Communication, adaptabilité, vision d’ensemble ... Le thème astral de François Bayrou nous donne les prévisions des astres pour son début de mandat de Premier ministre. Stanislas Delorme, consultant intuitif,...
"Nous ne pouvons pas continuer à avoir un système de retraites par répartition si nous ne pouvons pas le financer correctement", affirmait récemment le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance dont les propos sont repris par Europe 1. Et lui d’avancer, une fois de plus, la nécessité de revoir certains des paramètres de notre modèle de solidarités intergénérationnelles… Au risque d’agacer considérablement certains acteurs économiques. Pourtant, Bruno Le Maire ne prône pas la transformation drastique que souhaitait, avant la crise sanitaire, le président de la République. Lui se contenterait bien assez d’une réforme paramétrique.
Récemment encore, des syndicats ont appelé à la grève contre certaines mécaniques de pensées qui dictent notamment à la réforme que Bruno Le Maire appelle de ses vœux. Dans l’Ariège, certains sont même allés jusqu’à remettre en cause de précédentes modifications décidées par des hommes politiques qui ne sont plus aux manettes depuis longtemps, rapporte La Dépêche. Ces syndicalistes militent pour une revalorisation des pensions autant que pour "abroger le système inique de surcote et de décote instauré par Raffarin en 2003", indiquent nos confrères. Et ils n’ont pas prévu de s’arrêter là ! Ils se méfient aussi de la réforme que le gouvernement serait susceptible de préparer.
Mais quel est le problème, au juste, avec la réforme des retraites ?
Le premier péché de la réforme des retraites : le mensonge
Pour l’économiste Frédéric Farah, enseignant-chercheur à l’université Panthéon-Sorbonne et auteur de plusieurs ouvrages économiques dont Fake state: l'impuissance organisée de l'Etat (éditions H&O), cette réforme des retraites a commis trois péchés originaux. Le premier desquels serait le mensonge.
"La réforme des retraites selon Emmanuel Macron s’est construite sur l’idée d’un surplus d’égalité pour tout le monde, d’un universalisme bienveillant. Un euro cotisé donne les mêmes droits, ont affirmé les équipes du président. Quand on énonce le propos il est facile d’avoir le sentiment d’ un universel, en effet. Pour autant, c’est un mensonge", assène d’entrée de jeu l’économiste. "C’est oublier le fait que tous les travailleurs n’ont pas la même espérance de vie, que d’autres ont des carrières beaucoup plus heurtées parce qu’ils appartiennent à des catégories sociales moins avantagées ou parce qu’elles sont en fait des femmes. Quoique puisse en dire Emmanuel Macron, tout le monde ne sera pas logé à la même enseigne", poursuit-il.
L’objectif, soutient Frédéric Farah, n’est évidemment pas de "faire la poche des retraités" stricto sensu. Pour autant, insiste-t-il, "l’ambition de cette transformation, en plus d’être très modeste, n’est pas dite : il s’agit d’abandonner l’idéal de citoyenneté sociale - qui consiste à fournir un certain nombre de droits sociaux aux citoyens, à les renouveler et à les renforcer - au profit d’une logique minimaliste qui tente de faire croire qu’elle a le soucis des plus vulnérables", s’agace-t-il encore. Avant de conclure : "Derrière l’universalité de façade se cache l’entourloupe".
Le deuxième péché de la réforme des retraites : l’hypocrisie
Le deuxième péché de la réforme des retraites, affirme Frédéric Farah rejoint le premier : il s’agit de la claire volonté de dissimulation dont aurait fait preuve l’exécutif ; son "hypocrisie".
"On ne nous dit pas comment sera calculée la valeur du point. Le gouvernement reste volontairement vague sur la question et il est fort probable que cette donnée essentielle varie en fonction des circonstances. En l’état actuel des choses, si la réforme Macron était passée, il aurait été plausible que l’Etat ne décide de diminuer les pensions des retraités concernés pour rééquilibrer son budget. La réforme de retraite dissimule volontairement le fait que les pensionnés deviendront, à terme, des variables d’ajustement", s’agace l’enseignant-chercheur, pour qui cela ne s’arrête pas là.
"Le système, présenté comme simple, ne sera pas pour autant accessible. Il sera très difficile pour les Françaises et les Français de savoir combien ils toucheront à la retraite. C’est tout le pacte social qui est remis en cause, tandis qu’on place le citoyen dans une terrible incertitude", poursuit le professeur d’économie à l’université Panthéon-Sorbonne.
Autre point essentiel qui n’est pas abordé à ses yeux : la co-existence - temporaire, certes - des deux modèles de retraite. "A aucun moment l’exécutif n’a expliqué comment il comptait faire co-exister les deux modèles. Il va mécaniquement assécher le financement des retraites à l’ancienne, puisque celui-ci a vocation à disparaître. Mais comment financer les pensions qui en dépendent, pendant ce temps ? Au final, ce sont les retraités qui sont perdants : ils devront cotiser plus longtemps pour toucher des pensions moins élevées. Nous sommes en train d’organiser leur appauvrissement", conclut-il.
Le troisième péché de la réforme des retraites : la cupidité
"Le raisonnement peut sembler alambiqué, mais il n’en est rien. Prenons le temps de l’expliquer : le troisième péché de la réforme des retraites c’est la cupidité, l’avarice. Le système de retraite, s’il était réformé ainsi que le souhaite Emmanuel Macron, entraînerait mécaniquement l’explosion des inégalités et la réduction des pensions. Ce n’est pas sans poser de question ! Qui tirera les marrons du feu ?", interroge d’entrée de jeu Frédéric Farah ; pour qui la réponse est évidente.
"En déshabillant le service public, on habille évidemment le secteur privé. Parce que les retraites seront de moins en moins favorables, on favorise l’émergence d’un secteur assurantiel privé et on pousse les individus à aller chercher des compléments de capitalisation. N’oublions pas non plus que certains politiques d’aujourd’hui pourraient se retrouver lobbyistes demain…", souligne encore l’économiste pour qui la réforme des retraites sert évidemment des intérêts privés.
Et lui de conclure : "Les individus ne seront plus usagers d’un service public. Ils vont devenir clients du secteur privé. C’est, de facto, une rupture d’égalité : il y aura toujours des petits et des gros clients…"