Cumul emploi-retraite : ne liquidez pas votre pension avant cet âge

La Cour des comptes cherche toutes les solutions à mettre en œuvre pour réduire les dépenses de l'Etat et donc le déficit public (il faut à tout prix trouver 40 milliards d'euros en 2025). Les retraités sont attaqués de toutes parts et c'est vers eux qu'elle se tourne à nouveau pour trouver un début de solution. Cette fois, c'est le cumul emploi-retraite qui est sur la sellette, après la revalorisation des pensions en deux temps mais pas pour tout le monde, ou la suppression de l'abattement des 10 %. La question revalorisation a en partie mené à la censure du gouvernement Barnier, la question de l'abattement pourrait mener à celle du gouvernement Bayrou. Aussi, il faut chercher ailleurs. Le chapitre VII, intitulé "Le cumul emploi-retraite : un coût élevé, une cohérence à rétablir", du rapport paru le 26 mai, donne le ton.
Le cumul emploi-retraite serait trop avantageux en France
En effet, l'un des principaux problèmes du cumul emploi-retraite français, est qu'il n'est pas plafonné assez tôt : ceux qui ont leur quota de trimestres peuvnt en profiter partiellement ou à plein pot, ce que la Cour qualifie "d'effet d'aubaine". Or, font remarquer les Sages : "De nombreux pays de l’OCDE prévoient un plafonnement des revenus d’activité des retraités avant l’âge d’obtention automatique du taux plein (67 ans en France). La France se singularise par une réglementation plus accommodante." Pour résumer; la Cour des comptes estime que la réglementation française est trop avantageuse car il est possible "de cumuler sans limite pension et revenus d’activité dès l’âge minimal d’ouverture des droits avec une durée d’assurance complète (62 ans en 2023, 64 ans pour les personnes nées en 1968 et après)." Elle voudrait donc repousser la liquidation à 67 ans pour ceux qui pratiquent le cumul emploi-retraite. Il deviendrait ainsi beaucoup moins avantageux. En effet, un écrêtement (une supression) de la pension à hauteur de 100 % des revenus d'activité serait appliqué pour un cumul emploi-retraite avant 62 ans, à hauteur de 50 % des revenus d'activité supérieurs à 7 000 euros entre 62 ans (âge minimal de départ) et 67 ans (âge de la décote), puis le cumul serait "libre" au-delà. Les économies envisagées iraient de 500 à 550 millions d'euror par an.
Des revenus trop élevés et pas justifiés ?
En 2020 estime la Cour, 710 000 personnes étaient en cumul emploi-retraite, un chiffre sans doute supérieur aujourd'hui. "Environ 2,5 % des personnes en cumul emploi-retraite salarié en 2020 (soit 3 800 personnes) percevaient des revenus salariaux supérieurs au plafond annuel de la sécurité sociale, correspondant à des emplois à plein temps de cadres ou de professionnels très qualifiés." Parmi eux "20 % d’entre eux avaient 62 ou 63 ans, dont beaucoup continuaient probablement de travailler chez le même employeur tout en ayant liquidé leur pension. Plus de 15 % avaient des revenus salariaux annuels supérieurs à 100 000 € tout en bénéficiant d’un montant annuel moyen de pension de 61 000 €, très supérieur à la moyenne (18 000 €)."
Le cumul emploi-retraite : une mesure pour profiteurs ?
La Cour des comptes semble presque reprocher aux retraités de travailler et de contribuer à la croissance, si cela reste possible... "L’analyse des données de la Cnav en 2020 confirme que la législation du cumul emploi-retraite permet le cumul de revenus salariaux importants avec des pensions élevées à partir d’un âge précoce. Près de 10 % des personnes en cumul emploi-retraite de moins de 67 ans en 2020 bénéficiaient ainsi d’un montant annuel de pension supérieur à la moyenne (18 000 €) tout en percevant des revenus salariaux excédant celle-ci, ce qui leur permettait de doubler a minima leur revenu total." Les sages considèrent que "Dans ses paramètres actuels, le cumul emploi-retraite constitue un élément de désincitation au report de l’âge effectif de liquidation de la pension, dès lors qu’il concurrence la surcote, dont l’objet est de valoriser ce report."
Pousser les "petits" vers le cumul, les "gros" vers la surcote
La Cour des comptes a ainsi un but avoué : repousser à l’âge effectif de liquidation de la pension à 67 ans "en limitant l’intérêt des plus favorisés au cumul emploi-retraite par rapport à une poursuite d’activité avec surcote. En supposant que les retraités ayant les revenus d’activité les moins élevés opteraient pour le cumul emploi-retraite et que ceux concernés par l’écrêtement privilégieraient la surcote, la réforme produirait deux types d’économies : d’une part, l’écrêtement des pensions des personnes optant pour le cumul emploi-retraite et, d’autre part, le non-versement des pensions de celles qui reporteraient leur départ à la retraite." Et le tour serait joué ?