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Ces 6 crimes prescrits ne seront probablement jamais jugés
Dans le droit français, la prescription en matière de crimes est de 20 ans. Parfois, ce délai a joué en faveur des coupables, qui ont réussi à échapper à la condamnation… Découvrez ces affaires où la justice ne sera probablement jamais rendue.

Aujourd’hui, de nombreuses affaires et divers scandales posent la question de la prescription pénale en France.

En juin dernier, plusieurs femmes décident de briser le silence en accusant l’ancien animateur Patrick Poivre d’Avror de viol et d’agressions sexuelles. Mais dans un premier temps, leurs plaintes ont été classées par la justice. La raison : les faits qu’elles décrivent sont prescrits.

La prescription est un concept juridique qui prévoit un délai au-delà duquel l’auteur d’une infraction ou d’un crime ne peut plus être poursuivi, ou jugé. Dans certains pays, comme aux Etats-Unis cette notion n’existe pas juridiquement : tous les crimes sont alors imprescriptibles dans le temps.

Des crimes dénoncés sur le tard impossibles à juger

En France, la prescription est inscrite depuis 1791 dans le code pénal. Depuis 2018, elle s’étend à 20 ans pour les meurtres et les viols, et à 30 ans lorsqu’ils sont commis sur des mineurs. Seuls les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles dans le droit français.

Si ce délai soulève de nombreuses interrogations et provoque parfois l’indignation des victimes, c’est qu’il permet parfois aux coupables d’échapper tout simplement à la justice, notamment dans le cas de violences sexuelles, qui sont souvent dénoncées sur le tard par les victimes.

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L’affaire PPDA n’est pas un cas isolé : Nicolas Hulot, accusé de viols par plusieurs femmes, et Olivier Duhamel, qui aurait abusé de son beau-fils, ont eux aussi « profité » de la prescription des faits qui leur étaient reprochés, et s’en sortent sans aucune condamnation.

Certaines affaires rouvertes malgré la prescription

Heureusement, dans certains cas, et malgré la prescription des affaires, la justice peut décider exceptionnellement de rouvrir certaines enquêtes. Ce fut le cas pur plusieurs des victimes de Michel Fourniret, lorsque le tueur a été arrêté en 2002. Ou encore, plus récemment, pour l’affaire Françoise Hohmann, la première victime présumée de Jean-Marc Reiser, disparue en 1987.

Lorsqu’un nouvel élément troublant refait surface, parfois même des dizaines d’années après un crime, il est courant que la justice ordonne la réouverture d’une enquête.

D’autres « cold cases », bien qu’ils se soient déroulés il y a plus de 30 ans, ne sont pour autant pas prescrits. Car même s’ils demeurent non élucidés, l’enquête, dans leur cas, se poursuit toujours.

Au contraire, de nombreuses affaires « oubliées » ont été classées en raison de la prescription des faits, ou n’ont même pas été investiguées, malgré la violence de certains crimes. Découvrez 6 des ces histoires.

Le père Preynat

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Le père Preynat

L’affaire du père Preynat a défrayé la chronique pendant plusieurs années et a largement alimenté le débat sur la prescription. 

En 2015, plusieurs hommes portent plainte contre Bernard Preynat, prête au sein de l’archidiocèse de Lyon. Ils accusent l’homme d’église d’avoir abusé d’eux à de nombreuses reprises entre 1972 et 1991. S’ensuit un véritable combat judiciaire, à la fois avec la justice pénale mais également avec le Diocèse lui-même.

Des dizaines de victimes

Au fil des mois, d’autres hommes témoignent des viols et des agressions que leur aurait fait subi le prêtre, et la liste des victimes présumées du curé s’allonge de façon spectaculaire. Au total, Bernard Preynat aurait abusé de plusieurs dizaines d’enfants pendant quatre décennies. Mais la plupart de ces faits sont prescrits.

En 2020, le père Preynat est condamné à 5 ans d’emprisonnement pour des agressions sexuelles qui n’étaient prescrites, et qui concernent 9 victimes. Il ne sera jamais jugé pour le reste. 
En 2021, 14 victimes de l’ancien ecclésiastique pour lesquelles les faits étaient prescrits ont été indemnisées par l’État. 

L'affaire Mohammed Abdelhadi

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L'affaire Mohammed Abdelhadi

Le 10 décembre 2001, Mohammed Abdelhadi, 29 ans, disparaît dans les environs de Villefranche-sur-Saône. Sa famille s’inquiète : Mohammed n’est pas du genre à prendre la fuite. Mais comme il est majeur, les services de police ne prennent pas l’affaire au sérieux.

Les proches de Mohammed vont alors mener l’enquête seuls, pendant près de 15 ans. En 2008, persuadés que Mohammed a été tué, ils portent plainte. Mais rien n’est fait pas les enquêteurs pour retrouver le jeune homme.

En 2015, un rebondissement inattendu survient : une femme se présente à la gendarmerie. Elle raconte que son petit-ami ainsi que le frère et le père de celui-ci seraient à l’origine de la mort de Mohamed. Interpellés, Philippe, 61 ans, et ses deux fils de 31 et 36 ans, avouent avoir tué Mohammed dans la nuit du 9 décembre 2001 avant de cacher son corps. 

