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L'Ogresse de la Goutte-d'Or, la veuve noire, la Barbie du crime, la Demoiselle de la mort... Les tueuses en série sont légion. Elles sont souvent moins connues que leurs homologues masculins mais pas moins dangereuses. Portraits.
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Tueuses en série : sont-elles vraiment différentes des hommes ?

Francis Heaulme, Joseph Vacher, Jacques Plumain, Guy Georges, Patrice Alègre et, peut être, Nordahl Lelandais… Les tueurs en série ne manquent pas. Est-ce à dire que les femmes elles, ne tuent pas ou alors pas autant ? Ce serait une erreur ! Les tueuses en série sont nombreuses, même si moins ancrée dans l’imaginaire collectif. Elles font parfois l’objet de représentation dans la pop culture quand, comme Aileen Wurnos, elles sont le sujet principal d’un film par exemple.

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"En pratique, les tueuses en série représentent 12 à 15 % de l’ensemble des tueurs", indique Stéphane Bourgoin à Planet. L’écrivain français, sépcialisé dans l’étude des tueurs en série et du profilage criminel les connait bien, pour avoir écrit Femmes tueuses (dédition Fleuve noir), publié en 1994.

"Il y a de nombreuses différences entre les tueurs et les tueuses en série. D’une façon générale, les tueurs s’en prennent à des victimes inconnues. Les tueuses, elles, s’attaquent presque toujours à des membres de leur entourage proche", analyse le spécialiste. "On recense trois types génériques de serial killer féminin. Les veuves noire, qui tuent leurs compagnons ou leurs conjoints, les infirmières de la mort qui s’en prennent généralement à des personnes âgées dans des services médicaux et, enfin, les mères infanticides." Ces dernières, précise-t-il, ne comprennent ni  les dénis de grossesse, ni les néonaticides.

Dans leur manière de tuer, les tueuses en série procèdent également différemment, assure l’expert. "Comme les tueurs en série, elles ont assez rarement recours aux armes à feu. Elles sont souvent animées, comme tout tueur en série, par un désir de toute puissance, d’où un besoin de contact physique. Cependant, elles utilisent moins souvent que les hommes des armes blanches. Leurs méthodes sont plus insidieuses (strangulation, poison, injection létale…). C’est pour cette raison que leur nombre et très certainement sous-évalué", conclut-il.

Aileen Wurnos

"C’est un profil particulièrement atypique", commence Stéphane Bourgoin à propos d’Aileen Wurnos. Née le 29 février 1956 à Rochester (Michigan), elle porte à l’origine le nom de Susanne Carol Pittman. Sa mère, Diane Pratt se marie à 15 ans avec Leo Dale Pittman, le 3 juin 1954. Elle divorcera trois ans après la naissance de leur fils Keith et deux ans après celle d’Aileen. La jeune fille n’a jamais connu son père, incarcéré pour viol et tentative de meurtre sur un enfant de 8 ans à sa naissance. Elle et son frère sont abandonnés en janvier 1960 avant d’être adoptés par la famille Wuornos en mars de la même année. Ils en prendront le patronyme.

Dès l’enfance, Aileen multiplie les relations sexuelles avec plusieurs partenaires dont son frère. Elle tombe enceinte à 14 ans et déclare que l’enfant est le fruit d’un viol, par un inconnu. Elle accouche d’un garçon le 23 mars 1971 et l’enfant est immédiatement placé afin d’être adopté. Peu après, à ses 15 ans, elle est chassée de la maison par son grand-père. Pour subvenir à ses besoins elle se prostitue. Selon le site tueurenserie.org, elle commence à se prostituer plus jeune, vers 11 ans, pour pouvoir acheter des cigarettes. Son frère se droguait et de nombreux garçons la ridiculisaient et lui jetaient des pierres. Elle aurait été abusée par des hommes plus âgés. Elle trouvait d’ailleurs plus honteux de l’admettre que de reconnaître les meurtres qu’elle a commis.

A partir de 1971, elle multiplie les petits délits, de la conduite en état d’ivresse au comportement contraire aux bonnes mœurs en passant par des violences, du tir au pistolet de calibre 22. Elle se marie en 1976 avec Lewis Gratz Fell, rencontré lors d’un voyage en auto-stop. Elle divorce 9 semaines plus tard, non sans l’avoir frappé. Par la suite elle est condamnée à la prison à plusieurs reprises.

