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"Les fleurs et les bougies n'ont jamais gagné une guerre", balaie simplement François-Xavier Bellamy, dans les colonnes du Figaro du 19 octobre 2020. Le député européen, qui conduisait la liste des Républicains (LR) aux élections européennes de 2019, évoque évidemment les réactions qui ont fait suite à l'assasinat brutal de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie d'un collège de Conflans-Saint-Honorine, dans les Yvelines. Il a été tué par Abdoullakh Anzorov, un ressortissant Russe tchéchène de 18 ans, qui l'a décapité pour avoir montré des caricatures de Mahomet, initialement publiées par Charlie Hebdo durant l'un de ses cours d'enseignement moral et civique. Plusieurs hommages ont suivi la découverte de son corps, dont certains rassemblements, comme à Paris.
Pour François-Xavier Bellamy, rien de tout cela ne saurait suffire. D'autant plus qu'à ses yeux, "l'accusation d'islamophobie rétablit le délit de blasphème", comme il l'explique au Point. Un discours qui diffère largement de celui que l'on entendait au lendemain du Bataclan ; et qu'il n'est pas le seul à tenir : c'est aussi le cas de Bruno Retailleau, par exemple, qui n'a pas souhaité se rendre aux rassemblements et s'attaque aussi aux "fleurs" et aux "bougies". D'une façon générale, souligne Le Dauphiné Libéré, l'heure n'est plus à l'union nationale.
Pas besoin de fleurs et de bougies : l'union nationale enterrée ?
Pour le politologue Raul Magni-Berton, qui enseigne les sciences politiques à l'IEP (Institut d'Etudes Politique) de Grenoble, cette réaction n'a rien de si étonnant, en vérité. "C'est le propre de la droite de monter au créneau sur les thématiques sécuritaires. En intervenant de la sorte, elle endosse l'un de ses costumes les plus classiques", note le chercheur. "La droite a toujours critiqué tout ce qui était à sa gauche, d'un point de vue sécuritaire. Il était évident qu'elle prendrait la parole sur un phénomène aussi horrible et aussi médiatique", détaille-t-il encore.
De là à y voir une volonté de récupération, il n'y a qu'un pas. Que l'expert n'hésite pas à faire.
La droite est-elle coupable de récupération ?
"Je ne serais pas aujourd'hui place de la Républicain. Comme tous les républicains, j'ai dans le coeur #SamuelPaty. Comme tous les patriotes, je veux combattre la barbarie qui ensanglante une nouvelle fois notre pays", écrivait par exemple Bruno Retailleau, sur twitter, le 18 octobre 2020. Avant d'enchaîner plus durement, souligne France 3 : "Je suis un responsable public. Et ce qu'attendent les Français de leur République aujourd'hui, ce sont des armes et non des larmes", déclare-t-il encore. Un vocabulaire guerrier, politique, que d'aucuns pourraient voir comme une tentative de capitaliser sur la tragédie.
"Evidemment, la droite récupère l'assassinat de Samuel Paty. Mais il ne faut pas se leurrer, elle n'est pas la seule : ils le font tous. Si la droite est plus audible que les autres, c'est parce qu'elle a plus de billes en la matière", assène sans ambages Raul Magni-Berton. "La gauche pourra toujours dire qu'elle sera dure, elle est rarement prise au sérieux parce qu'elle manque de crédibilité sur ce sujet : c'est la droite qui est propriétaire de cet enjeu", poursuit-il.
"De facto, les propos de Bruno Retailleau ou de François-Xavier Bellamy ont une visée politique. D'une façon générale, la droite vise à engager un durcissement des politiques anti-criminalité, au moins celle à motivation islamiste, et anti-terrorisme. La surprise est ailleurs", note l'enseignant qui s'étonne moins de l'émergence d'un tel discours à droite que du reste. Mais quel reste, exactement ?
Terrorisme : la gauche s'est-elle laissée canibaliser ?
"Cette affaire - et bien d'autres avant elle - ont cela d'effarant qu'elles génèrent une unanimité quasi totale dans la presse et dans le débat politique. Ce qui me surprend, c'est précisément qu'il n'y a plus de débat", assène d'entrée de jeu Raul Magni-Berton, qui s'étonne de l'absence de diagnostics différents. "Force est de constater que, en matière de sécurité, la droite semble avoir gagné la bataille : c'est elle qui impose sa grille de lecture et c'est la gauche qui suit aujourd'hui. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que la gauche est souvent responsable des mesures les plus dures à ce sujet", analyse le chercheur.
Pour autant, l'enseignant en sciences politique souligne aussi qu'à court terme, le gouvernement "profitera" sans doute davantage de la crise que la droite. "On l'a encore vu récemment avec la CoVid. Parce que c'est l'exécutif qui peut réagir, c'est lui qui engrange les premiers points. Jusqu'au moment où il faut faire les diagnostics : de là, chaque parti compose son récit et, aujourd'hui, c'est celui de la droite auxquels les Français semblent le plus sensible", poursuit en effet l'instituteur.
Terrorisme : de l'utilité des fleurs et des bougies
Pourtant, cela ne signifie pas que le récit de la gauche soit mécaniquement désuet ; pas plus que les "fleurs" et les "bougies" que critiquent avec tant d'assiduité ces responsables politiques. "Partir du principe que les fleurs et les bougies n'ont pas d'utilité, c'est mal comprendre les motivations d'un acte terroriste", commence le chercheur, qui tient tout de même à rappeler que l'assassinat de Samuel Paty relève selon lui davantage de la "criminalité islamique" que du terrorisme à proprement parler, puisque le tueur n'a à priori pas bénéficié du soutien d'un groupe comparable à l'Etat Islamique ou Al Qaeda, par exemple.
"Tout acte terroriste vise à décourager un pays de continuer son action en extérieur. En cela, toute tentative de faire bloc au sein de la population est légitime, puisque l'objectif premier des terroristes et de créer la scission. Unir la population, autour de fleurs ou de bougies en l'occurrence, permet de limiter ce risque", explique-t-il.