Réforme des retraites : les signes attestant qu'elle sera bientôt de retourIllustrationIstock
La mère des réformes revient sur la table. "Priorité absolue" pour Bruno Le Maire, elle reste cependant vivement critiquée par l'opposition, et certains élus de la majorité. Cependant, le ministre insiste encore.
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"Les Français le savent", affirmait récemment le ministre de l'Economie : le système des retraites n'est tout simplement plus viable. Sur le plateau de BFMTV, dont les informations sont repris par Boursorama, il a défendu son analyse. Selon lui, il est grand temps de revoir en profondeur notre modèle de solidarités inter-générations.

Et, cela n'est plus un secret, de faire travailler davantage les Français.

Seulement, la pandémie vient mécaniquement ralentir le processus. C'est pourquoi le ministre est prêt à se montrer patient. Tant que les priorités ne sont pas perdues de vues... puisqu'il faudra amorcer la réforme "dès que la crise économique sera derrière nous". 

La France, souligne-t-il encore, est "le pays développé qui travaille le moins". Un constat qui a d'ores et déjà été nuancé par nombre d'experts mais, surtout, qui entre en contradiction directe avec les prétentions du pays à un modèle de protection sociale aussi généreux. "Ce n'est plus tenable", croit-il savoir. Tout cela "a un coût", poursuit-il, et "si on veut collectivement arriver à [le] payer sans ce que ça pèse sur les retraites des Français [...], il faut qu'on accepte tous ensemble de travailler davantage". Et lui de conclure : "Il faudra le moment venu qu'on retrouve des finances publiques qui soient saines".

Dès lors, les négociations reprennent. Laissé de côté depuis le début de la crise sanitaire, la réforme des retraites n’est pas abandonnée pour autant. Elle est d’ailleurs une "priorité absolue" pour le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, rapporte Capital.

Lors de la réunion du groupe LREM qui s’est tenue ce mardi 1ᵉʳ décembre à l’Assemblée nationale, le Premier ministre a indiqué que la mère des réformes sera parmi les chantiers des mois à venir, d’après un participant. Jean Castex semble vouloir différencier les volets paramétriques du volet systémique, soit distinguer l'équilibre des comptes du système universel de retraite, engagement présidentiel d’ici la fin du quinquennat. "Quand on met structurel (nouveau système par points) et paramétrique (réforme financière du système) ensemble, cela fait des courts-circuits", analyse d’ailleurs un ministre.

Toutefois, la mesure est toujours autant controversée.

Réforme des retraites : de fortes discordances au sein du gouvernement

Les réticences au sein du gouvernement, comme dans la majorité sont multiples. En témoignent les qualificatifs employés ce mardi 1ᵉʳ décembre 2020 à l’Assemblée nationale. Le projet est considéré comme "mort-né" et "indécent".

"La réforme des retraites est mort-née car ceux qui l'ont portée sont démonétisés", et "il y a trop de tension sociale", juge Damien Abad, patron des députés Les Républicains. Selon lui, elle ne sera pas relancée avant la présidentielle de 2022.

Pour le communiste Pierre Dharréville, il "serait profondément indécent de revenir à cette réforme de régression sociale". Le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger estime que cette réforme pourrait engendrer "une explosion sociale".

Invité sur BFMTV, le leader de la CFDT Laurent Berger juge que la réforme des retraites "n'est pas abordable en termes de mesures à prendre avant 2022". "Je le dis et je le re-répète, si en 2021, ce gouvernement envisage un allongement de la durée du travail pour l'ensemble des travailleurs en jouant sur l'âge, la durée de cotisation, etc., il ferait une erreur majeure", a-t-il ajouté avant de conclure : "Ce n'est pas du tout un sujet corrélé à la dette publique, la question des retraites c'est la dette sociale (...) elle est au liée au fait qu'il y a eu moins de rentrées cette année". 

Réforme des retraites : "L’angle budgétaire n’est pas la question"

"La priorité absolue, c'est de sortir de la crise sanitaire, économique, sociale, de protéger les emplois, c'est l'avis unanime des partenaires sociaux", indique de son côté Elisabeth Borne, la ministre du Travail. Le ministre chargé des Relations avec le Parlement Marc Fesneau, souhaite quant à lui une réforme "qui vise à avoir plus de justice" ; néanmoins, "l'angler sur la question budgétaire ne (lui) paraît à ce stade pas la question".

Qu’en sera-t-il alors ?

Retraites : "On ne peut pas donner le sentiment que la réforme doit s'interrompre"

Bien qu’elle doute "en ce moment" de son côté indispensable, la porte-parole de LREM Aurore Bergé pense qu’"on ne peut pas donner le sentiment que la réforme doit s'interrompre parce qu'il y a une crise sanitaire". Stanislas Guerini, patron de LREM, entend aussi "avancer d'ici la fin du quinquennat" sur ce "chantier essentiel". Ce n'est pas "parce que cette réforme va faire polémique" qu'il "faut l'écarter de la table", car elle "touche au quotidien des gens", rappelle le député LREM Bruno Bonnell.

Une chose est sûre, le report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 63 ans ne permettra pas de redresser les comptes sociaux. Adopté lundi 30 novembre par le Parlement, le budget définitif de la Sécurité sociale, a en effet mis fin à cette idée adoptée par les sénateurs.