Les meurtriers ne seront jamais jugés à cause d’une banale erreur

Mais après la recherche de la vérité, une nouvelle bataille judiciaire commence pour la famille de Mohammed. Car à cause d’un papier perdu, les responsables de cet odieux crime ne seront jamais jugés. La plainte déposée par la famille de Mohamed en 2008 serait en effet introuvable dans les archives de la Justice, ce qui rend l’affaire caduque. La cour de cassation a confirmé la prescription du meurtre de Mohammed en 2019 : il n’y a désormais plus aucun recours. La famille a déposé une requête auprès de la Cour Européenne des droits de l'Homme, espérant une condamnation de l'Etat Français pour ces manquements.

Le calvaire de Françoise

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Le calvaire de Françoise

Le 16 janvier 1967, à Chevilly-Larue, en Seine-et-Marne, la jeune Françoise Pernin, âgée de 15 ans, est retrouvée sans vie, dans un fossé, quelques jours après que sa famille ait signalé sa disparition.

Elle a été violée.

Très vite, les enquêteurs enchainent les auditions pour tenter de retrouver le meurtrier de la jeune fille. Deux personnes vont alors raconter avoir croisé Françoise, le soir de sa disparition, sur une mobylette rouge en compagnie d’un inconnu. Mais ce mystérieux suspect ne sera jamais retrouvé et appréhendé. Les faits seront finalement prescrits.

L'affaire de Bruay-en-Artois

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L'affaire de Bruay-en-Artois

Le 6 avril 1976, à Bruay-en-Artois, dans le Pas-de-Calais, le corps mutilé de Brigitte Dewèvre, une fille d’ouvriers 15 ans, est découvert par des enfants dans un terrain vague.

La jeune fille a été étranglée et blessée à la tête par un objet coupant.

Les soupçons se tournent d’abord vers Pierre Leroy, un riche notaire de la commune dont la voiture aurait été aperçue près des lieux du drame. Il est inculpé, mais faute de preuves, la piste est abandonnée.

Le crime est finalement prescrit en 2004.

Récemment, Daniel Bourdon, un ancien policier de la région, a pourtant assuré qu’il avait identifié le tueur de Brigitte, au gré de ses recherches personnelles. Une octogénaire vivant dans le Sud de la France lui aurait en effet que son ancien mari qui était facteur à Bruay lui avait avoué le meurtre de l’adolescente à l’époque.Ils avaient alors quitté précipitamment la région. Mais pour l’instant, aucune nouvelle enquête n’a été ordonné par la justice.

Les disparus de Fontainebleau

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Les disparus de Fontainebleau

Le 31 octobre 1988, Gilles Naudet et Anne-Sophie Vandamme, un jeune couple de 25 ans, et leur chien Dundee disparaissent alors qu’ils étaient partis se balader dans la vaste forêt de Fontainebleau, en région parisienne. 

Ce n’est que deux mois plus tard, le 10 janvier 1989, que leurs corps seront retrouvés sans vie, dissimulés sous des branchages. 

Ils ont été abattus de plusieurs balles, provenant de deux armes distinctes. Mais surtout, l’état de leurs dépouilles, peu endommagées, interroge. Selon les enquêteurs, le corps des deux amis et le cadavre du chien auraient pu été conservés ailleurs pendant des semaines, avant d’être finalement déposés dans la forêt, quelques jours avant leur découverte. 

L'oeuvre de braconniers ?

En 1999, les gendarmes reçoivent un curieux appel qui les pousse à suspecter trois braconniers, dont un jeune homme de 27 ans, qui était mineur au moment du double meurtre. Interpellé, ce dernier avoue le crime. Mais il se rétracte peu de temps après, et bénéficie d’un acquittement de la justice en 2001. Il n’y a pas assez de preuves.

L’affaire est finalement prescrite en 2011, sans que l’on ne sache ce qui est vraiment arrivé au jeune couple, et tandis que leur meurtrier court probablement toujours dans la nature. 

Elle a « offert la mort » à son fils

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Elle a « offert la mort » à son fils

Elle a attendu la prescription pour avouer à la France entière qu’elle avait tué son fils.

En 1987, Anne Ratier a donné la mort à Frédéric, son fils de 3 ans, tétraplégique et lourdement handicapé. Elle lui administre une dose conséquente de neuroleptiques, ce qui provoque un coma de trois jours. Frédéric finit par décéder le 2 novembre. A l’époque, les médecins concluent sans plus d’investigations à une mort naturelle.

En mars 2019, trente-deux ans après cet assassinat, Anne Ratier publie un livre : « J’ai offert la mort à mon fils », et s’exprime dans les médias sur son geste.

Son histoire ne tarde pas à provoquer un véritable tollé. Peu de temps après, la justice réfléchit alors l’ouverture d’une information judiciaire pour « meurtre avec préméditation sur mineur vulnérable de moins de 15 ans ».

Mais à ce jour, aucune action n’a été ordonnée.

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