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Le vainqueur du Prix Goncourt du premier roman, Kamel Daoud, a dénoncé dans une tribune le rôle ambigu de la monarchie arabe. Mais pourquoi ? Eléments de réponse.

Dans une tribune publiée le 20 novembre dans le New York Times, Kamel Daoud, vainqueur du Prix Goncourt du premier roman 2015, s’interroge sur le rôle de l’Arabie Saoudite dans la naissance de l’Etat islamique.

"Daesh noir, Daesh blanc. Le premier égorge, tue, lapide, coupe les mains, détruit le patrimoine de l’humanité, et déteste l’archéologie, la femme et l’étranger non musulman. Le second est mieux habillé et plus propre, mais il fait la même chose. L’Etat islamique et l’Arabie saoudite." Mais Kamel Daoud va plus loin, expliquant : "Daech a une mère : l’invasion de l’Irak. Mais il a aussi un père : l’Arabie saoudite et son industrie idéologique. Si l’intervention occidentale a donné des raisons aux désespérés dans le monde arabe, le royaume saoudien leur a donné croyances et convictions."

L’écrivain n’est pas le seul à pointer du doigt le rôle de l’Arabie saoudite. Marine Le Pen, ou encore Bruno Le Maire ont fait part de leur inquiétude, ajoutant le Qatar à la liste des pays suspects qui sont pourtant alliés de la France.

L’idéologie de Daesh est née en Arabie saoudite

Les deux points qui interrogent sur le rôle ambigu du royaume arabe concernent deux phases : la naissance et l’expansion de Daesh. Pour expliquer la création de l’Etat islamique, il y a d’une part les conséquences de l’intervention et du retrait de l’armée américaine en Irak, mais aussi l’idéologie qui sous-tend l’organisation terroriste. Or, cette idéologie trouve racine dans le wahhabisme, fondé au XVIIIe siècle, en Arabie saoudite. Il s’agit d’une doctrine, dont le salafisme en est issu, et dont le but est de revenir à un islam traditionnel - pour ne pas dire rigoriste - du temps du prophète Mahomet. " Le wahhabisme a l’idée de restaurer un califat fantasmé autour d’un désert, un livre sacré et deux lieux saints, la Mecque et Médine.", écrit ainsi Kamel Daoud

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Le second point concerne l’expansion de l’Etat islamique et tout particulièrement son financement. Si aucune preuve irréfutable n’a pour l’instant été mise sur la table, de forts soupçons pèsent à l’encontre du royaume arabe. Ainsi, selon les autorités irakiennes chassées par Daesh, l’organisation terroriste aurait reçu des dons de la part de l’Arabie saoudite et du Qatar au tout début de leur expansion, relate Les Echos.

Le royaume veut décapiter 50 terroristes

Du côté de l’Arabie saoudite, on se défend bien sûr de tout lien avec l’Etat islamique, comme le rappelle le Washington Post. Pour cela, Riyad compte faire des exemples : le ministre de la Justice envisage de poursuivre un internaute qui aurait, dans un tweet, suggéré que la peine de mort infligée à un jeune poète par le gouvernement pour apostasie était semblable aux méthodes de Daech. Et pour montrer que l’Arabie saoudite n’a rien à voir avec Daesh, le royaume (dont le droit est fondé sur le charia) projetterait, selon Okaz (organe du ministère de l’Intérieur saoudien), de décapiter 50 terroristes saoudiens pour "montrer l’exemple"…

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