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C'est un bureau contigu à celui du président de la République. Un bureau qui donne du pouvoir à celui qui l'occupe tout en le maintenant dans l'ombre. Dans son dernier livre "Les cardinaux de la République", Renaud Revel dévoile les secrets du "bureau qui rend fou". 

Planet : Le secrétaire général de l’Elysée a un rôle clé pendant chaque quinquennat. En quoi consiste-il ?

Renaud Revel* : "Le secrétaire général de l’Elysée est l’homme le plus puissant du pays après le président de la République. Tous les dossiers de tous les ministères passent par lui. Il a également un rôle d’aiguillage et d’arbitrage. C’est aussi lui qui choisit les préfets et tous les grands corps d’Etat. Cet homme est à la fois l’ombre, la dague et la garde rapprochée du président. Il joue en quelque sorte le rôle d’un super-Premier ministre. 

Planet : Le secrétaire général est-il particulièrement craint dans les hautes sphères du pouvoir ?

Renaud Revel : Trois d’entre eux l’ont particulièrement été. Il y a d’abord eu Pierre Bérégovoy sous François Mitterrand. Il était certes dans l’ombre du président mais avait toutefois réussi à acquérir un poids politique prédominant. D’ailleurs, c’était sans doute le secrétaire général le plus politique de la Ve République.

Après Pierre Bérégovoy, deux autres hommes ont réussi à s’imposer : Claude Guéant et Dominique de Villepin. Tous les deux sont allés au-delà de leurs attributions et se comportaient comme des hommes de fer. Plus de que d’être dans l’ombre du président, ils se confondaient parfois avec lui. A un moment donné, ils ont tous les deux ont cru que leur bureau était celui juste à côté. En d’autres termes, celui du chef de l’Etat. Avec Claude Guéant et Dominique de Villepin il y a vraiment eu un mélange des genres et une confusion des rôles.

Planet : Dans votre livre, vous écrivez que le bureau du secrétaire général ‘rend fou’…

Renaud Revel : Oui, car il les a presque tous rendus fous ! Encore une fois, Claude Guéant et Dominique de Villepin sont ceux qui ont été les plus ‘atteints’. Tous les deux ont tendu à remplacer le président de la République tant ils avaient un poids politique prédominant. Ils ont tous les deux largement dépassé leur périmètre d’actions. Ils étaient en dehors de toute mesure. Certes, à l’époque ils avaient du pouvoir mais ils avaient aussi, et surtout, l’illusion d’une toute-puissance. Or, aucun d’eux n’avaient été élu et tous les deux ont disparu à la fin du mandat…

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Planet : Frédéric Salat-Baroux était secrétaire général de l’Elysée quand son beau-père, Jacques Chirac était président de la République. Quelle incidence leur lien de parenté a-t-il eu sur leur manière de travailler ?

Renaud Revel : Ce n’était pas facile, pour l’un comme pour l’autre. Le fait qu’ils soient gendre et beau-père a forcément influencé leurs relations de travail. Cela a faussé les choses. La situation était compliquée pour Frédéric Salat-Baroux du fait de ses liens tenus avec la famille Chirac. Quant à l’ancien président, il avait avec lui un comportement différent de celui qu’il avait d’ordinaire avec les hauts fonctionnaires".

*Renaud Revel est l’auteur de Les cardinaux de la République (éd. First Document)