Elle rencontre plus tard Tyria Moore,une femme de ménage, dans un bar gay. Les deux femmes s’installent ensemble. Elles auront de nouveau affaire à la police en 87.

Au total, la "Demoiselle de la Mort" aura tué 7 hommes entre 1989 et 1990. Tous, explique-t-elle, ont tenté de la violer. "Contrairement à beaucoup d’autres tueurs en série, Aileen Wuornos tue avec une arme à feux. On soupçonne d’ailleurs qu’elle ait tué avec la complicité de son amante", note Stéphane Bourgouin pour qui "il s’agit probablement de la tueuse en série la plus connue, du fait du film qui lui a été consacré". Elle est morte en 2002, dans la prison d’Etat de Floride ou elle a été exécutée.

Mary Flora Bell

"C’est probablement la plus jeune tueuse en série", indique Stéphane Bourgoin. Mary Flora Bell, née en 1957 à Newcastle upon Tyne, en Angleterre, a été jugée coupable du meurtre de deux enfants. Martin Brown, 4 ans et Brian Howe, 3 ans. "Mary Bell avait presque onze ans quand elle a tué pour la première fois. Les enquêteurs estiment probable que le nombre de victimes soit en vérité plus important", précise le spécialiste.

Elle est la fille d’une prostituée, Betty Bell, régulièrement absente. On ignore l’identité de son père biologique. A plusieurs reprise, Betty Bell aurait essayé de tuer sa fille durant sa petite enfance, dans l’espoir de faire passer sa mort pour accidentelle. Elle aurait également utilisé Mary lors de certaines prestations avec des clients.

Mary a encore 10 ans quand elle tue Martin Brown en l’étranglant, le 25 mai 1968. Quelques jours plus tard, Mary et son amie Norma cambriolent et vandalisent un orphelinat à Scotswood. Elles y laissent des notes anonymes dans lesquelles elles revendiquent la responsabilité du meurtre de Martin Brown, mais cette piste ne sera pas étudiée par la police qui croit d’abord à une farce.  C’est le 1er juillet qu’elles tuent Brian Howe, à nouveau par strangulation. Elles entaillent le cadavre à l’aide de lames de rasoir à plusieurs reprises. D’abord sur l’abdomen où elles dessinent un "n" puis un "m", puis sur le pénis à l’aide de ciseaux cette fois. Elles lui coupent également des mèches de cheveux.

Elle est condamnée le 17 décembre 1968 à perpétuité et sera finalement relâchée en 1980 après avoir passé 12 ans en prison. "La justice lui a accordé le droit de changer d’identité et de rester dans l’anonymat. Depuis, elle est mère de famille. L’anonymat a aussi été accordé sa fille", souligne Stéphane Bourgoin.

Patricia Dagorn

"Surnommée la veuve noire de la côte d’Azur, Patricia Dagorn, 57 ans, a récemment été condamnée à 22 ans de réclusion criminelle pour assassinat et empoisonnement", débute Stéphane Bourgoin.

Patricia Dagorn a été jugée devant les assises des Alpes-Maritimes, comme l’indique RTL, pour l’assassinat de deux retraités, d’un SDF ainsi que d’un ancien maçon à la retraite, en 2011. Elle aurait partagé des nuits d’hotels avec le SDF, précise la radio. Par ailleurs, elle a également été accusée d’avoir administré du valium, une substance nuisible, à deux autres octogénaires qu’elle aurait rencontré par le biais d’une agence matrimoniale. Elle a d’ailleurs admis pour un seul d’entre eux qu’il "ait pu ingérer du Valium en buvant par inadvertance un verre qu’elle s’était servie pour elle-même", précise le site d’information.

Sud Ouest mentionne également des témoignages décrivant Patricia Dagorne comme une femme "vénale et sans scrupule qui cherchait à piéger des vieux hommes".

Christine Malèvre

"Christine Malèvre correspond à ce que l’on appelle une ange de la mort. Infirmière de sa profession, elle a provoqué volontairement la mort d’au moins six patients, en France", décrit Stéphane Bourgoin.

En pratique, Christine Malèvre est soupçonnée d’avoir commis trente homicides comparables. Elle les a d’abord avoués avant de se rétracter après sa sortie de garde à vue, comme l’indique France-Soir. Les faits se sont déroulés entre février 1997 et mai 1998. Sur les six patients qu’elle a tués, deux n’étaient même pas en soins palliatifs au moment des faits.

