Veuvage : pourquoi 80 % des veufs et veuves de plus de 60 ans sont des femmes
Une solitude essentiellement féminine. Les données sont sans appel : 80 % des personnes veuves en France sont des femmes. Cette surreprésentation féminine s'accentue nettement avec l'avancée en âge. Si le phénomène touche déjà près d'une femme sur trois après 60 ans, le fossé se creuse passé le cap des 75 ans, où plus d'une femme sur deux se retrouve seule, contre seulement un homme sur six.
Ce déséquilibre s'accompagne d'une autre inégalité : le temps passé seul. Selon les conditions de mortalité actuelles, la durée moyenne du veuvage en France pour une femme en couple à 60 ans s'élève à 13 ans. Cela représente près de la moitié des années qu'il lui reste à vivre. À l'inverse, les hommes, moins souvent confrontés à la perte de leur conjointe, vivent cette période de veuvage sur une durée nettement plus courte.
Biologie et société : les 3 causes de cette disparité
Comment expliquer une telle différence ? Pour comprendre pourquoi les femmes sont plus souvent veuves, il faut croiser trois facteurs déterminants mis en lumière par les démographes. Le premier est purement biologique : l'espérance de vie. Les femmes vivent en moyenne six ans de plus que les hommes. Cette longévité supérieure augmente mécaniquement leur probabilité de survivre à leur conjoint.
Le second facteur est social : l'âge au mariage. Traditionnellement, les hommes sont plus âgés que leurs épouses (environ trois ans d'écart en moyenne). Cette combinaison impliquant la différence d'âge dans le couple et l'espérance de vie influence directement le veuvage féminin précoce.
Enfin, le troisième facteur est comportemental : le remariage. L'inégalité face au veuvage selon l'Ined est renforcée par le fait que les hommes refont leur vie beaucoup plus souvent. Seul un veuf sur cinq de moins de 65 ans se remarie dans les dix ans, contre à peine une femme sur quarante. Là où l'homme trouve une nouvelle compagne, la femme reste statistiquement seule, conservant son statut de veuve.
Précarité et avenir : à quoi s'attendre ?
Au-delà de la solitude affective, la perte du conjoint agit comme un révélateur, voire un aggravateur de fragilités financières. L'impact économique du veuvage sur les femmes est considérable, particulièrement pour celles issues de ménages modestes. Le décès du mari entraîne souvent la perte d'une retraite plus élevée, plongeant de nombreux foyers dirigés par des veuves dans la pauvreté (deux fois plus souvent que pour les hommes veufs).
Heureusement, le système de protection sociale amortit le choc via les pensions de réversion (38,7 milliards d'euros versés en 2024). Cependant, il est crucial de rappeler que ce filet de sécurité est réservé aux couples mariés, excluant de fait les partenaires pacsés ou en union libre, qui se retrouvent sans ressources spécifiques au décès de leur compagnon.
Une lueur d'espoir se dessine-t-elle à l'horizon ? Les démographes anticipent une légère amélioration. La projection de la durée de veuvage d'ici 2070 suggère une baisse, passant de 13 à 11 ans en moyenne, grâce au rapprochement des espérances de vie entre les sexes.