Démission de Sébastien Lecornu : combien vont toucher les ministres qui n’ont exercé que quelques heures ?

Publié par Matthieu Chauvin
le 06/10/2025
Sébastien Lecornu
abacapress
© Blondet Eliot/ABACA
Moins de 15 heures. C'est la durée pendant laquelle seront restés ministres les six nouveaux entrants nommés au gouvernement par Sébastien Lecornu le 5 octobre. Le Premier ministre ayant remis sa démission à Emmanuel Macron dès le lendemain, ils sont déjà appelés "ministres éphémères", bien qu'étant encore en charge des affaires courantes. Et, même devenus démissionnaires, ils ne vont peut-être pas partir les poches vides malgré ces quelques heures de "travail" à peine.
 

Ils étaient six, ministres de plein exercice ou délégués. En tout et pour tout, après leur nomination par le premier d'entre eux Sébastien Lecornu lundi 5 octobre en début de soirée, il n'auront été en place qu'une quinzaine d'heures. Puisque dès le lendemain matin, celui que Nicolas Sarkozy surnommait "Lecornichon" (ils sont restés bons amis), a remis sa démission à Emmanuel Macron, qui l'a acceptée (on a toutefois appris mardi après-midi que le président de la République avait demandé au Premier ministre démissionnaire de continuer les négociations jusqu'à mercredi soir avec les autres partis). 

Les ministres "éphémères" vont-ils toucher le pactole ?

C'est gravé dans le marbre, en l'occurrence dans le Journal officiel où figure le "Décret du 5 octobre 2025 relatif à la composition du gouvernement" et c'est la loi. Bruno Le Maire, nommé ministre des Armées, Roland Lescure, nommé ministre de l'Economie Éric Woerth, nommé ministre des Territoires, Naïma Moutchou, nommée ministre de la Fonction publique, Marina Ferrari, nommée ministre des Sports et Mathieu Lefèvre, nommé ministre des Relations avec le parlement devraient non seulement toucher un salaire et même une indemnité de départ... conséquente. Pour 15 heures de "travail." Le conditionnel est important.

Une indemnité de "fin de fonctions" de plus de 30 000 euros ! 

Vous avez bien lu, et encore une fois c'est parfaitement légal et réglementé. A partir du moment où leur nomination a été officialisée, ils ont droit si leur fonction prend fin, a une indemnité de plus de 30 000 euros brut, l'équivalent de 3 mois de salaire (10 700 euros brut par mois exactement). En effet, une ordonnance de 1958 encore en vigueur prévoit la chose suivante :

"Lors de la cessation de ses fonctions gouvernementales le membre du Gouvernement [...] perçoit une indemnité d'un montant égal au traitement qui lui était alloué en sa qualité de membre du Gouvernement. Cette indemnité est versée pendant trois mois, à moins que l'intéressé n'ait repris auparavant une activité rémunérée." Dans le privé, en restant finalement en place ou en redevenant parlementaire par exemple.  Notons qu'en plus de cette indemnité de "départ" (que toucheront aussi les autres ministres démissionnaires, mais eux étaient en place depuis 10 mois), nos ministres éphémères doivent aussi toucher un salaire "au prorata" des 15 heures "travaillées". Selon La Dépêche, cela ne représenterait que "quelques centaines d'euros" par tête.

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Les ministres n'ont pas le droit au chômage ! 

Cette indemnité existe car les ministres ne cotisent pas à l'assurance chômage comme les autres salariés. Il faut aussi savoir que le poste ne leur donne droit à aucune pension de retraite particulière. Cette indemnité, bien que conséquente, est donc une compensation financière. Et si nous insistions plus haut sur le conditionnel, c'est parce qu'il n'est pas du tout certain que les ministres "éphémères" de Sébastien Lecornu acceptent - du moins puissent accepter - de percevoir cette indemnité, d'après les informations du Parisien

Les ministres "éphémères" finalement privés d'indemnités ?

En effet, le quotidien croit savoir que le Secrétariat général du gouvernement devrait leur envoyer (à l'exception de Bruno Le Maire) dans les prochaines heures un courrier leur demandant d'y renoncer. Mais le ministre des Armées démissionnaire pourrait prendre lui-même cette initiative, ayant annoncé lundi renoncer au ministère pour "désamorcer" la situation. Toutefois, à nos confrères de Ouest-France, Jean-Eric Gicquel, agrégé des Facultés de droit, professeur de droit public à l’université de Rennes 1 déclare lui aussi penser qu'il y aura exception à la règle et qu'aucun versement n'aura lieu. "Rien n’interdira à tel ou tel ministre de contester cette appréciation mais je doute que quelqu’un le fasse !" Ce serait un bon signal envoyé aux Français.

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