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L'affaire, qui avait éclatée en 2013, montre une gestion très politique de l'organisme chargé d'attribuer les logements sociaux dans cette ville dirigée par un maire Républicains.

Un vaste trafic d’habitations à loyer modéré (HLM), dans la ville de Courbevoie (Hauts-de-Seine), est devant la justice, comme le rapporte Le Monde.

Au cœur de ce réseau, Moussa N., l’ancien gardien d’immeubles qui a ouvert illégalement des logements sociaux à plusieurs familles africaines pauvres. Ces dernières, en plus d’avoir perdu des sommes conséquentes dans l’histoire, font l’objet d’une procédure d’expulsion de "leur" logement et de poursuites judiciaires pour "corruption et trafic d’influence". "S’ajoutent, dans la procédure, quinze personnes mises en examen pour avoir soudoyé le gardien, mais sans obtenir de logements.", précise le quotidien.

Le maire de Courbevoie parmi les relations du gardien

La procédure pour obtenir un logement social était des plus simples. Par l’entremise d’une tierce personne, le futur locataire contactait Moussa N., visiblement bien connu du quartier, qui indiquait pouvoir lui attribuer un logement grâce à ses relations.

Or, parmi ces "relations", le gardien évoque le maire de la ville, député des Hauts-de-Seine, et vice-président de l’office HLM, Jacques Kossowski du parti des Républicains (ex-UMP). Moussa N. le connaît bien puisqu’il a participé activement à plusieurs de ses campagnes électorales.

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Concrètement, le gardien faisait visiter les appartements aux personnes en leur proposant des tarifs à la carte : de 2 500 euros pour un studio jusqu’à 6 500 euros pour un quatre pièces, le tout en liquide. Selon les enquêteurs, entre 2011 et 2013, quarante personnes – les policiers emploient le terme de "victimes" - ont versé au gardien un total de 111 680 euros.

A partir de 2012, Moussa N. est entouré par deux autres intermédiaires. D’un côté Yassin M. dite "la femme d’affaires" qui fait visiter les appartements et perçoit des commissions. De l’autre, Djeamel H., qui exploite à son compte un des appartements et qui passe relever le loyer mensuel (de 850 à 900 euros), prélevé en liquide.

"Les combines de Moussa, c’était de notoriété publique"

Ce trafic éclate au grand jour le 24 juin 2013 lorsque Frédéric Glais, directeur de l’office public de l’habitat (OPH) de Courbevoie, est alerté par des locataires légitimes qui trouvent les appartements squattés. Une semaine plus tard, le ton monte lorsque plusieurs locataires se rendent compte que leur situation n’est toujours pas régularisée, malgré la promesse que leur faisait Moussa N. lors de la visite d’appartements. Les "victimes" et le gardien ont alors un échange musclé qui les conduira dans le bureau du maire de Courbevoie. "Le maire nous a demandé de laisser passer les élections [les municipales de mars 2014] et dit qu’il nous ferait ensuite signer un bail.", se souvient l’un des plaignants.

Quatre jours plus tard, le fameux gardien Moussa N. s’envole pour le Sénégal, "sur les conseils du maire" comme il l’a dit aux policiers qui ont pu le contacter. Une assertion contestée par le maire, Jacques Kossowski.

Comment ce trafic a-t-il pu perdurer jusqu’en juin 2013 alors que des signalements avaient déjà été enregistrés en 2010 ? "Les combines de Moussa, c’était de notoriété publique et ça ne gênait personne", indique une locataire "en titre".

Une gestion particulière de l’organisme HLM

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Comme le souligne Le Monde, "le petit commerce de Moussa N. s’inscrit dans un contexte de gestion bien particulière de cette organisme HLM". Un fonctionnement "très verrouillé et très politique", selon Karim Larnaout, administrateur de l’OPH et élu d’opposition (PS).

Celui-ci indique au quotidien que les représentants de la CNL (association  de locataires marquée à gauche), bien que remportant les élections de représentants de locataires, sont systématiquement écartés des commissions d’attribution de logements au profit d’une autre association, l’UDLI, "dont tous les dirigeants nationaux sont des élus et des militants des Républicains (ex-UMP)."

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