Istock
Eric Heyer, directeur à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), livre ses prévisions à Planet pour l'année 2018. Croissance, logement, travail, découvrez ce qui attend votre portefeuille.
Sommaire

La croissance et le chômage

"L’embellie économique devrait continuer avec une croissance que je place entre 1,7 et 1,8%. Ça sera un peu mieux que 2017. C’est la confirmation d’une reprise de faible ampleur qui reste par ailleurs décevante. Elle est tirée par la création d’emplois et les investissements. C’est une reprise bien perçue, qui favorise la confiance et donc les embauches"

"Attention toutefois sur la question du chômage, le niveau va baisser mais il restera élevé. La baisse devrait être de 0,2 points en 2018. Il y aura ainsi toujours de la création d’emplois en 2018 mais moins qu’en 2017 et cela est lié à des décisions de ce gouvernement : la suppression des emplois aidés, l’arrêt des primes d’embauches par exemple ou encore le maintien du CICE à un coût inchangé. Le chômage va baisser mais à un rythme faible et cela ne sera pas forcément perçu par l’opinion publique, d’autant qu’il y a environ 130 000 nouveaux entrants nets sur le marché de l’emploi."

10 ans après la crise des subprimes ?

"Il reste encore des stigmates en termes de chômage. Quand la crise a éclaté dans le monde, le taux de chômage était de 6,8%, aujourd’hui on est encore à 9,5%. Nous ne sommes toujours pas revenus au niveau d’avant crise.

A la fin du quinquennat, d’après nos projections nous n’aurons toujours pas retrouvé le taux d’avant crise. Même dans 15 ans, cela risque d’être compliqué. En matière de PIB, nous avons un PIB supérieur à celui d’avant la crise mais en terme de PIB par tête, on est tout juste revenu à l’avant crise. Cela veut dire que la richesse produite par habitant est revenue à son niveau d’avant crise, mais aujourd’hui on est plus productif qu’avant, grâce à la technogie, nous avons donc besoin de moins de gens pour produire la même chose. En matière de dette publique, nous sommes 30 points au-dessus d’avant la crise, on est à un niveau de déficit à peu près comparable."

Des dangers en France ?

"Il y a des bulles assez traditionnelles qui peuvent être inquiétantes, une bulle financière ou une bulle immobilière pourrait éclater et nous renvoyer à 2008-2009. Ce ne sont pas des bulles franco-française comme nous l’a déjà montré la crise d’il y a 10 ans. Après le propre des bulles c’est qu’elles sont difficiles à déceler et qu’on ne sait pas quand elles vont éclater. Ce qu’on peut dire, c’est qu’aujourd’hui en France, il y a faiblement une bulle au niveau des actions. Elle est plus faible que celle de 2008, elle pourrait éclater mais sans forcément entraîner une crise. Par ailleurs, le côté plus négatif c’est que nous avons moins de marge de manœuvre avec des finances publiques qui sont plus dégradées dans le monde entier. Ce sont des risques qui sont aujourd’hui sous contrôle sans conséquence selon moi, dans les deux ans."

De l'inflation ?

"Il y a toujours certains risques. L’inflation est très basse un peu partout dans le monde y compris dans les pays qui ont le plein emploi, ce qui est assez étonnant. Il y a cependant la possibilité d’avoir de fortes augmentations. En France, ce sont les prix de l’immobilier et du logement qui sont élevés et qui progressent de manière assez soutenue. On arrive à des niveaux qui deviennent problématiques pour une partie de la population. Cette tendance à la hausse ne devrait pas s’arrêter et les décisions économiques et politiques ne sont pas à la hauteur de l’enjeu."

Les enjeux de 2018

"En 2018, il y a un enjeu budgétaire. Le gouvernement a mis tout en place pour passer en-dessous du seuil des 3%. C'est un enjeu plus politique qu’économique, parce que ça permettrait à la Fance de ne plus être dans le processus de déficit excessif et du coup de changer de volet, de passer du volet correctif à un volet préventif et donc d’avoir plus de marge de manœuvre, de flexibilité pour mener une politique économique plus ambitieuse. Selon toute vraisemblance, on devrait être en dessous des 3%, mais très proches, c’est-à-dire qu’on devrait être à 2,8%. C’est comme pour le chômage, ça se réduit, mais tellement lentement qu’un simple petit incident pourrait remettre en cause cet équilibre qui est très fragile."