trace de la fillette. Les autorités ont décidé de se concentrer sur l'enquête judiciaire. Jean-Marc Bloch ancien directeur de la SRPJ, a accepté de répondre aux questions de Planet.

Dans l’affaire Maëlys, 9 ans, disparue il y a près de deux semaines dans l'Isère, les autorités ont annoncé avoir réduit le dispositif de recherche pour se concentrer sur l’enquête judiciaire, qui a vu la mise en examen d’un suspect. Jean-Marc Bloch est l’ancien directeur de la SRPJ de Versailles, il a également enquêté sur la disparition d’Estelle Mouzin. Pour Planet, il explique ce qui peut motiver ce genre de décision dans le cadre d'une enquête comme celle-ci. 

Planet : Qu’est-ce que ça veut dire de réduire le dispositif de recherche, et comment prend-t-on ce genre de décision ?

Jean-Marc Bloch : Ça veut dire que ça fait simplement un certain temps qui s’est écoulé depuis le début de l’enquête, que les chances de retrouver cette enfant vivante, diminuent. L’urgence dans un premier temps c’est de bénéficier de beaucoup d’effectifs sur le terrain, de faire des recherches matérielles pour retrouver cette enfant vivante. Le temps s’écoulant, c’est évident qu’il y a de moins en moins de chance de la retrouver vivante et que le dispositif sur le terrain a déjà fouillé un tas d’espaces et n’a rien trouvé. Tant que le suspect n’a pas donné d’indications supplémentaires, les recherches se font un peu à l’aveugle

L’objectif maintenant, c’est d’obtenir plus de choses par la police technique et scientifique et des diverses investigations. C’est plus dans l’enquête qu’on risque de trouver quelque chose.

Planet : Par quels moyens par exemple ?

Jean-Marc Bloch : Il faut espérer que les moyens d’enquête classiques, la téléphonie, d’éventuels témoignages et pourquoi pas des aveux puissent conduire les enquêteurs vers un élément. Mais c’est évident que l’auteur n'a pas du tout intérêt à révéler où se trouve le corps parce que s’il porte des griffures par exemple, et il semblerait que le suspect actuel ait des traces de griffures [ndrl : il a expliqué avoir faire du jardinage], on risque de retrouver sous les ongles de la petites des traces d’ADN qui pourraient le confondre. Son intérêt c’est de rester muet.

Planet : Quels sont les éléments déterminants dans une enquête comme celle-ci ?

Jean-Marc Bloch : Pour les enquêteurs, la découverte du corps, c’est quelque chose d’essentiel. Dans une affaire criminelle, il y a deux personnes qui savent ce qu’il s’est passé. Il y a l’auteur et la victime. Si l’auteur n’est pas identifié ou qu'il ne dit rien, il n’y a que la victime qui dira quelque chose, pas forcément verbalement mais par toutes les constatations qu’on fera sur le corps. Grâce à tous les examens médico-légaux.

Dans un premier temps, on peut penser qu’elle est séquestrée, mais plus le temps passe, plus on cherche un corps parce que ça permettra d’incriminer l’auteur, de trouver des preuves. Ce n’est pas le cas actuellement. Et c’est pour cela qu’ils se rencontrent sur l’enquête judiciaire.

Planet : Un principal suspect mis en examen, est-ce que ce n’est pas dangereux de se concentrer uniquement sur lui ?

Jean-Marc Bloch : Il semblerait jusqu’à présent qu’il n’y ait qu’un suspect, et dans ce genre d’affaire il y a rarement des complicités. C’est plutôt le fait d’un homme seul ou d’une femme seule. Et à chaque fois toutes les orientations d’enquête se dirigent vers ce suspect et pas vers quelqu’un d’autre, aussi bien les témoignages de la mère, que les gens présents à cette soirée, tous les faisceaux s’orientent vers lui.

A chaque fois quand on lui sort une preuve, une carte, il dit ‘’ah oui j’avais oublié la petite est effectivement montée dans ma voiture, j’ai des griffures parce que j’ai jardiné. Etc.’’ A chaque fois que les gendarmes soulèvent un problème, il trouve une réponse, il trouve une explication à tout ce qu’on lui met sous le nez, à tous les éléments, tous les faisceaux d’indices.

Planet : Ça fait près de deux semaines que Maëlys a disparu. On continue d’explorer le lac d’Aiguebelette, les recherches se poursuivent même en dispositif réduit, on interroge le suspect, pourtant, aucune trace de la fillette. Est-ce qu’il y a d’autres pistes que les autorités peuvent explorer ?

Jean-Marc Bloch : Dans ce genre de situation, toutes les hypothèses sont envisagées. Dès le départ, on envisage la fugue, l’accident, l’enlèvement. La fugue, ça semble complètement exclu. Dans le cas de l’accident, on voit mal cette enfant de 9 ans sortir se balader de nuit dans la nature, c’est peu probable et toutes les recherches ont été faites. Et là l’hypothèse de l’enlèvement est clairement privilégiée.

Planet : D’après votre expérience, y a-t-il une chance qu’on retrouve Maëlys vivante ?

Jean-Marc Bloch : Il y a très peu de chances. Il y a toujours une petite chance bien sûr, et puis les enquêteurs cherchent toujours quelqu’un de vivant, mais si vous voulez on le sait : toutes les expériences passées prouvent que ce sont les premières heures qui sont absolument décisives si l’enfant a été réellement enlevée. Si elle n’est pas retrouvée très rapidement, il y a peu de chances qu’on la retrouve en vie. C’est une hypothèse, quand on a affaire à un prédateur sexuel, la victime devient un témoin gênant, surtout que là, la victime a 9 ans et peut parfaitement décrire l’auteur des sévices, ce qu’il s’est passé. Donc pour l’auteur, j’imagine que la meilleure solution, c’est de se débarrasser de la victime.