Les cures thermales ne seraient presque plus remboursées après un vote des députés
La proposition a été officialisée par la ministre déléguée chargée de la Solidarité, Charlotte Parmentier-Lecocq. Elle a confirmé le souhait de "réduire le taux de prise en charge par l'Assurance maladie des forfaits thermaux (...) en l'abaissant de 65 à 15 %." L'objectif affiché, a-t-elle déclaré devant les sénateurs, est de réaliser "200 millions d'euros d'économies pour les comptes sociaux", si l'on prend en compte un autre coup de rabot qui fait polémique.
Un double coup de rabot pour tous les curistes
Plus marquant encore, cette proposition de réforme mettrait fin à l'exonération spécifique dont bénéficient les personnes en affection de longue durée (ALD). Pour ces patients, jusqu’ici remboursés à 100 %, la baisse du remboursement de leur cure ALD de 100 à 15 %, soit moins 85 % serait particulièrement brutale. Si elle est adoptée, ce déremboursement entrerait en vigueur dès le 1er février 2026.
La mesure ne concernerait que le "forfait thermal", c'est-à-dire les soins réalisés durant la cure. Le suivi médical, lui, resterait pris en charge à 70 %. Les frais de transport et d'hébergement resteraient soumis à des conditions de ressources strictes : moins de 14 664,38 euros de revenu fiscal l'année précédente, avec une majoration 50 %, soit 7 332,19 euros, pour l’époux ou le partenaire de Pacs et pour chaque ayant droit à la charge du patient.
Une catastrophe sanitaire à venir ?
Auprès de l'AFP, Benjamin Monssus, directeur d'une station thermale familiale de Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire) avec 4 400 curistes par an, dénonce "une catastrophe économique et sanitaire. Pour nous c'est le coup de massue et c'est la fermeture car c'est 90 % de patients qui ne viendront pas se soigner, avec des conséquences sur leur santé."
A nos confrères, Camille Preziosi, médecin qui s'occupe du curistes de Vals-les-Bains (Ardèche), affirme : "Il y a quand même beaucoup de gens avec peu de moyens (...) des gens qui ont des petits boulots, qui ont été cassés physiquement par leur travail mais qui font cet effort financier." En 2024, près de 470 000 Français ont bénéficié de ces soins, prescrits par un généraliste ou un spécialiste pour des pathologies chroniques comme les rhumatismes, les maladies respiratoires ou les troubles anxieux. Capital rappelle que les cures "doivent avoir lieu dans un établissement agréé et conventionné par l’Assurance maladie et comporter 18 jours de traitement effectifs."
Un risque économique dénoncé par le secteur
Pour une cure d'un coût moyen de 680 euros, le remboursement de la Sécurité sociale chuterait à environ 130 euros, provoquant une augmentation du reste à charge de la cure thermale de plus de 500 euros, d'après l'AFP, qui a interrogé Thierry Dubois, le président du Conseil national des établissements thermaux (CNETh), qui affirme que pour ceux qui dépassent le plafond pour le transport et l'hébergement, le coût total moyen serait de 1 800 euros (en comptant les soins et frais annexes).
"Il y aura beaucoup moins de curistes" selon Thierry Dubois. "On va perdre entre 3,5 et 3,8 milliards" d'euros sur les ressources générées par les cures, estimées à 4,8 milliards. D'après la CNETh, les emplois dans le secteur passeraient de 25 000 équivalents temps plein à 5 000. Les villes thermales ne seraient pas épargnées. Toujours à l'AFP, Julien Dubois, maire de Dax, à la tête d'un réseau d'élus de 80 communes dotées de centres, déclare : "Une décision aussi brutale mettrait à mal les communes thermales", car les cures "contribuent à l'aménagement du territoire, suscitent de l'activité en terme de commerces de bouche, d'hébergements, d'emplois."
Les mutuelles en première ligne, le Parlement en arbitre
Face à la polémique, le gouvernement précise qu'il ne s'agit pas d'un déremboursement total, mais d'un transfert de charge. La prise en charge par une complémentaire santé des cures thermales deviendrait donc essentielle pour couvrir la différence. Néanmoins, comme l'explique Previssima, seuls les bénéficiaires de la Complémentaire Santé Solidaire (CSS) conserveraient une prise en charge intégrale. Et beaucoup de mutuelles ne couvrent pas les cures, sauf à payer un forfait annuel onéreux (jusqu'à 300 euros).
Pour l'heure, cette mesure n'est qu'une proposition dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2026. Le texte devra être débattu et voté par le Parlement, où les élus locaux et les professionnels du secteur espèrent encore faire reculer l'exécutif. Les semaines à venir seront donc décisives pour l'avenir de la médecine thermale en France.