© AFPAFP
Ciblé par plusieurs observateurs (chercheurs, journalistes, politiques), l'ouvrage d'Eric Zemmour n'en finit plus d'alimenter la polémique. Décryptage en cinq points avec Planet.fr.
Sommaire

Il se vend par milliers et bénéficie d’une couverture médiatique à la hauteur des interrogations qu’il suscite. Le livre d’Eric Zemmour, Le suicide Français, n’en finit plus de faire parler de lui.

Dénoncé par les historiens pour sa lecture du régime de Vichy ou encore par les statisticiens pour l’inexactitude de certains chiffres annoncés, le livre fait l’objet de nombreuses critiques que se cristallisent en cinq principaux points. Planet.fr détaille les éléments qui font du "Suicide Français" un livre polémique.    

1. Zemmour et l’immigration

C’est un thème qui est très cher à Eric Zemmour. L’immigration serait en effet selon lui l’un des facteurs majeurs contribuant au "suicide" de notre nation. Il ne manque d’ailleurs jamais une occasion de le rappeler sur les très nombreux plateaux de télévision sur lesquels il est invité. À ce propos, les chiffres qu’il avance pour justifier sa position controversée sont souvent pointés par les spécialistes pour leur côté approximatif.

Lire aussi : Eric Zemmour : pourquoi son livre fait mieux que celui de Valérie Trierweiler

Flirtant allègrement avec les thèses défendues par le Front National en ciblant les migrants venus "du sud de la méditerranée", Eric Zemmour considère que "l’assimilation" de ces immigrés est un échec à l’inverse de celle des Italiens ou des Juifs observée selon lui au début du XXéme 20 siècle : "exemple rare d’assimilation réussie" écrit-il. L’induction d’un critère de "qualité" dans la question migratoire, scelle la dimension "polémique" du livre d’Eric Zemmour.

2. Pétain et les juifs français

C’est par le passage consacré au rôle de Vichy qu’est arrivée la première polémique relative à la sortie de son livre. En racontant que le maréchal Pétain a sauvé 90% des juifs français sous l’Occupation, Eric Zemmour s’est retrouvé dans le viseur, entre autres, des historiens. Serge Bernstein, André Kaspi, Laurent Joly, Denis Peschanski, Jacques Sémelin et même… Robert Paxton (l’historien américain dont il remet en cause les travaux) sont montés au créneau pour démonter la thèse d’Eric Zemmour.

Lire aussi :  Jean-Marie Le Pen estime que le régime de "Vichy est excusable"

"Falsification idéologique" ou encore "non-sens historique", les spécialistes de la période s’indignent de la résurgence de cette thèse. Car oui, si Eric Zemmour paraît transgressif, cette lecture de l’histoire de l’Occupation faisant de De Gaulle le glaive de la Libération et du Maréchal Pétain le bouclier de la barbarie de nazie date en réalité de la fin des années 40 et était principalement défendue par des milieux d’extrême-droite conservateurs. L’exposition de cette théorie renforce le caractère controversé du livre d’Eric Zemmour.   

3. La féminisation de la société

C’est l’un des chevaux de bataille du polémiste : la féminisation de la société actée par "le déclin de la masculinité". Selon Eric Zemmour, la nation subirait les effets néfastes de la perte des spécificités masculines. Voici par exemple ce qu’il écrit à ce propos : "Les garçons sont transformés en bonnes copines des filles. (…) Tout est rose bonbon, mièvre, acidulé. L’objectif n’est plus : 'Tu seras un homme mon fils !', mais plutôt : ‘Tu seras une femme, mon fils’'.

Lire aussi : Manuel Valls critique implicitement les thèses d’Eric Zemmour

Renvoyant la féminité à ses clichés futiles, l’auteur du "Suicide français" considère même que la diffusion de la série "Hélène et Les Garçons" symbolise à elle seule ce qu’il estime être une perte de repères car "les valeurs traditionnellement féminines, comme la douceur ou le compromis dominent aujourd'hui notre société". Cette obsession passéiste a d’ailleurs fait l’objet d’un précédent ouvrage signé par Eric Zemmour et qui, déjà, créait la polémique.

4. La méthode

Si Eric Zemmour est critiqué sur le fond de sa pensée, il l’est aussi sur la forme. Ainsi, plusieurs spécialistes lui reprochent son manque de rigueur dans les sources qu’il utilise ou dans les concepts qu’il convoque. Les références hasardeuses à l’histoire, l’instrumentalisation des chiffres de l’Insee, les contradictions de son discours ou encore les inventions auxquelles il se prête sont autant d’éléments qui sont mis en avant par ses détracteurs.

Pour vendre sa théorie de la "déstructuration" de la société française, Eric Zemmour avance des concepts imprécis qui sont régulièrement dénoncés. À l’image de son passage sur Vichy qui n’est agrémenté d’aucune référence précise à quelconque archives…

5. Surfer sur les peurs

Indéniablement, Le Suicide français fascine. Vendre le déclin de la société française dans le champ lexical de la déconstruction renforce le caractère sulfureux de l’ouvrage. "Si Éric Zemmour vend autant de livres, c'est parce qu'il exprime clairement ce qu'une partie de la population ressent confusément. Il est le porte-parole de cette population" note à ce titre Jérôme Fourquet, directeur du département "opinion" de l’Ifop.

Ce dernier qui voit dans le phénomène Zemmour "le symptôme d'une droitisation de notre société’" e xplique le succès du polémiste par "le mouvement de réaction d'une partie de la société face aux évolutions engendrées par la mondialisation, qu'il s'agisse de mutations économiques, avec les délocalisations, ou de l'ouverture des frontière". En outre, la prophétisation constante de l’apocalypse dans la doctrine "zemmourienne", donne de la force à l'impact médiatique de ses ouvrages .    

Vidéo :  Regardez le clash entre Léa Salamé et Eric Zemmour