"Alcatraz des alligators" : c'est quoi cette nouvelle prison construite par Trump ?

Jusqu'où ira-t-il ? Sans doute contrarié par l'impossibilité de réhabiliter la mythique prison d'Alcatraz, Donald Trump a jeté son dévolu sur une autre zone dangereuse du pays pour implanter un centre de rétention d'un genre particulier. La prison originale est connue entre autres pour avoir accueilli Al Capone et pour la très probable évasion réussie de trois détenus en 1962 (elle fermera définitivement en 1963, devenue un musée), aujourd'hui encore présumés morts noyés dans la baie de San Francisco (voir l'excellent film L'évadé d'Alcatraz, avec Clint Eastwood, qui reproduit fidèlement les faits). Car les eaux de la baie sont glaciales toute l'année, parcourues par de forts courants, et surtout infestées de requins. Mais elle est aussi célèbre pour les violations des droits de l'homme répétées durant toute sa période d'activité (1934-1963).
Une nouvelle prison protégée par... 200 000 alligators de 4 mètres
Le 1er juillet, le couple présidentiel a inauguré les premiers "bâtiments" de ce centre détention destiné aux migrants, tandis que la vraie Alcatraz devait être réservée aux détenus les plus dangereux. Son emplacement n'a pas été choisi au hasard et fait référence à son modèle : sauf que ce ne sont pas les requins qui dissuaderont les tentatives d'évasions, mais les alligators (environ 200 000) et les différents serpents qui peuplent les marécages des Everglades, en Floride (d'où son surnom "Alcatraz des alligators". C'est là, dans cet environnement hostile (humidité extrême et chaleur étouffante) sur un ancien aérodrome, que seront enfermés les prisonniers qui ont eu le tort de vouloir vivre aux Etats-Unis mais aussi de vrais criminels dangereux, en pleine période de répression migratoire.
Un concept qui fait bien rigoler Donald Trump
Quand on pense aux prisons "préfabriquées" de Gérald Darmanin qui font polémique en France, on se rend compte que nous sommes encore bien loin de ce qu'est capable d'inventer le système carcéral américain. Le centre de rétention, "fait de lits superposés alignés, enfermés dans des cages grillagées, sous des pavillons de toile blanche" révèle Le Monde, est prévu pour recevoir 5 000 personnes en attente d'expulsion (l'état floridien aurait lui évoqué 1 000 places seulement). Il aurait été construit en une semaine seulement, et ses dispositifs de sécurité seraient limités, évidemment à cause de la faune locale (les alligators peuvent mesurer 4 m, et il y a aussi les pythons à la morsure ravageuse). Mais son coût de fonctionnement tournerait tout de même autour de 450 millions de dollars par an. En tout cas, tout cela fait bien rire Donald Trump. A la question posée par des journalistes de savoir si les alligators empêcheraient bien les évasions, il a répondu, goguenard "Je suppose que c'est le concept." Puis, dans son style habituel, il poursuit : "Les serpents sont rapides, mais les alligators… On va leur apprendre comment échapper à un alligator, ok ? S’ils s’évadent de prison, comment s’enfuir : ne courez pas en ligne droite, courez comme ça. Et vous savez quoi ? Vos chances augmentent de 1 %."
Une violation des droits de l'homme ?
L'administration Trump se félicité de ce nouveau centre de rétention. Blanche Karoline Leavitt , porte-parole de la Maison Blanche, citée par le Midi Libre : "Il n’y a qu’une seule route qui y mène, et la seule voie de sortie est un vol sans retour. L’endroit est isolé, entouré d’une faune dangereuse et d’un environnement impitoyable. Lorsque vous avez des meurtriers en situation irrégulière, des violeurs et des criminels odieux dans un centre de rétention entouré d’alligators, oui, je pense que c’est un moyen dissuasif contre toute tentative d’évasion". Autre son de cloche du côté des ONG. Pour Nayna Gupta, directrice des politiques du Conseil américain de l’immigration, reprise par le Huffington Post, "C'est une horreur absolue." De plus l'accès limité au centre rendrait beaucoup plus difficile les visites des avocats et le "signalement d'abus".
"Transformer les Everglades en un centre de détention pour immigrés financé par les contribuables est un mélange grotesque de cruauté et de théâtre politique" a déclaré Alex Howard, ancien collaborateur de Joe Biden au Miami Herald. Peu avant la visite du Président, Mark Fleming, directeur associé du contentieux fédéral au National Immigrant Justice Center. avait lui dénoncé au New York Times : "Construire une installation temporaire aussi vaste dans un délai aussi court, sans aucun plan clair sur la manière de doter en personnel adéquat les services médicaux et autres services nécessaires, au milieu de la chaleur estivale de la Floride, démontre leur mépris insensible pour la santé et la sécurité des êtres humains qu’ils ont l’intention d’y emprisonner."