Elle a d’abord expliqué que les patients lui avaient demandé de l’aide pour mourir, ce qui a été contesté par les familles de victimes, notamment quand le proche s’apprêtait à quitter l’hôpital ou était en voie de guérison.

Selon Libération, Christine Malèvre pensait "aider les autres". "Les autres : un mot qui lui sert de leitmotive, d’étai, de parapluie et de ligne d’horizon. C’est pour eux, ‘les autres’, qu’elle se lève le matin. Elle a ‘toujours envie de leur faire plaisir’, elle veut ‘leur rendre service’", écrit le journal. "Je m’occupe des autres comme j’aimerais qu’on s’occupe de moi", aurait-elle déclaré.

En 2003, elle est reconnue coupable de six assasinats et est condamnée à 10 ans de réclusion criminelle. Elle doit également verser 92 910 euros de dommages-intérêts. Après avoir fait appel de la condamnation, sa peine est portée à 12 ans de réclusion. Elle est libérée en août 2007 après avoir purgé 4 ans de prison.

Margie Velma Barfield

"Margie Velma Barfield, née Margie Velma Bullard, est exécutée en 84 en Caroline du Sud. C’est la première femme depuis 1962, et la première à avoir été tuée par injection létale", explique Stéphane Bourgoin. "Elle a tué aux moins 5 personnes, parmi lesquelles plusieurs de ses compagnons et de ses employeurs."

Dès l’enfance, Margie Velma Barfield est victime de violences. Son père, abusif, l’aurait frappée et sa mère n’aurait rien fait pour l’en empêcher. En 1949, alors qu’elle a 17 ans, elle épouse Thomas Burke, sa première victime. De ce mariage naissent deux enfants. Une opération médicale pousse Barfield dans la toxicomanie. De son côté Thomas Burke commence à boire. Alors qu’il est évanoui, Margie Velma Barfield quitte le domicile familial avec ses enfants, en 69. Quand ils reviennent, la maison brûle et Thomas Burke est mort. En 70, elle épouse Jennings Barfield, qui meurt moins d’un an après leur mariage à la suite de complication cardiaques. En 74, c’est la mère de Velma Barfield, Lillian Bullard, qui meurt empoisonnée à l’arsenic. Velma Barfield niera l’assasinat.

En 1976, elle commence à travailler pour Montgomery et Dollie Edwards. Elle donne pour eux des soins aux personnes âgées. Montgomery meurt à l’hiver 76 avant d’être suivi, un mois plus tard par son épouse Dollie. Elle souffre des mêmes symptômes que Lillian Bullard (diarrhée, vomissements et nausées intenses). Cette fois-ci, Margie Velma Barfield confessera l’assassinat. Un an plus tard, elle empoisonne le mari de sa nouvelle employeuse, John Henry. Encore une fois, elle le tue à l’aide de l’arsenic et avouera l’assasinat. En 78, elle tue son petit ami, Stuart Taylor, parent de Dollie Edwards. L’autopsie rélève qu’il a été empoisonné à l’arsenic.

Karla Homolka

"Elle a été l’épouse du tueur en série Paul Bernardo. Tous deux, ils ont été surnomé les Ken et Barbie du crime. D’origine canadienne, elle a récemment défrayé les chroniques au Canada après avoir été autorisée à faire du bénévolat auprès d’une école. Elle accompagnait les sorties d’enfants", indique Stéphane Bourgoin.

Après avoir étudié dans l’Ontario, Karla Homolka travaille dans une clinique véterinaire. En octobre 1987, elle rencontre Paul Bernardo lors d’une convetion de l’industrie animalière de Toronto. Elle l’épouse un peu plus tard.

En 1993 elle est hospitalisée à la suite des mauvais traitements qu’il lui inflige. C’est peu de temps après que la police canadienne découvre qu’il est le "violeur de Scarborough", en comparant des échantillions de substances corporelles. Karla Homolka avoue alors le rôle qu’ils ont joué dans le meutre des deux adolescentes Kristen French (violée à multiples reprises et étranglée) et Leslie Mahaffy (violée à répétition, étranglée avec un fil électrique avant d’être débitée en morceaux et coulée dans du ciment). Elle est soumise à une expertise psychiatrique qui révèle que son état est dégradé.

