Procès Jubillar : stalking, manipulation, gestes d’étranglement... une criminologue analyse le comportement de l’accusé

Publié par Suruthi Srikumar
le 16/10/2025
Procès Jubillar : stalking, manipulation, gestes d’étranglement... une criminologue analyse le comportement de l’accusé
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À l’approche du verdict du procès Jubillar, ce vendredi 17 octobre, la criminologue Martine Herzog-Evans alerte sur plusieurs "facteurs de dangerosité" chez l’accusé, toujours présumé innocent.
 

Après quatre semaines de procès, Cédric Jubillar connaîtra son verdict ce vendredi 17 octobre. Le peintre plaquiste de 37 ans est jugé pour le meurtre de son épouse Delphine, infirmière de 33 ans disparue dans la nuit du mardi 15 au mercredi 16 décembre 2020, à Cagnac-les-Mines. 

Malgré l’absence du corps, les avocats généraux ont requis 30 ans de réclusion criminelle, estimant que "tous les éléments convergent" vers l’accusé. L’un des avocats généraux a rappelé que la réclusion criminelle doit être "réservée aux récidivistes, aux faits sériels ou aux faits accompagnés d’actes de torture et de barbarie, ce qui n’est pas le cas dans ce dossier". Dans le box, Cédric Jubillar reste impassible et nie toujours les faits. Ses avocats plaident l’acquittement, soulignant l’absence de preuve matérielle. 

"On laisse de côté tout un spectre de facteurs de dangerosité"

Spécialiste du droit pénal et des sciences criminelles, Martine Herzog-Evans, professeure à l’Université de Reims, déplore que la criminologie ne soit pas prise en compte dans ce type de dossier. "On fait intervenir des psychologues ou des psychiatres, mais cela ne montre qu’une partie de l’histoire. On laisse de côté tout un spectre de facteurs de dangerosité", explique-t-elle, rapporte France 3 Occitanie. 

Des signaux comportementaux inquiétants

Dans son analyse, Martine Herzog-Evans relève plusieurs signes préoccupants dans l’attitude de l’accusé. Le premier est le "leaking", lorsqu’une personne se vante d’un acte qu’elle aurait commis, parfois sous couvert d’humour. Plusieurs anciens codétenus et ex-compagnes de Cédric Jubillar ont affirmé qu’il aurait évoqué la mort de son épouse.

"C’est une technique de manipulation", souligne la criminologue. Cédric Jubillar utilise également "le stalking", une surveillance obsessionnelle du conjoint. D’après les témoignages, Cédric Jubillar aurait cherché à géolocaliser Delphine avant sa disparition, soupçonnant une relation extraconjugale. Pour Martine Herzog-Evans, "ce comportement augmente le risque de passage à l’acte".

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De plus, les mimes d’étranglement rapportés par une ex-compagne inquiètent particulièrement la chercheuse. "En criminologie, la littérature montre que mimer un étranglement multiplie par six ou sept le risque de commettre un féminicide."

"C’est souvent au moment où la femme s’émancipe que le risque devient maximal"

Selon les données compilées par les chercheurs, 70 % des féminicides surviennent après une séparation. Delphine Jubillar, qui projetait de refaire sa vie avec son amant, aurait pu sous-estimer la dangerosité de son mari, note Martine Herzog-Evans. "C’est souvent au moment où la femme s’émancipe que le risque devient maximal."

Le couple, alors en instance de divorce, vivait dans un climat de tensions et de rancunes. Lors du procès, l’accusé a reconnu un tempérament colérique. "Je rabaissais tout le monde, c’est mon tempérament", a-t-il déclaré, avant d’ajouter : "À la fin, ça la saoulait."

Un profil "distant", selon les experts

Les experts psychologue et psychiatre entendus à la barre décrivent un homme "maîtrisé", parfois "distant" ou "peu déstabilisable". Aucune pathologie mentale n’a été décelée, mais un sentiment d’abandon et un besoin de contrôle transparaissent. "Il peut s’effondrer lorsqu’il est rabaissé", a précisé un psychologue qui a rencontré l'accusé à cinq reprises.

Après quatre semaines d’audience, les jurés devront trancher en se basant sur sa culpabilité fondée sur un faisceau d’indices et celle d’un dossier vide sans preuve formelle. 

 

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