IllustrationIstock
Cela fait plusieurs années que l'absentéisme progresse en France. Toutefois, il ne touche pas tous les salariés de la même façon…
Sommaire

Progression de l’absentéisme en France : quelle est l’ampleur de la fraude ?

Pour la troisième année consécutive, l’absentéisme croit en France. En 2017, il s’inscrit à 4,72%, indique le dixième baromètre du groupe de conseil Ayming. En 2016, il était de 4,59%. Concrètement, cela signifie qu’en moyenne, les salariés français sont absent 17,2 jours par an.

A lire aussi : Congés, temps de travail... Est-ce vraiment en France que l'on travaille le moins ?

"Ces absences s’expliquent de plusieurs façons mais très peu par la fraude", juge Philippe Crevel, macroéconomiste et directeur du Cercle de l’Epargne. "Elle est très minoritaire puisqu’elle ne concerne que 1 à 5% des salariés absents. Naturellement, sur un an, c’est un chiffre susceptible de faire une différence pour une entreprise. Mais il est très important de ne pas complexer les salariés qui prennent des arrêts maladies. Les réalités sanitaires existent", assure-t-il.

Progression de l’absentéisme en France : si ce n’est pas la fraude, quelles sont les vraies raisons ?

Selon lui, cette hausse de l’absentéisme trouve ses racines dans le vieillissement de la population active. "D’un côté les baby boomers, qui composent un pan considérable de la population active aujourd’hui vieillissent. D’un autre, l’âge de la retraite a été plusieurs fois reporté. Forcément, la population active se fait plus vieille. Et mécaniquement, cela implique davantage d’arrêts maladies de longue durée", explique l’économiste. En effet, le taux d’absentéisme grimpe, passé 55 ans. En 2017, il s’établit à 7,11%. D’après l’enquête, les salariés les plus âgés ne sont pas nécessairement plus souvent absents, mais ils le sont souvent plus longtemps. "Les ainés sont plus vieux au travail qu’il y a 20 ans", indiquent les auteurs du rapport, qui n’hésitent pas à les décrire comme "plus fragiles".

Autre explication pointée du doigt par le directeur du cercle de l’épargne : les conditions de travail. "Il est indéniable qu’il existe, en France, une certaine forme de mal-être au travail. Elle est susceptible d’entraîner des burn-out. C’est l’une des conséquences néfaste de la réduction du temps de travail : on a constaté qu’après la mise en place des 35h, de nombreuses entreprises ont revu leur modèle de production pour produire autant en moins de temps. De facto, cela a entraîné une hausse de la pression sur les travailleurs", poursuit-il.

Toutefois, sans parler de fraude, il existe parfois des arrangements entre les services RH et les salariés, qui se font "au détriment du bien commun". "Passé un certain âge, il arrive que certaines entreprises proposent à leurs salariés de se mettre en arrêt maladie pour une longue période plutôt que de les licencier", détaille l’économiste.

Progression de l’absentéisme en France : qui sont les Français les plus absents ?

En moyenne, souligne l’étude qui se base sur plus de 1,8 million de salariés, les femmes sont plus souvent absente que les hommes. Les auteurs mettent en cause les postes qu’elles sont amenées à occuper, souvent "générateurs de problèmes de santé plus importants". Ils pointent également du doigt les inégalités qui persistent dans la répartition taches domestiques. "En dépit des évolutions sociétales, les femmes gèrent toujours plus de charges domestiques", souligne l’enquête, non sans rappeler qu’elles sont "plus en situation monoparentale que les hommes" et donc souvent "moins reposées, davantage exposées". "Leur santé est fragilisée et leur guérison plus difficile", concluent les auteurs.

En pratique, certains secteurs d’activité sont également plus touchés que d’autres. "L’absentéisme est en progression dans la fonction publique hospitalière, mais aussi dans les secteurs du BTP, de l’hôtellerie, ou au sein de l’éducation nationale, par exemple", indique Philippe Crevel.