INTERVIEW. Budget 2026 : ces annonces de François Bayrou qui vont directement impacter les Français
“Il y a plus de cinquante ans que notre pays n'a pas présenté un budget en équilibre. Nos dépenses dépassent chaque année les recettes”, a annoncé ce mardi 15 juillet François Bayrou en préambule de sa feuille de route budgétaire pour l'année 2026. “Depuis 1974, tous les projets de loi de finances sont déficitaires. La situation actuelle est l’aboutissement d’une dérive qui s’est accélérée après chaque crise et surtout une difficulté de l'État, et globalement des pouvoirs publics, de revenir au niveau d'avant-crise”, explique le spécialiste des questions macroéconomiques Philippe Crevel.
Le budget 2026, présenté par le Premier ministre François Bayrou comme un “moment de vérité”, prévoit 43,8 milliards d’euros d’économies pour ramener le déficit public de 5,8 % du PIB en 2024 à 4,6 % en 2026.
Les classes moyennes en première ligne ?
Le Premier ministre a assuré que “tout le monde devra participer à l’effort”. Si l’impact semble loin d’être équitable, l’effort consenti sera certainement plus important sur les classes moyennes. “Par définition, il est plus efficace de faire porter l’effort sur les classes moyennes parce qu’elles sont nombreuses. Il y a un effet masse et donc par définition, pour réaliser des économies, pour monter les recettes, il est malheureusement plus efficace de cibler les classes moyennes que les ultra-riches qui sont peu nombreux, ou les plus modestes qui ont peu de revenus taxables”, explique l’économiste. Notons toutefois que le chef du gouvernement a annoncé une “contribution de solidarité” pour “les plus hauts revenus”.
Les retraités en sont un exemple flagrant puisqu’ils seront touchés à plusieurs niveaux par cette “année blanche”. “Ils subiront à la fois le gel de leur pension, et la réforme de l’abattement fiscal de 10 % qui sera transformé en un abattement forfaitaire de 2 000 euros. Environ 60 % des retraités imposables seront donc touchés doublement.”
Les ménages modestes, eux, pourraient être affectés par le gel des prestations sociales, comme le RSA ou les allocations logement. “Cela représente une part importante de leurs revenus, parfois jusqu’à la moitié pour les 20 % les plus modestes”, poursuit-il.
Fonctionnaires, fiscalité, santé : une triple pression
Pour les 6 millions d’agents publics fonctionnaires, le gel du point d’indice aura un impact sensible : “Cela signifie une baisse de pouvoir d’achat, même si les avancements à l’ancienneté sont maintenus”, précise Philippe Crevel. Autre levier : le gel du barème de l’impôt sur le revenu. “Cela revient à un alourdissement mécanique de la pression fiscale pour la moitié des Français qui y sont assujettis.”
Enfin, le volet santé n’est pas épargné. Hausse des franchises médicales, déremboursement de certains traitements pour les patients en affection longue durée, mise en cause des arrêts maladie… autant de mesures pour atteindre l’objectif d’un “effort” de 5 milliards d’euros.
Des économies réelles, mais temporaires
L’économiste chiffre les économies de l’année blanche à environ “7 milliards d’euros”, une somme importante, mais qui reste ponctuelle. Selon Philippe Crevel, même si les mesures annoncées “vont évidemment avoir des effets à court terme”, elles n’apportent pas “d’économies structurelles”. “Il ne s’agit pas de réformes de fond de l’État, mais d’un blocage temporaire. Cela ne règle pas les problèmes de long terme de la dépense publique française.”
En d’autres termes, à défaut de réforme de fond, le gouvernement ne fait que repousser l’échéance. “Mais en 2027, la situation sera aussi compliquée qu’en 2026” conclut-il.