Le rapport annuel du Conseil d'orientation des retraites vient d'être publié. Et il invite les retraités à se préparer à la baisse de leur niveau de vie. Explications.
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Les retraités ont-ils profité trop longtemps ? En France, ils ont longtemps bénéficié d'un niveau de vie statistiquement supérieur à celui du reste de la population. Tout a commencé dans les années 1970, indique le Conseil d'orientation des retraites (COR), qui publiait son nouveau rapport annuel ce jeudi 26 novembre 2020, date à partir de laquelle le décrochage des actifs devient évident. L'écart entre ces deux catégories de Français s'est creusé jusqu'en 1996, à la suite de multiples réformes plus favorables aux retraités qu'aux autres, ainsi que l'a déjà expliqué Planet. Mais tout est sur le point de changer, poursuit le Cor.

Le niveau de vie des retraités est sur le point de chuter. Au moins comparativement à celui des actifs…

Le phénomène sera long, assure l'organisme, mais la bascule ne fait désormais plus aucun doute. Les retraités ont tout intérêt à jouir de cette fin d'année 2020, car elle compte théoriquement parmi les dernières avant l'inversement de la tendance, estime le rapport. Dans l'immédiat, ils profitent encore d'un niveau de vie équivalent à 104% celui du reste des contribuables, du fait d'une progression de l'inflation plus rapide que celle des salaires moyens. Tout cela devrait changer d'ici la moitié des années 2020, note Capital, qui reprend les informations du Cor.

Retraites : les pensions vont progresser moins vite 

Le conseil d'orientation des retraites prévoit plusieurs scénarios, sur la base des différentes hypothèses de croissance, dont certains sont moins défavorables aux Françaises et aux Français ayant liquidé leurs droits. Entre 2018 et 2070, les pensions devraient théoriquement gonfler de 21 à 46%. À titre de comparaison, les salaires pourraient gagner entre 68 et 134%.

Dès lors, le niveau de vie des retraités devrait chuter entre 88 et 92% de celui du reste de la population, d'ici 2040. En 2070, il aura atteint un nouveau palier et ne représentera que 75 à 83% de celui des travailleurs…

Baisse du niveau de vie des retraités : qui faut-il blâmer ?

Plusieurs raisons expliquent ce changement drastique de tendance, explique Capital. Mais cela n'a rien de naturel : c'est le résultat d'une action politique entreprise il y a de cela des années. "La réforme d'Edouard Balladur en 1993 qui indexe les salaires pris en compte dans le calcul de la pension ainsi que les retraites sur l'inflation, et non sur le salaire moyen, est l'une des raisons principale de ce rattrapage", note par exemple l'économiste François Ecalle, président de Fipeco, qui fut aussi rapporteur général de la Cour des comptes.

Il pointe également du doigt la réforme Touraine, votée pendant la mandature de François Hollande afin d'allonger la durée de cotisation nécessaire pour prétendre au taux plein. "Certains actifs pourraient décider de partir plus tôt même s'ils ont une décote et donc avec un niveau de pension plus bas", commente-t-il. Sans oublier, bien sûr, la récente hausse de la CSG décidée par Emmanuel Macron…

Rééquilibrage du niveau de vie des retraités : une bonne chose, quoiqu'on en dise ?

"C'est la situation actuelle qui est anormale", estime pour sa part Maxime Sbaihi, économiste lui aussi et directeur général du think-tank libéral GenerationLibre. Selon lui, il est logique que le niveau de vie des travailleurs prenne le pas sur celui des retraités. "La France est l'un des rares pays où le niveau de vie des retraités est supérieur à celui des actifs", rappelle-t-il.

Il poursuit : "Avec le déséquilibre démographique et l'arrivée des baby-boomers à la retraite, le coût des retraites est de plus en plus élevé pour les actifs. Il faut se poser la question de savoir si on continue à faire peser le poids financier sur les actifs qui devront cotiser plus, si l'on incite à travailler plus longtemps ou si l'on demande un effort aux retraités".

"Pour être tout à fait honnête, les retraités d'aujourd'hui touchent davantage que ce qu'ils ont cotisés eux-mêmes. C'est mécanique : à l'époque où ils cotisaient pour leurs propres parents et grands-parents, le nombre d'individus à la retraite était nettement moins conséquent", précise encore Philippe Crevel, économiste et directeur du Cercle de l'Épargne. Le choix, semble-t-il, a été fait.