Terrorisme : le chiffre choc des mineurs mis en examen après un projet d'attaque antisémite

Publié par Elise Laurent
le 02/12/2025
Terrorisme
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Deux adolescents de 16 ans viennent d'être mis en examen et écroués pour un projet d'attaque à caractère antisémite, portant à 20 le nombre de mineurs poursuivis pour terrorisme en 2025.

Des profils presque dépourvus d’idéologie structurée mais fascinés par l’ultra-violence et happés par la propagande djihadiste. Deux adolescents de 16 et 17 ans, soupçonnés d’avoir envisagé une attaque antisémite, ont été arrêtés mercredi 26 novembre après un message glaçant diffusé dans un groupe WhatsApp. Dans ce dernier, baptisé “100”, l’un d’eux annonçait vouloir “tuer des Juifs dans cinq jours”, en visant explicitement un lieu de culte.

Selon Le Parisien, ce message était accompagné d’une photo où l’auteur posait un couteau à la main, dans une mise en scène évoquant un combattant de l’État islamique. Ces éléments, jugés suffisamment inquiétants, ont entraîné l’ouverture rapide d’une enquête antiterroriste. Présentés dimanche 30 novembre à un juge, les deux suspects ont été mis en examen pour “association de malfaiteurs terroriste criminelle” et écroués, conformément aux réquisitions du parquet national antiterroriste (PNAT). 

Un rajeunissement de la menace djihadiste

Le Parisien précise qu’ils deviennent ainsi les 19e et 20e mineurs poursuivis pour des faits de terrorisme depuis janvier, un chiffre inédit qui dépasse déjà le record de 2024. Pour les enquêteurs de la DGSI, cette tendance illustre un durcissement préoccupant de la menace djihadiste chez des jeunes en rupture sociale ou familiale.

Le premier mis en cause, âgé de 16 ans, est un adolescent russe d’origine tchétchène vivant à Strasbourg. Arrivé en France à l’âge de 12 ans pour fuir un père décrit comme violent, il souffrirait d’un isolement profond, amplifié depuis qu’il a abandonné sa scolarité en 2024. Il passait des heures à visionner des vidéos gores sans lien idéologique avant que cette fascination pour l’ultra-violence ne glisse vers la propagande de l’État islamique, qui l’a conduit à rejoindre le groupe WhatsApp radicalisé.

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Les enquêteurs se sont rapidement intéressés à un second adolescent, un Français de 17 ans résidant en région parisienne, avec lequel le jeune Tchétchène échangeait régulièrement. Selon les informations du média, ce lycéen en apprentissage, décrit comme un “gamer” ultra-connecté, aurait lui aussi formulé des messages antisémites et exprimé une adhésion croissante à une démarche violente. Son profil évoque, là encore, une radicalisation intégralement numérique, alimentée par des discussions exaltées en ligne.

Deux profils jeunes, isolés et happés par l’ultra-violence

Dans cette affaire, la DGSI redoute que les adolescents aient pu entrer dans une phase préparatoire, même rudimentaire. Les investigations devront déterminer si leur projet était concret ou s’il relevait d’une mise en scène terroriste fantasmée, un phénomène de plus en plus courant chez les très jeunes adeptes de Daech. Sollicités par le quotidien, les avocats des deux mineurs n’ont pas souhaité s’exprimer.

Ces interpellations s’inscrivent dans une tendance que les services antiterroristes qualifient d’ “extrêmement préoccupante”. Le procureur national antiterroriste, Olivier Christen, expliquait récemment dans Le Parisien – Aujourd’hui en France que “la propagande islamiste joue sur des cordes sensibles avec l’actualité politique : les références à la situation au Proche-Orient sont plus régulières et le discours antisémite plus marqué”. Depuis les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, la communauté juive figure parmi les cibles explicitement désignées par les organisations terroristes.

Une nouvelle génération radicalisée en ligne

Une note confidentielle de la DGSI publiée en septembre, citée par le quotidien, décrit une mouvance composée de jeunes “à la faible empreinte idéologique et fascinés par l’ultra-violence”. Ces adolescents, souvent isolés et livrés à eux-mêmes sur les réseaux sociaux, adhèrent davantage à l’esthétique violente de l’EI qu’à ses fondements doctrinaux. Leur radicalisation “endogène” les conduit pourtant à porter des projets d’attaques “en cohérence avec les préconisations de l’État islamique”, notamment contre des symboles de l’autorité ou des communautés jugées “hérétiques”.

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