Sa responsabilité dans la mort de plusieurs jeunes filles, parmi lesquelles sa propre sœur qu’elle aurait droguée avant de participer à son viol, est avérée. Toutefois, elle collabore avec les autorités dans la poursuite de son époux et purge une peine de 12 ans pour homicide involontaire. Elle sera libérée le 4 juillet 2005, ce qui n’est pas sans inquiéter la population en dépit de l’assurance des autorités compétentes comme l’indiquait à l’époque le journal canadien Le Devoir.

Depuis, elle a changé de nom et s’est remariée. Elle est mère de plusieurs enfants, tous scolarisés à l’Académie adventiste Greaves où elle a été amenée à entrer en contact avec d’autres jeunes dans le cadre de son activité bénévole. Toutefois, face à la colère et l’inquiétude des parents, l’école est revenue sur sa décision de laisser Karla Homolka faire du bénévolat.

Jeanne Weber

"C’est une tueuse en série française, morte en juillet 1918. Elle a été surnommée l’Ogresse de la Goutte-d’Or parce que c’est dans ce quartier qu’elle a commis ses meurtres, à Paris. Elle a tué au moins 10 enfants, dont le sien. Elle finit sa vie à l'asile", raconte Stéphane Bourgoin.

Elle nait en Bretagne, dans un village de pêcheur. A 14 ans, elle le quitte pour gagner la capitale, où elle exercera de multiples petits boulots avant de se marier, en 1893, avec Jean Weber. Deux des enfants qu'elle aura avec lui seront retrouvés morts, sans explication apparente. Par la suite, en 1905, elle est amenée à garder les enfants de sa belle-sœur. Une des deux fillettes, âgée de 18 mois, tombe malade et meurt. Le médecin ne remarque pas les contusions qu'elle a au cou. Jeanne continue de garder d'autres enfants qui meurent subitement, frappés par les mêmes symptômes.

Le 25 mars 1905, elle garde la fille de son frère, âgée de 7 ans. L'enfant est victime d'une crise subite de suffocation. Sa gorge est marquée de rouge, mais elle survit jusqu'au lendemain. Jeanne Weber poursuit la garde, et l'enfant meurt. La diphtérie est mise en cause et une nouvelle fois les traces de strangulation sont ignorées.

Il faut attendre avril 1905 pour qu'une première plainte soit déposée. Jeanne Weber avait invité ses deux belles-sœurs à dîner. Les deux femmes partent faire des courses et elle reste avec son neveu, Maurice, 10 ans. Quand les deux femmes reviennent, elles trouvent le garçon haletant sur le lit, la gorge marquée par les ecchymoses. Jeanne est debout sur lui, le visage grimé par la folie. Son procès s'ouvre en 1906 et elle est accusée de huit meurtres. Parmi lesquels, ceux de ses trois enfants. Toutefois, les médecins légistes concluent à des morts naturelles et elle est acquittée. Perçue comme une victime par la presse, elle bénéficie même d'une campagne de réhabilitation.

Par la suite, elle prend un faux nom et part s'installer dans l'Indre. Elle y est recueillie par un agriculteur, dont elle tuera le jeune fils peu de temps après son arrivée. La famille porte plainte après avoir découvert qui elle était, mais une nouvelle fois Jeanne Weber est acquittée. Après un bref passage dans un hôpital pour enfant à Fontgombault, elle travaille dans l'Eure en tant qu'employée à la maison d'enfants de Caillouet-Orgeville. Elle y est embauchée par des amis qui souhaitent "rattraper les torts que la justice a infligé à une femme innocente". Elle y est surprise en train d'étrangler un garçon mais l'affaire sera étouffée par le directeur. Plus tard elle avouera ses crimes à la police et sera internée.

Une fois libérée, elle retourne à Paris. De nouveau arrêtée pour vagabondage, elle sera un temps incarcérée à l'asile de Nanterre. Cependant, les médecins la déclarent saine d'esprit et elle est libérée. Elle commence à se prostituer et s'installe dans une auberge de Commercy en 1908. Elle réitère ses méfaits et est surprise en train d'étrangler le fils de l'aubergiste à l'aide d'un mouchoir ensanglanté. Elle sera finalement déclarée folle en décembre de la même année et finira sa vie à l'asile.