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Frappées simultanément par la foudre, une vingtaine de personnes a survécu miraculeusement. Désormais, ils forment un groupe uni appelé les fulgurés. Récit.
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L'incroyable histoire des fulgurés d’Azerailles : des séquelles surprenantes

C’est littéralement un coup de foudre qui les a unis. Le 2 septembre 2017, à Azerailles en Meurthe-et-Mozelle, une vingtaine d’amoureux de la nature se sont donnés rendez-vous dans une zone marécageuse. Au programme, balade le long de la Meurthe et atelier sur les plantes sauvages comestibles. Une pluie drue s’invite à ce petit rassemblement vers 16 heures. Tout le monde se réfugie alors sous le chapiteau accueillant l’atelier dédié aux plantes. Problème, le barnum est situé sous un arbre. La foudre s’abat sur le groupe, rapporte Le Monde.

L’impact fait quatorze blessés dont deux graves. Miraculeusement aucun mort n’est à déplorer. Un an plus tard, le 2 septembre 2018, les survivants se sont réunis sur place. Ils forment désormais un groupe unique et uni appelé les fulgurés (personnes qui survivent à la foudre, les foudroyés eux en meurent). Parmi la vingtaine de personnes, certains sont en bonne santé mais d’autres ont encore des séquelles.

C’est le cas de Raphaëlle Manceau, l’une des deux victimes les plus atteintes. Cette professeure des écoles, en arrêt longue maladie depuis, ne pouvait pas imaginer les conséquences de cette mésaventure. Quelques semaines après, elle subissait de forte fatigue et des maux insupportables à la tête et aux pieds. C’est par ces extrémités que le courant a traversé son corps. "La foudre est sortie par cinq points sur un pied, et sept sur l’autre", explique-t-elle au Monde.

Raphaëlle Manceau confie au quotidien des symptômes beaucoup plus étonnant : "Je faisais des multiplications de trois chiffres par trois chiffres, en même temps je fredonnais des airs et pensais à l’organisation du quotidien". Ces capacités mentales augmentées n’ont duré qu’à peine plus d’un mois. Sur la même période, la femme de 46 ans était également "attirée comme un aimant" pour aller discuter avec des inconnus. Puis elle a perdu la parole, ne trouvant plus ses mots et s’exprimant de façon très lente.

Si aujourd’hui, après de multiples séances de kiné et d’orthophoniste, sa diction est quasi parfaite, elle s’exprime cependant avec l’accent alsacien. "Selon l’orthophoniste, ça me permet de faire traîner certaines syllabes et de réfléchir aux mots que je dois utiliser", précise Raphaëlle Manceau. Un cas particulier car chaque fulgurés à des symptômes post-traumatique différents.

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L'incroyable histoire des fulgurés d’Azerailles : des cobayes pour la science

Jocelyne Chapelle, elle, n’avait plus l’usage de ses jambes à l’hôpital. Puis cette femme de 66 ans a retrouvé progressivement sa mobilité. Elle a même renoué avec la randonnée en mai dernier. Lilian Gérard, le premier a avoir été frappé par la foudre, souffre encore aujourd’hui de nausées et de maux de têtes. Il est amené à dormir trois jours d’affilée quand cela se produit. Une diversité qui intéresse la science. En effet, Rémi Foussat, interne en médecine aux urgences d’Aurillac, doit lancer un protocole de recherche d’ici à la fin de l’année, écrit Le Monde.

Les fulgurés d'Azerailles représentent un groupe d’étude précieux pour l‘interne qui explique : "Les troubles du groupe d’Azerailles sont assez représentatifs. Ils sont de trois types : transitoires, prolongés et retardés." Toutes les victimes ont accepté de devenir des cobayes. L’analyse de ces éléments doit permettre à Rémi Froussat de mieux comprendre les lésions d’un courant électriques sur le corps, notamment les troubles retardés. "L’étude de Rémi Foussat représente un enjeu important car nous avons une connaissance nulle de la façon dont passe le courant sur un organisme vivant", explique Marie-Agnès Courty, géologue au CNRS de Perpignan et spécialiste du sujet.

En attendant que la recherche avance grâce à eux, les fulgurés d’Azerailles continuent de se réunir. Les retrouvailles lors du premier anniversaire de leur accident rarissime a été marqué par une petite maladresse. Selon Le Monde,  Nathalie Obrecht, l’animatrice de l’atelier de plantes sauvages comestibles et la seule à avoir été épargnée par la foudre, a lâché : "C’est la joubarbe qui protège de la foudre". Une remarque pas appréciée de tous. Surtout que c'est elle qui a choisi de placer le chapiteau sous l'arbre. Une mauvaise décision m ais Nathalie Obrecht assure au journal que " personne ne [lui] en a voulu".