Hubert Lambert, l'homme qui légua sa fortune à Jean-Marie Le Penabacapress
Au fondateur du Front national, il avait légué un patrimoine de plusieurs millions de francs, comprenant le manoir de Montretout à Saint-Cloud. Humbert Lambert était lui-même héritier d'une famille d'industriels. Voici ce que l'on sait de sa biographie.
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“L’héritage Lambert a tout changé dans sa vie”, constatait Lorrain de Saint-Affrique, qui fut l’attaché de presse de Jean-Marie Le Pen, dans un livre paru en 1998 (Dans l’Ombre de Le Pen, avec Gabriel Fredet, Hachette Littérature, p34). Ce fameux héritage, obtenu en 1977 a permis au fondateur du FN de devenir millionnaire et de s’installer dans le manoir de Montretout, qui devient son fief, un bureau et un lieu de rencontres politiques où logeront plusieurs membres de sa famille.  

Cette richesse, le fils de marin-pêcheur qui se voulait le chantre des “petits, des obscurs, des sans-grades”, la doit à un homme : Hubert Lambert. 

Courroux familial

Ce dernier vient au monde à Saint-Cloud - la ville de Montretout, près de Paris - le 20 août 1934. Il est le fils unique de Léon Lambert, héritier des cimenteries du même nom et de Renée de Saint-Julien, infirmière. Cette union aurait, pour la famille Lambert, constitué une “mésalliance” selon une enquête du Monde datant de 1985. Léon Lambert, né en 1876, décède après la Seconde Guerre mondiale. Le fils aurait été brièvement marié mais a fini sa vie célibataire et sans descendance. Nombre de témoignage le décrivent comme très proche de sa mère, dont il porte le nom dans ses publications qu’il signe “Hubert de Saint-Julien -. Celle-ci disparaît au début de l’année 1976, quelques mois avant son fils. 

Une carrière à l’extrême-droite ?  

Militant d’extrême-droite à un âge précoce, Hubert Lambert a publié des articles dans leurs revues : " le Faisceau " des Jeunesses nationalistes européennes, " l'Heure française " et bientôt " Jeune Nation”, comme le relate cet article du quotidien Le Monde, paru peu après le décès de ce dernier.  Comme le montre cet exemple d’article signé Hubert Saint-Julien que nous avons retrouvé, en 1956, dans l’Heure Française, il appelle à une plateforme commune entre les “groupuscules” nationalistes. 

D’autres textes lui sont attribués, notamment un livre sur l’homme politique et militaire Louis Rossel, fusillé après la Commune en 1971. Mais, d’après l’enquête du Monde datant de 1985 et citée plus haut, cette p aternité a été contestée par un témoin revendiquant en avoir été le véritable auteur

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Il aurait occupé plusieurs postes administratifs dans le groupe familial avant de se consacrer uniquement à ses activités politiques dans les années 1970. 

Premiers financements

Au milieu des années 1970, il fait la connaissance de Jean-Marie Le Pen, lors d’une soirée, comme l’ont relaté plusieurs biographes. L’héritier apporte rapidement des subsides au mouvement de l’ancien député qui l’invite au comité central de son parti en tant que “conseiller militaire”. 

Ses dernières années sont marquées par des épisodes de dépression et une addiction à l’alcool. Des témoins évoquent un état mental chancelant, ce qu’a tenu à démentir son légataire après le décès de celui-ci. 

“Du sang sur les draps”

Hubert Lambert, alors âgé de 42 ans, atteint d’une cirrhose, aurait souffert de la rupture d’une varice oesophagienne dans la nuit du 24 au 25 septembre 1976,  (Le Parisien citant des extraits de Dans l’enfer de Montretout, Flammarion, O. Beaumont). Lorsque la famille Le Pen emménage sur place, quelques semaines plus tard, il y avait “dans l'ancienne chambre du défunt, [...]  du sang partout. [...]. “On a dormi le soir même dans cette chambre. Et, franchement, cela ne nous a posé aucun problème. Nous étions même très à l'aise”, aurait déclaré Jean-Marie Le Pen. 

Un héritage contesté

Dans le testament qu’il a rédigé neuf mois auparavant, Lambert lègue sa fortune à l’ancien militaire: un montant difficile à estimer de quelque 30 millions de Francs (4,5 millions d’euros) en avoirs financiers, ainsi que l’hôtel particulier de 430 m2 sur trois niveaux avec des dépendances et un parc de près de 5 hectares : Montretout . La famille du disparu, en particulier son cousin, intente un procès pour captation d’héritage, au motif notamment que Lambert “avait pour manie de distribuer à ses amis et parents des testaments successifs et contradictoires “, peut-on lire dans Le Monde daté du 13 octobre 1976. La bataille judiciaire se règle finalement à l’amiable. 

Pour Le Pen, c’est un tournant. "À partir de cet héritage, Jean-Marie Le Pen va faire de la politique comme il l'entend”, commente l’historienne et politologue Valérie Irgounet dans une émission pour France Inter. “Sans Lambert, pas de FN, sans Le Pen, pas de Lambert ”, aurait déclaré le conseiller de l’homme politique selon des propos rapportés par l’historienne selon laquelle les bureaux du parti d’extrême-droite à ses débuts “s'éclairaient à la bougie”. 

La fortune de Jean-Marie Le Pen lui a permis de poursuivre ses campagnes sans ressentir les contraintes financières qu’il avait connues jusqu’alors. Le fameux “héritage Lambert” fut le premier d’une série, d’autres venant accroître la richesse des Le Pen.