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Vous avez l'impression que les rues de votre ville sont en travaux, surtout à certaines périodes de l'année ? Quelles en sont les raisons ? Il y a une explication économique et politique à cela.
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Le printemps et l’été sont des périodes propices aux nombreuses rénovations et réparations des infrastructures et de la voierie. Le beau temps et les départs en vacances permettent aux entreprises d'avancer plus rapidement. Un timing parfait pour que la ville se refasse une beauté. Mais tout les cinq ans, cet engouegment pour les travaux intervient à un moment précis et dans un but : les élections municipales. 

Prévue en mars 2020, les maires ont tout intérêt à ce que la ville convoitée soit au top de sa forme. On parle de "cycle électoral", comme le rapporte Le Monde. En fin de mandat, il y a un rebond des dépenses d’investissement. En effet, un bilan positif donne une meilleure image de soi et une chance supplémentaire d'être (ré)élu. C'est aussi un gage d'efficacité de la gestion de sa commune.

Pourquoi 2019 est une année plutôt favorable à l’investissement dans votre commune ? 

Selon le baromètre de la commande publique, les chiffres du premier trimestre 2019 sont arrivés à 21,5 milliard d’euros. Un niveau similaire à ceux les plus hauts en 2012/2013. En dépit d'une chute de 25% entre 2012 et 2016 sur les chiffres de l’investissement public, ces deux dernières années leur ont été favorables.

C'est une reprise conséquente des investissements pour les communes et les intercommunalités, qui ont vu leurs compétences largement modifiées après les nombreuses réorganisations institutionnelles et administratives. En cause : l'acte III de la décentralisation.

Les lois de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (Maptam) et sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NoTRe) sont à l'origine de ce désengagement pour l'entretien des communes entre 2012 et 2016. La refonte des cantons, la réduction des régions et la création de nouvelles métropoles n'ont pas arrangé les choses. Coup dur, donc, pour les investissements publics.

A cela s'ajoute la baisse des dotations de la part de l’Etat, qui ont a diminué de près de 6 milliards en trois ans. L'action d'Emmanuel Macron a naturellement freiné les élus dans leurs projets d’investissements. En effet, le président à demandé en début de mandat un effort de 13 milliards aux collectivités, contre plus de libertés. 

Vidéo en lien avec le sujet : Travaux : attention à cette arnaque

Pourquoi de nombreux chantiers reprennent ces derniers mois dans votre commune ? 

"Cette multiplication des chantiers n'est pas un hasard" explique Routes de France, syndicat professionnel des acteurs de la route dans les colonnes du Figaro. "Il y a toujours un pic d'activité l'année précédant les élections municipales", ajoute le syndicat.

Un phénomène que l’on observe également dans le secteur du bâtiment. "Les municipales de 2020 méritent bien de couper quelques rubans cette année", s'amuse les intervenants de la Fédération française du bâtiment. Il y a cinq ans, pas moins de 5,2 millions de m² de bâtiments administratifs ont subi des chantiers, quand l’année suivante, seul 4,4 millions m² ont fait l'objet de rénovation, souligne Le Figaro. Un pic d'activité qui intervient donc en fin de mandat. 

Les villes sont d’ailleurs les premiers clients de ces entreprises. "Cette année, les municipales vont apporter un chiffre d'affaires supplémentaire de l'ordre de 100 millions d'euros", dévoile Antoine Metzger, président du directoire du groupe de travaux publics nouvelles générations d'entrepreneurs (NGE).

Investissements publics : les collectivités territoriales moins concernées 

En parallèle, les collectivités territoriales (départements et régions) représentent à elles seules 58% des dépenses globales d’investissement. Elles ont par exemple, entre 2017 et 2018, acheté pour deux milliards d’euros de plus que les années précédentes. Cette somme est principalement engagée dans la rénovation des établissements scolaires, bâtiments publics et aménagements urbains.

Si cette baisse de l’investissement au niveau local a permis aux collectivités d'économiser trois milliards d’euros. Cependant, ces nouvelles dépenses ont puisé dans les ressources. Puisque les recettes des collectivités restent plus importantes que les dépenses, elles disposent par ailleurs d'une épargne bien plus conséquente que les communes et intercommunalités. 

Pourquoi les travaux dans votre commune provoquent-ils la grogne ?

A Paris, il n’y a pas que les usagers de la voierie qui perdent patience face à cette multiplication des travaux. Outre les difficultés de circulation pour les automobilistes, les transports accusent durant ces périodes d'importants retards.

Anne Hidalgo admet en effet que la capitale connait une période de travaux inhabituelle, plus particulièrement depuis 2018, à l’approche des municipales. Rues piétonnes, pistes cyclables, rénovation des places, les inaugurations ne vont pas manquer ces prochains mois dans la ville lumière.

La Fédération ariégeoise des Travaux Publics, au contraire, constate que les élections municipales sont un obstacle aux travaux d'aménagements. "Les élus ne souhaiteraient pas déranger les citoyens par des travaux à deux moments clés : au début du mandat et avant les prochaines élections", souligne les représentants de la fédération dans La Dépêche. Ce qui entrainerait selon Isabelle Ferrer, secrétaire générale de la Fédération, une baisse d’activité du secteur des travaux publics de 10 à 15%. Des propos qui entrent en contradiction avec cette effervessence pour les travaux ces derniers mois et cette stratégie électorale.