Retraite : votre jolie carrière va vous coûter cherIllustrationIstock
Fonctionnaires, cadres… La réforme des retraites pourrait faire de nombreux perdants. Pire ! Plus le temps passe, plus leur nombre semble croître. Une récente étude pointe désormais du doigt les risques qui existent pour les salariés du privé ayant fait une belle carrière.
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Réforme des retraites : vaut-il mieux avoir fait une mauvaise carrière ?

"Ce système va créer une redistribution des carrières dynamiques vers les carrières déclinantes", assène dans son étude Vincent Touzé, économiste. Avec d’autres chercheurs issus de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), il est revenu sur le récent rapport relatif à la réforme des retraites et rendu par Jean-Paul Delevoye. Selon lui, le système que l’exécutif entend mettre en place pourrait s’avérer très préjudiciable pour certains salariés du privé : celles et ceux dont le parcours professionnel est dit "ascendant". Concrètement, il s’agit des employé(e)s ayant bénéficié d’une augmentation de salaire constante et dans la moyenne (+ 1,4% par an) ou supérieure (+ 1,9% par an). Ce sont ces individus qui, selon le rapport de l’OFCE, pourraient perdre beaucoup au détriment des autres, passée la réforme, rapporte Capital.

Est-ce à dire qu’il vaut mieux avoir faire une mauvaise carrière ? Dans le détail, un actif ayant perçu 18 ans durant un salaire égal à 600 fois le smic horaire brut - "soit le nombre minimum pour valider une année complète" pour la retraite, précise l’étude - pourrait perdre jusqu’à 15 points par rapport au régime universel actuel. Sous réserve, bien sûr, que pendant ses 25 meilleures années ses émoluments correspondent à un des paliers de la Sécurité sociale.

En pratique, les carrières jugées les plus dynamiques pourraient donc être sacrifiées pour permettre de soutenir davantage les Françaises et les Français dont le parcours professionnel n’a pas été aussi profitable. Un actif qui n’a jamais atteint le plafond mais a toujours stagné aux alentours de 90% bénéficierait donc davantage de la mesure que celui ou celle qui, partant de 80% du palier, atteint finalement les 100% en fin d’activité.

Réforme des retraites : les belles carrières, dangereusement pénalisées par le passage aux points ?

Autre danger, alerte Capital : le passage aux points. Ce dernier pourrait sérieusement grever les pensions de ces salariés aux carrières dites "ascendantes". Parce que la valeur du point sera nécessairement sujette à fluctuation, et qu’elle évoluera mécaniquement moins rapidement que ne peuvent le faire les salaires, ces Françaises et ces Français aux parcours professionnel dynamique accuseront nécessairement la différence. Les points acquis à la sueur du front ne profiteront pas de la même revalorisation que leurs rémunérations… Une situation qui s’inverse cependant pour les carrières dites déclinantes : parce que leurs émoluments sont moins forts, et surtout progressent moins vite,  le point sera davantage revalorisé, indique le magazine.

Par ailleurs, le mode de transition finalement retenu par le gouvernement ne sera pas sans incident sur le niveau de pension de ces contribuables. Le scénario qui leur est le plus favorable consiste à conserver les droits acquis dans le précédent système et à proratiser le résultat. Toutes celles et ceux dont l’essentiel de la carrière a eu lieu avant 2025 pourrait donc miser plus longtemps sur les règles actuellement en vigueur. Dans le cas inverse, en revanche, les droits acquis au cours de carrières dynamiques risquent de nouveau une sous-évaluation, pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment.

Retraite : d’une façon générale, une réforme qui fait plus de perdants que de gagnants ?

L’exécutif a eu beau promettre une réforme des retraites pratiquement sans perdants, de nombreux rapports - et de plus nombreux économistes encore - n’hésitent pas à pointer du doigt les catégorie de population pour qui la transition risque d’être douloureuse. Récemment, une étude parlait même d’"entourloupe" pour désigner le rapport Delevoye.

Selon ces économistes, qui se revendiquent d’un collectif "citoyen" dont Le Parisien se fait l’écho, tous les Français seraient d’ailleurs perdants. Ils prennent l’exemple de trois cas types, tous issus des "données du Conseil d’Orientation des Retraites" et tirent la conclusion suivante : "pour avoir la même pension que leurs parents, [les] enfants devront partir plus tard". Pour un employé au SMIC, il faudra parfois cotiser 3 ans et demi de plus. Pour beaucoup, même, les nouvelles pensions devraient être "synonyme de déclassement", alertent-ils.