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Parmi les survivants de la Shoah, Denise Holstein détenait une mémoire ô combien précieuse. Celle des enfants massacrés. Désormais, ces souvenirs-là n'existeront plus que dans les paroles et les textes qu’elle a laissés derrière elle.
Celle qui fut l’une des dernières rescapées des camps d’Auschwitz-Birkenau et de Bergen-Belsen s’est éteinte à l’âge de 97 ans, à Antibes, le 16 novembre 2024. Restée longtemps discrète sur son terrible passé, elle s’en est peu à peu ouverte à partir des années 1990, jusqu’à transmettre son histoire aux plus jeunes générations. En voici les grandes lignes.
Une jeunesse Normande
Denise Holstein est née le 6 février 1927 à Rouen. “Son père, Bernard Holstein, ancien combattant des deux guerres et officier de réserve, est chirurgien-dentiste (...)”peut-on lire dans l’article que lui a consacré le Cercle d’étude de la déportation et de la Shoah (une association d’anciens déportés). Il est d’origine lituanienne. Sa mère, Juliette Holstein, a pour sa part “suivi des études de physique-chimie”. Elle est mère au foyer, et supervise l’éducation de Denise et de son frère, Jean. La famille Holstein ne se rend à la synagogue que pour les grandes occasions. En mai 1940, les Holstein suivent, à l’instar de millions de Français, le chemin de l’Exode, en direction d’Avignon. Ils rentrent à Rouen en octobre de la même année.
La Rafle de Rouen
En janvier 1943, la police de Rouen organise la dernière d’une série de rafles visant les Juifs dans l’agglomération normande, comme l’a documenté notamment l'historienne Françoise Bottois. Denise Holstein, alors âgée de 16 ans, ainsi que ses parents font partie des personnes arrêtées. Ils sont envoyés vers le camp de Drancy. “Le 6 février 1943, c’est dans ce camp que j’ai eu 16 ans. Ce jour-là, mon père m’a dit : je ne sais pas où nous serons pour tes 17 ans mais je te promets, pour tes 18 ans tu auras une belle fête”, racontait la survivante dans une interview publiée sur le site de sa ville, Juan-les-Pins, en 2017.
Denise, atteinte de diphtérie, parvient à quitter le camp grâce aux relations familiales. Son père Bernard et sa mère, Juliette, sont déportés le 20 novembre 1943 vers Auschwitz où ils sont tués dès leur arrivée.
Auprès des enfants juifs
Quelques mois après sa sortie de Drancy, Denise Holstein devient aide-monitrice pour des enfants juifs orphelins pris en charge par l’Union Générale des Israélites de France (UGIF), l’une des principales organisations juives d’alors. Elle les suit dans une maison située à Louveciennes (située dans le département actuel des Yvelines). C’est là qu’elle apprend par l’une de ses grands-mères que ses parents ont été déportés.
“Les enfants dont j’avais la charge avaient environ 5-6 ans et je passais mes journées à les faire jouer“, raconte-t-elle dans l’un de ses témoignages. Elle dit encore :
“ Je n’ai plus qu’une idée en tête : leur donner le maximum de tendresse, tout en essayant de me faire écouter. “
Le 22 juillet 1944, plus d’un mois après le débarquement de Normandie, c’est l’orphelinat de Louveciennes qui est raflé et envoyé à Drancy. Denise Holstein raconte :
“Des internées nous proposent leur aide, mais les plus petits sont perdus. Ils s’accrochent plus que jamais à nous, je n’ai plus une minute à moi : il faut les rassurer, les faire manger, les laver, les coucher. Je n’ai pas le temps de m’inquiéter, il y a tant à faire.”
Le convoi 77
Quelques jours plus tard, 31 juillet 1944, Denise et les enfants dont elle prend soin depuis des mois sont conduits à la gare de Bobigny puis entassés dans le convoi 77 en direction d’Auschwitz-Birkenau. Alois Brunner, commandant du camp de Drancy, qui a supervisé des rafles en France et dans d’autres pays, supervise l’opération.
“Nous étions 48 enfants et 12 grandes personnes. Je suis la seule monitrice que les enfants connaissent. Tout de suite, les pleurs commencent, ils ont peur. J’essaie de les faire asseoir et de les calmer mais on verrouille les portes et de suite nous sommes dans le noir. Peu de temps après, le train s’ébranle et le calvaire commence, les petits ont peur, ils ont soif, ils ont chaud (…)”, raconte la survivante dans un témoignage DVD cité par le Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah.
Au journal d’Antibes notamment, l’ancienne monitrice avait également raconté son arrivée dans le camp polonais trois jours plus tard:
“On entendait des hurlements en allemand, des chiens aboyaient, nous ne savions pas où nous allions. Sur le quai, c’était l’horreur. Un Français en treillis m’a vu tenir la main d’une petite fille. Il m’a intimé l’ordre de lâcher l’enfant et de partir sur la gauche… À droite c’était la chambre à gaz. Il m’a sauvé la vie…”
Le souvenir glaçant de Joseph Mengele
Aucun enfant qui était parti avec elle n’a survécu dans le camp de concentration et d’extermination. Denise Holstein, qui n’est alors qu’une adolescente, aurait croisé Joseph Mengele, “médecin” nazi à l’effroyable réputation qui faisait des expériences sur les prisonniers. Elle n’en fait pas partie, mais dit avoir gardé à jamais en mémoire le “timbre glacial de sa voix” lorsqu’il prononça son nom. En décembre 1944, Denise Holstein est déplacée dans un autre camp, à Bergen-Belsen, où elle survit du froid, de la faim, du typhus, à même le sol.
Le retour à la vie
Quand elle est libérée le dimanche 15 avril 1945, elle pèse 35 kg. A la fin du mois de mai 1945, elle est rapatriée vers la France. En juillet, elle écrit un texte qui ne sera publié qu’en 2008 par la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, le “Manuscrit de Cayeux (qui contient également des entretiens avec des historiens)”
Deux ans plus tard, alors âgée de 20 ans, elle se marie. Elle perd un premier enfant puis devient mère de deux filles.
“Je ne vous oublierai jamais, mes enfant d’Auschwitz”
Des décennies plus tard, en 1995, Denise Holstein publie un premier livre de témoignage: Je ne vous oublierai jamais, mes enfants d’Auschwitz, (Edition1) avec Gilles Plazy.
Et puis elle se rend dans les écoles des académies de Rouen, et de Nice notamment, pour transmettre son histoire aux collégiens et lycéens. En 2020, l’un d’entre eux,Baptiste Antignani, immortalise leurs échanges dans un film, diffusé sur Canal+: “Une vie nous sépare”.