Retraite : 400 000 retraités seront contrôlés en l'espace de 6 ans, voici pourquoi
Les 1,5 million de retraités percevant une pension française depuis l’étranger connaissent bien cette formalité annuelle : le certificat de vie. Face à une fraude persistante, les contrôles se durcissent. Cette évolution s’inscrit dans la lignée des recommandations de la Cour des comptes, qui alerte régulièrement sur des versements indus atteignant plusieurs dizaines de millions d’euros par an. Pour le seul régime général, ces indus représentaient encore 43 millions d’euros en 2021, et l’ensemble de la fraude aux pensions coûterait environ 60 millions d’euros par an, selon la Caisse nationale d’assurance vieillesse.
Les retraités vivant à l’étranger sont particulièrement concernés. Plusieurs millions de Français ont choisi de passer leur retraite dans des pays ensoleillés ou plus abordables, notamment au Portugal, en Espagne, en Italie, en Belgique, au Royaume-Uni, en Israël, ou encore au Maghreb et en Turquie. Mais cette expatriation complique considérablement le suivi administratif : il est bien plus difficile pour les caisses françaises de s’assurer qu’un retraité vivant hors du territoire est toujours en vie. Certaines pensions continuent ainsi d’être versées à des personnes décédées, parfois pendant plusieurs années, sans que les autorités françaises en soient informées. Dans certains cas, ce sont les proches du défunt qui poursuivent illégalement la perception des pensions.
Des délais stricts pour éviter la suspension des paiements
Pour lutter contre ce phénomène, les contrôles sont renforcés et deviennent plus ciblés. La Cour des comptes a demandé un suivi plus strict, notamment dans les pays où les échanges d’état civil sont complexes. Dans ce contexte, le régime Agirc-Arrco a lancé en Algérie un vaste programme de vérification : chaque année jusqu’en 2031, 60 000 retraités seront convoqués, soit 400 000 contrôles sur six ans. Et cette politique pourrait être progressivement étendue à d’autres pays jugés sensibles.
La procédure est lourde pour les retraités concernés. Ils sont convoqués directement par leur banque, où ils doivent se présenter en personne munis d’un certificat d’existence, d’une pièce d’identité valide et de leur acte de naissance original. Sans réponse dans un délai de trois mois, la sanction tombe : la suspension de la pension. Les premières expérimentations sont révélatrices : 40 % des retraités ne se présentent pas dans les délais et voient immédiatement leur pension suspendue. Certains finissent par régulariser leur situation, mais un quart d’entre eux restent introuvables, entraînant la suppression définitive de leur pension.
Une vérification biométrique pour simplifier les démarches
Pour simplifier les démarches, l’ensemble du dispositif de certification de vie est désormais centralisé par le GIP Union Retraite via Info-Retraite.fr, qui traite une demande unique pour toutes les caisses, y compris l’Agirc-Arrco. L’innovation majeure est l’application "Mon certificat de vie", qui permettra dès 2025, pour les assurés de 71 ans et plus, de prouver leur existence grâce à une simple reconnaissance faciale via smartphone, sans se rendre dans une administration locale. Une avancée qui pourrait réduire les erreurs, accélérer les validations et limiter les convoqués en banque.
Malgré ces progrès numériques, la vigilance reste indispensable. Dès qu’un retraité reçoit une demande de certification, par courrier ou en ligne, le compte à rebours commence. Selon la caisse, il dispose d'un à trois mois pour transmettre le document. Passé ce délai, la pension est suspendue dans un délai maximal de deux mois. Le rétablissement n’intervient qu’après réception du certificat valide, ce qui peut prendre plusieurs semaines et fragiliser financièrement les intéressés. D’où l’importance de consulter régulièrement son Compte Retraite, surtout pour ceux qui ne peuvent pas compter sur les échanges automatisés d’état civil, déjà en vigueur pour près de la moitié des retraités résidant en Europe et en Suisse.