DMLA : un implant redonne une vision fonctionnelle aux personnes âgées
Un espoir pour 1,5 million de Français touchés. Atteint de DMLA sèche sévère, Maurice, 75 ans, ne voyait presque plus. Pourtant, muni de grosses lunettes reliées à un implant, il parvient aujourd’hui à lire lentement un article. “Quand vous n’avez rien du tout au départ, c’est énorme”, confie-t-il au Parisien. Il fait partie des rares patients dans le monde ayant testé ce système inédit. Non-voyant depuis plusieurs années, il est désormais capable de reconnaître des objets, de lire quelques lignes et même de distinguer des indications sur des appareils du quotidien.
La DMLA reste la première cause de malvoyance liée à l’âge : 1,5 million de personnes sont concernées en France. Sa forme sèche, la plus fréquente, détruit progressivement la vision centrale sans qu’aucun traitement ne permette de la stopper. La macula, petite zone chargée de la vision fine, se dégrade “comme si l’on retirait petit à petit les pièces d’un puzzle”, explique Sylvia Nghiem-Buffet, ophtalmologue à l’hôpital Avicenne (AP-HP), à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Avec le vieillissement de la population, les spécialistes redoutent une explosion des cas dans les années à venir.
Un implant miniaturisé, autonome et discret
L’implant, un carré de 2 mm, est placé au fond de l’œil par chirurgie. Jusque-là, les dispositifs similaires nécessitaient un câble relié à l’extérieur. Ici, tout est autonome. Une caméra fixée aux lunettes capte l’image, transformée en lumière infrarouge via un boîtier portable, avant d’être reconvertie en signaux électriques envoyés au cerveau. “Ce n’est pas de la vision réelle, mais de la reconstitution”, précise Sylvia Nghiem-Buffet, qui juge le concept “fascinant”. Le patient voit en noir et blanc, mais retrouve une capacité d’identification visuelle perdue depuis longtemps.
L’étude internationale, coordonnée par l’Inserm, montre des progrès significatifs : sur 32 patients, 25 ont lu au moins 15 lettres supplémentaires avec l’implant après un an. “On opère, mais il faut ensuite faire de la rééducation et du travail de réglage avec le patient… il doit donc être motivé”, précise Laurent Kodjikian, ancien président de la Société française d’ophtalmologie. Maurice est même “le champion” de l’essai, gagnant 59 lettres.
Une innovation prometteuse, mais encore inaccessible à tous
Impossible toutefois de sortir ou de conduire avec ce dispositif, mais les patients peuvent lire, reconnaître des objets, ou consulter des appareils du quotidien. “Cela change la vie”, souffle Maurice, qui parvient désormais à lire une plaque de cuisson ou la température du réfrigérateur. Opéré en 2021, il vit depuis quatre ans avec l’implant, qu’il supporte bien malgré quelques ajustements techniques nécessaires. Le dispositif pourrait obtenir sa certification européenne dès 2026-2027, avant un éventuel remboursement, encore très incertain compte tenu de son coût élevé, potentiellement plusieurs dizaines voire centaines de milliers d’euros.
Les spécialistes restent prudents : l’implant ne restitue pas une vision normale, demande un matériel lourd et coûteux, et ne conviendra pas à tous. “Une personne pas trop âgée, autour de 75 ou 80 ans, plutôt en bonne santé et très motivée”, résume Sylvia Nghiem-Buffet. L’objectif n’est pas de rendre une vue complète, mais de redonner de l’autonomie. “On leur redonne de l’autonomie, ce qui est capital pour eux”, insiste Laurent Kodjikian.
Au-delà de ce premier modèle, de nouveaux implants, plus performants, sont déjà en développement. L’intelligence artificielle pourrait également améliorer l’analyse des images pour affiner le rendu visuel. L’ophtalmologie est l’un des domaines où l’innovation progresse le plus rapidement. Laurent Kodjikian se montre enthousiaste : “Ce n’est pas encore une révolution, mais c’est un pas en avant énormissime.” Une avancée qui pourrait ouvrir la voie à une nouvelle ère pour les patients atteints de DMLA sèche sévère.