Que dit la lettre "secrète" de Bruno Le Maire à Emmanuel Macron ?
Brun Le Maire savait, mais il n'a rien dit. Sauf à Emmanuel Macron. C'était peu avant que ce dernier ne décide de dissoudre l'Assemblée nationale suite à la déroute des élections européennes. Son ministre de l'Economie lui avait envoyé une lettre tamponnée du mot "secret", datée du 6 avril 2024. Ce n'était pas pour présenter au président de la République les premières pages de son nouveau roman érotique, mais pour l'avertir du dérapage des finances publiques du pays. Il était temps, de la part de celui qui était en place depuis le début, en 2017.
Quand "l'homme aux 1 000 milliards de dette" lançait l'alerte
L'existence de cette lettre et son contenu ont été révélés le 9 novembre dernier dans l'émission de France 5 C dans l'air. "Nous ne pouvons pas continuer à nous singulariser par le niveau élevé de notre dépense et de nos prélèvements. L’enjeu est la crédibilité politique de la France en Europe. Une stratégie volontariste préservera notre crédibilité comme la qualité de nos résultats économiques" écrit notamment Bruno Le Maire, surnommé par les oppositions "l'homme aux 1 000 milliards de dette."
Pour une loi de finances rectificative
Dans cette lettre, Bruno Le Maire demandait au président d'intercéder en faveur d'une loi de finances rectificative pour stabiliser le déficit public à 4,9 % en 2024 (il explosera à 5,8 % rappelle Le Parisien). "Faute de LFR, nous ouvrirons immédiatement un contentieux avec toutes les oppositions, qui feront bloc contre nous et nous accuserons d’insincérité." C dans l'air appuie là où ça fait mal en postant une photo de la lettre avec le commentaire "En mai 2024, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire est convoqué par le Sénat, accusé d'avoir caché au gouvernement des éléments sur le dérapage budgétaire français."
Emmanuel Macron fera la sourde oreille
La convocation du ministre de l'Economie au Senat avait fait grand bruit à l'époque. Ce qui n'avait pas empêché Emmanuel Macron de faire la sourde oreille, la suite est connue, en découle la situation actuelle. Un économiste nous confiait récemment qu'Emmanuel Macron savait que le déficit allait continuer à gonfler et que la seule solution selon lui de reprendre la main, était la dissolution. Raté.
Agir avant qu'il ne soit trop tard ?
Bruno Le Maire demande au chef de l'Etat d'adopter "stratégie ambitieuse de contrôle de nos finances publiques, pour revenir sous les 3 % de déficit en 2027, conformément (à ses) engagements." Il conclut ainsi sa lettre : "Il est indispensable que certaines de ces objets d’économies soient présentés simultanément. Notre intérêt politique est de garder l’esprit d’audace et de courage qui est ta marque de fabrique. Toute stratégie d’évitement est vouée à l’échec." C'est pourtant la stratégie contraire qui sera suivie...
L'exécutif accusé "d'insincérité"
Sur BFM TV, Eric Coquerel, député LFI et président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a déclaré : "Il y a une omission d'Etat". "Rétrospectivement, ça veut dire que le budget qui était présenté était insincère." France Info rapporte la réaction de Marine Le Pen, sur son compte X : "Le maquillage des comptes publics à quelques mois seulement des élections de 2024 devait nécessairement mener à une véritable 'purge fiscale et sociale' imposée par la macronie aux contribuables. Nous y sommes. Ces mensonges ont évidemment porté atteinte à la sincérité des élections européennes de 2024."
Mais l'apparition de courrier dans les médias ne devrait pas susciter plus de remous que cela. A gauche comme à droite, on pour le moment bien d'autres préoccupations, comme l'examen final du projet de loi de financement de la Sécurité sociale aujourd'hui.