Le meurtre de Jean-Claude Delaval, une affaire Grégory avant l'heureRivière de la Vologne, Vosges.Istock
Aussi sordide que cela puisse paraître, le petit Grégory Villemin n'est pas le premier enfant retrouvé sans vie dans une rivière des Vosges. Retour sur un crime étrangement familier, survenu 35 ans plus tôt : le meurtre de Jean-Claude Delaval.
Sommaire

Les rivières des Vosges renferment de bien sordides secrets.  Le 31 mars 1949, le petit Jean-Claude Delaval, alors âgé de six ans, est retrouvé sans vie dans la rivière le Taintroué. Tout commence quelques heures plus tôt, quand l'enfant disparaît subitement après une journée tout ce qu'il y a de plus classique.

A 19 heures, Jean-Claude jouait encore dans le pré avec ses camarades de classe, près de la route nationale reliant Saint-Dié-des-Vosges à Epinal. 

Affaire Delaval : le corps de Jean-Claude retrouvé dans la rivière

Aux alentours de 20 heures, la mère du garçonnet s'inquiète de ne pas voir son fils rentrer et, après l'avoir cherché en vain, finit par appeler la police. Ni une, ni deux, les environs sont passés au crible : bois, prés, rives, rien n'échappe à l'oeil des enquêteurs.

A 21h30, frissons d'horreur : la tête de Jean-Claude, sauvagement mutilée, émerge des eaux glaciales du Taintroué. Quelques mètres plus loin, une flaque de sang confirme l'impensable : l'enfant a été assassiné. 

Affaire Delaval : pas de trace de lutte sur la dépouille de l'enfant

Aussitôt, l'enquête est confiée aux mains de la police judiciaire de Nancy. Sans compter les blessures à la tête du petit garçon, il semble que la victime ne se soit pas débattu. En effet, aucune trace de lutte ni de pas n'a été retrouvée dans l'herbe. "Rien ne pouvait permettre de considérer qu'il y avait un acte contre-nature, confirmant ainsi l’impression de ceux qui avaient constaté la parfaite ordonnance des vêtements de la victime lors de la découverte du corps", a expliqué le professeur Mutel de Nancy. 

Le spécialiste précise que l'auteur du crime a utilisé un "instrument tranchant qui a fait sur tout le crâne, de la région frontale à la région occipitale, des plaies intéressant le cerveau et dont quatre au moins sur six étaient mortelles". 

Pendant ce temps, les rumeurs font rage dans la bourgade : l'assassin est forcément parmi nous. L'enfant n'a pas crié, les chiens n'ont pas aboyé, et la victime a été jeté avec stratégie à l'endroit le plus profond de la rivière.

"Mais alors, quel mobile a pu pousser les criminels ? Jalousie ? Rancune ? Vengeance contre les parents ? Colère irrationnelle ?", écrivait alors L'Est Républicain.  Une situation qui rappelle étrangement le meurtre de Grégory Villemin, malheureuse victime collatérale d'une jalousie mal placée, 35 ans plus tard.

 Affaires Delaval et Grégory : le corbeau, un dénominateur commun

Dans le village, personne n'a été épargné par les fouilles et les interrogatoires, si bien que plus de 400 personnes ont été auditionnées.

Lors de leur entretien avec les forces de l'ordre, les voisins de la famille Delaval, M. et Mme Patenotte, font une révélation des plus troublantes. Marie-Louise, l'épouse, avoue être à l'origine de missives anonymes envoyées, entre autres, à la mère de Jean-Claude.

"L’une à la mère du petit garçon, accusant son mari d’avoir une maîtresse, une deuxième à l’époux de la soi-disant maîtresse, l’avertissant lui aussi qu’il était cocu. Elle voulait 'mettre certaines familles face à la réalité'", écrit L'Est Républicain. 

Là encore, cette histoire de corbeau n'est pas sans rappeler la tragique affaire GrégoryVillemin, dont la famille était harcelée par des lettres de menace.

Affaire Delaval : le témoignage troublant d'une camarade de Jean-Claude

Autre point commun avec l'affaire du meurtre du petit Grégory : à la maison, le petit Jean-Claude était particulièrement choyé et gâté. Benjamin d'une famille de trois enfants, ses parents tenaient un café-épicerie. Alors, quand la fille des voisins Patenotte révèle que ses parents ont déjà frappé Jean-Claude, les soupçons ne tardent pas à se diriger vers le couple. Josseline, la fillette, déclare aux enquêteurs :

Papa se trouvait à la cuisine au moment où je faisais mes devoirs, puis Jean-Claude m’embêtait. Il a d’abord joué à la balle avec mon petit frère, puis il a tourné autour de la table : maman l’a giflé, papa lui a donné un coup de martinet ; il est sorti. Comme il tapait du pied après la porte, papa est sorti de nouveau avec le martinet.

Finalement, la piste ne donne rien, et l'enquête demeure irrésolue. Pour le meurtre du petit Jean-Claude comme pour celui du petit Grégory, des questions restent sans réponse. Les enfants ont-ils été sacrifiés pour faire souffrir leurs parents ? Les auteurs des crimes sont-ils encore en vie, vivent-ils encore dans la vallée de la Vologne ? Seules les rivières de la Vallée le savent.