Pénurie de moutarde : bientôt en rupture de stock en France ? Istock
En mars 2022, le prix de la moutarde avait augmenté de 7,8 % en un an. Alors que les aléas climatiques ont drastiquement réduit la production au Canada et en France, les prix s'envolent et le produit pourrait bientôt être difficile à trouver dans vos supermarchés.
Sommaire

Vers une pénurie de moutarde en France ? Si l'inflation a lourdement pesé sur le prix des pâtes, de l'huile de tournesol ou encore des fruits et légumes, elle touche aussi celui de la moutarde. Après l’huile de tournesol, la moutarde pourrait aussi venir à manquer dans les rayons de nos supermarchés.

La raison ? Le cours de la graine de moutarde qui s'est envolé, non en raison de la guerre en Ukraine, mais des aléas climatiques survenus en France et au Canada, plus gros producteur de graines de moutarde au monde. Selon les relevés de la société IRI, société d'analyse de données et d'études de marché, la hausse du prix de la moutarde a atteint 7,8% dans les supermarchés par rapport à mars 2021.

Moutarde : une chute de 28% de la production au Canada

Comme le rapporte sur BFMTV Pierre Kupferman, éditorialiste, la moutarde de Dijon, que l’on consomme le plus en France, est produite avec deux types de graines : Brassica juncea et Brassica nigra. Or, le premier producteur de ces graines de moutarde est le Canada et  les récoltes ont été très mauvaises en 2021 en raison de la canicule de l’été dernier.

Le ministère canadien de l'Agriculture avait annoncé à la fin de l’année que cette saison la production de graines de moutarde avait chuté de 28%, entraînant, par conséquent, une explosion du coût de la matière première. À la fin de l’année 2021, le prix de la tonne de moutarde se négociait à 1 700 dollars, soit un peu plus de 1 500 euros.

Moutarde : baisse des surfaces plantées

Une baisse des récoltes également survenue en France à cause des gels de printemps en 2021. La production a chuté de 50% à cause de ces aléas climatiques, mais également à cause d’insectes contre lesquels les agriculteurs ont beaucoup de difficultés à se battre, car ils n’ont plus le droit d’utiliser un certain nombre d’insecticides. “La filière n'a plus le droit aux insecticides, autorisés au Canada”, déplore en effet auprès des Échos Fabrice Genin, producteur à Marsannaye-le-Bois et président de l'Association des producteurs de graines de moutarde de Bourgogne (APGMB).

Autre problème, les agriculteurs, français comme canadiens, ont tendance à moins planter de moutarde pour privilégier les céréales comme le blé. Les surfaces plantées au Canada ont chuté de 50% par rapport à 2020, alors que celles plantées en France ont baissé de 45% depuis 2018. Seule bonne nouvelle, la récolte 2022 des graines de moutarde ne sera pas affectée en France car le gel d’avril n’a pas d’impact sur la production.

Moutarde : d’autres pays où importer ?

Mais si le Canada et la France baissent leur production, est-il possible d’importer des graines de moutarde ailleurs. Les graines utilisées pour la moutarde en France sont aussi produites en Asie, en Inde ou au Népal. Problème, ils en vendent peu, car leur population les utilise en huile. Les Asiatiques privilégient donc leur marché national. D’autre part, les graines qu’ils utilisent sont faites pour une moutarde beaucoup plus douce appréciée par les Allemands. Les autres pays envisageables sont la Russie et l’Ukraine, filières inenvisageables en raison de la guerre en cours entre les deux pays.

Dans La Tribune, le directeur général de Reine de Dijon en Bourgogne, regrette de ne pouvoir se reporter sur l’Ukraine. "Ce troisième fournisseur de graines nous aurait permis de faire le joint entre octobre et novembre 2022 et de continuer à livrer nos moutardes, en se basant sur nos graines de dépannage". 

Une crise jamais vue depuis 25 ans

“On est dans une crise jamais vue depuis 25 ans”, a confié à l'AFP, Christophe Planes, directeur des ventes France de Reine de Dijon, le troisième producteur français de moutarde, filiale du groupe allemand Develey. “La raréfaction est telle qu'on a une diminution potentielle de 50% des graines. Notre production est donc diminuée de moitié”, a-t-il poursuivi.