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L'enquête avait été classée sans suite le 22 août 2019. Alexis Kohler, secrétaire général de l'Elysée, ne risquait donc plus d'être inquiété par le parquet national financier (PNF), qui le soupçonnait de conflits d'intérêts. C'est "la publication de plusieurs articles de presse" à ce propos, qui avait alerté la justice. Ils soulignaient à l'époque ses liens familiaux avec l'armateur italo-suisse MSC, lesquels entraient en conflits direct avec ses anciens postes dans la haute fonction publique, d'après Mediapart.
Mais, "après un an d'enquête, l'analyse des éléments recueillis par la brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) de la direction générale de la police judiciaire ne permet pas de caractériser les infractions initialement suspectées", a expliqué le PNF.
Une décision qui a de quoi surprendre. Suffisamment pour que Mediapart continue à enquêter, rapporte le Huffington Post. Et le site d'investigation estime aujourd'hui avoir découvert de nouveaux éléments à charge. Cette fois, c'est une lettre qui interpelle Martine Orange, journaliste et autrice de plusieurs ouvrages d'enquête. "L'affaire Kohler a été classée après une lettre d'Emmanuel Macron", écrit-elle. Cette missive aurait été transférée au PNF le 1er juillet dernier. De quoi démontrer, donc, l'intervention directe du président de la République "dans une procédure judiciaire individuelle", sans le moindre respect pour "la séparation des pouvoirs".
Que dit la lettre d'Emmanuel Macron ?
Le pli, rédigé à la main, vise à "absoudre Alexis Kohler des chefs d'inculpation dont il fait l'objet", croit savoir le député La France Insoumise Ugo Bernalicis. Il a d'ailleurs questionné Nicole Belloubet à ce sujet, mais la garde des Sceaux a "botté en touche sur le fond de l'affaire", note le HuffPost.
Dans le détail, Emmanuel macron affirme avoir toujours eu connaissance des liens entre Alexis Kohler et MSC, même lorsqu'il n'était "que" ministre de l'Economie et que le secrétaire général de l'Elysée n'était "que" son directeur de cabinet. Il déclare aussi que ce dernier lui aurait formellement "remis un courrier demandant à ne jamais avoir à traiter des dossiers et questions concernant ce dossier".
La lettre d'Emmanuel Macron a-t-elle eu un impact ?
Pour Mediapart, pas de doute : ce pli a drastiquement changé la tournure de l'affaire. En effet, l'attestation signée de la main d'Emmanuel Macron a été envoyée au moment où un premier rapport d'enquête "totalement accablant pour Alexis Kohler" était publié. Un second rapport, définitif cette fois, l'a ensuite remplacé.
"Il a été réduit d'une bonne dizaine de pages : tous les faits dérangeants contre Alexis Kohler ont été expurgés", écrit le journal d'investigation.
Mediapart n'est pas le seul à s'inquiéter d'un tel conflit d'intérêt
Le journal d'investigation n'est pas le seul acteur à s'inquiéter de l'indépendance de la justice, dans cette affaire. En effet, la commission d'enquête parlementaire interrogeait l'association Anticor - qui travaille sur la corruption des élites - dit soupçonner des "tentatives d'immixtions dans l'affaire Alexis Kohler", note le Huffington Post.
Et l'association de pointer du doigt, en outre, que le classement sans suite est survenu entre le départ d'Eliane Houlette, le 30 juin 2019, et l'arrivée de son successeur Jean-Jacques Bohnert, le 9 octobre 2019.