IllustrationIstock
Un tour de passe-passe qui rapporte gros. D'après les comparaisons effectuées entre la base de données immobilières des notaires et celle de Bercy (Demande de valeur foncière), certains prix de vente de DVF permettraient d'augmenter la base taxable. Voici pourquoi.
Sommaire

Le ministère de l’Economie aurait-il menti ? Lors de la publication de la nouvelle base de données immobilières "Demande de valeur foncière" ouverte au public le mois dernier, Bercy l’a assuré : l es droits de mutation (DMTO) et les frais d’agence (prix «net vendeur») ne sont pas inclus dans les prix de ventes affichés. Cela l’est seulement lorsque la prestation de l’agent immobilier est à la charge de l’acquéreur."Les frais d’agence n’entrent pas dans l’assiette du droit de mutation lorsque le mandat précise qu’ils seront à la charge de l’acquéreur, quel que soit le mandat", certifie d’ailleurs la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Les honoraires sont en effet considérés ici comme une charge supportée par l’acheteur et n’accroissent donc pas la somme perçue par le vendeur du bien immobilier, rapporte Le Figaro.

Les droits de mutation (taxes perçues par perçues par l’État, les départements et les communes), seront alors seulement calculés sur la partie revenant au vendeur. Or, si les frais d’agence sont à la charge du vendeur, les choses diffèrent…

Les prix de vente ne sont pas tous "net vendeur"

Certaines transactions DVF n’affichent pas le prix "net vendeur". Tel a été le constat des notaires, en commençant leur analyse.

Conséquences ? Si les frais d’agence sont à la charge du vendeur, l’assiette de calcul des droits de mutation comprendra ces honoraires. Selon Me Thierry Delesalle, président de la Commission des statistiques immobilières, cette pratique "se répand de plus en plus dans les agences".

D’ailleurs, sur les un peu plus de 110 000 transactions inscrites dans la base des notaires en 2018, 3 4% ont un prix de vente différent de celui de la base "DV". Un chiffre qui devrait croître, d’après les dires de Thierry Delesalle. Une augure pour les caisses de l'Etat.

En vidéo : Une escroquerie à un 1 million d'euros de travaux de rénovation démantelée

Des différences de prix conséquentes qui viennent renflouer les caisses de l’Etat

Pour démontrer les divergences entre les deux bases de données immobilières, Le Figaro prend l’exemple d’un 7 pièces de 180 m². D’après la base des notaires, le bien serait en réalité un 6 pièces de 184 m². Prix affiché sur "DVF" ? 1,247 million d’euroscontre 1,217 million d’euros "net vendeur" sur la base Bien des notaires.

Quid de cette différence de prix ? Elle est la conséquence des frais d’agence qui sont directement intégrés à la base taxable. Soit autant d’argent venant enchérir les finances publiques.

A quoi cela peut-il être dû ? Mensonge du ministère ou filouterie de la profession ?

Un gain de 500 millions d’euros !

A l’origine de cette situation qui peut paraître incompréhensible, la loi Alur. Depuis janvier 2017, un décret issu de ce texte contraint les agents immobiliers à afficher le montant de leur commission sur chaque annonce. Pour contourner cette obligation, la plupart des professionnels de l’immobilier affichent un prix de vente incluant les frais d’agence. Or, cela augmente l’assiette taxable.

"Avec une commission d’agence moyenne de 5%, le gain supplémentaire pour les départements avoisine les 600 millions d’euros par an", évalue Thierry Delesalle.

Par déduction, l’Etat en tire donc de gros bénéfices. En effet, sur la part des Droits de mutation à titre onéreux (DMTO ou taxe départementale de publicité foncière) touchée par les départements (4,5% du prix de vente du logement), une partie (un peu plus de 2% du montant perçu par les départements) est reversée à l’État. Si l’on y ajoute la hausse de 0,2 point de leur part DMTO demandée par l’association des départements au gouvernement, le gain avoisinerait les 500 millions d’euros.